Après trois ans d’absence, la chanteuse canadienne revient avec «Flavors of Entanglement», qu’elle a nourri de ses déboires personnels et de diverses influences musicales. Le résultat est un album étonnant et dansant, qui alterne mélodies, morceaux rythmés et sonorités exotiques
Tout le monde se souvient d’«Ironic», de «Thank U» ou «You Learn», les tubes incontournables de la chanteuse canadienne. Mais depuis trois ans, c’était silence radio du côté d’Alanis Morissette. La belle brune se faisait méchamment plaquer par Ryan Reynolds, l’actuel fiancé de Scarlett Johansson.
Plutôt que de se morfondre, Alanis Morissette en a profité pour écrire de nouvelles chansons. Et, surtout, elle s’est amusée: elle a incarné pour le petit écran la compagne lesbienne de l’anesthésiste Liz, dans la série «Nip/Tuck», s’est gentiment moquée des chanteuses r’n'b dans le clip «My Humps», s’est dévoilée avec ses deux chihuahuas sur sa page Facebook. Aujourd’hui, elle s’offre un véritable coup de jeune avec ce «Flavors of Entanglement», un album dansant et surprenant. Rythmes hip-hop, beats massifs, sonorités hindoues, mélodies évidentes, Alanis Morissette se met à la bonne page musicale. Et extériorise ainsi les rancoeurs du passé.
Coup de fil à une francophile francophone.
«Flavors of Entanglement» présente des sonorités inconnues jusqu’ici dans votre discographie. Vous aviez besoin de changement?
En fait, j’ai découvert un groupe qui s’appelait Frou Frou. C’était le groupe de Guy Sigsworth, un producteur de génie. Dès que je l’ai entendu, j’ai eu envie de ce son. Je lui ai donc proposé de travailler avec moi. On s’est rencontrés à Londres puis je l’ai emmené à Los Angeles. Là, en parfaite symbiose, on a écrit plus d’une trentaine de chansons ensemble.
Il a travaillé avec Madonna, Björk, des femmes de caractère. C’était un challenge de vous côtoyer aussi?
Non, je ne pense pas que ce soit un challenge, mais c’est très excitant de travailler avec moi. (Rires.) J’adore expérimenter de nouvelles choses.
Votre album précédent était entièrement acoustique; il signait la fin d’un cycle?
C’était la fin d’un chapitre, dans un certain sens. J’aime beaucoup la combinaison du hip-hop, du rap, de l’évolution technologique, de l’organique et de la guitare. Ça combine tout ce que je préfère.
Ce nouvel album a un titre tout à fait particulier, à quoi se réfère-t-il?
Quand j’ai écrit cet album, j’étais en pleine rupture amoureuse. C’était très intense. J’écrivais au passé mais c’était précisément en train de se passer. Dans la tourmente, j’ai écrit ces chansons, en temps réel, et ça a été très bon d’être en studio. Ça m’a sans doute sauvée. De plus, pour composer et écrire mes chansons, j’ai besoin d’un environnement où je ne me sens pas jugée mais juste en sécurité. J’ai tout le temps besoin d’être entourée. Encore plus particulièrement pour l’enregistrement de cet album-là.
Vous parlez parfaitement français; vous n’avez jamais songé à chanter dans cette langue?
Vous savez, mon père est Canadien francophone et ma mère est Hongroise. J’ai déjà interprété une chanson en français et une autre en hongrois, mais elles ne figurent pas sur mes albums.
Vous vous êtes toujours battue pour les plus faibles, vous êtes devenue bouddhiste, l’engagement en chanson a encore du sens aujourd’hui?
Oui, bien sûr, mais il faut toujours garder à l’esprit que seul, on ne peut rien faire pour changer le monde. Ce n’est que collectivement que l’on peut agir. Et si on apprenait à mieux s’aimer, la planète serait déjà différente. On a trop de peine à s’aimer. Il faut d’abord apprendre à le faire pour soi avant de l’enseigner aux autres.
Votre tube «Thank U» évoquait la vie sans artifice matériel. Il y a quelques jours, vous étiez à Genève avec les plus riches de la planète. Etes-vous à l’aise dans ces deux mondes?
Oui, je peux vivre comme une reine ou comme une hippie totale. Tout dépend du jour, de l’état dans lequel je me sens. Je n’ai aucun souci avec ça.
A quelques jours de la sortie de ce nouvel album, êtes-vous anxieuse de l’accueil qui lui sera réservé?
Je n’ai malheureusement pas encore d’enfant mais j’imagine que mes albums sont comme autant d’enfants. Et je m’en fous complètement de savoir si les gens les trouvent mignons ou pas. Je veux juste avoir mon enfant, c’est tout.