Première photographie : Giotto di Bondone (vers 1266/67 - 1337).
À gauche - " Saint Jean L'Évangéliste. Vers 1320. Tempera et or sur bois. 128 x 55,5 cm. Fontaine - Chaalis, Abbaye Royale de Chaalis, Institut de France. © Studio Sébert photographes.
À droite - Saint Laurent. Vers 1320. Tempera et or sur bois. 120 x 54,3 cm. Fontaine - Chaalis, Abbaye Royale de Chaalis, Institut de France. © Studio Sébert photographes.
Photographie de gauche : Tommaso di Giovanni Cassai dit Masaccio (1401 - 1428). Vierge à l'Enfant. Vers 1426 - 1427. Tempera et or sur bois. 24,5 x 18,2 cm. Florence, Istituti museali della Soprintendenza Speciale per il Polo Museale Fiorentino - Galleria degli Uffizi. © Soprintendenza Speciale per il Patrimonio Storico Artistico ed Etnoantropologico e per il Pol.
J'ai été particulièrement impressionné par une huile sur toile, dont la photographie est ci-dessous, de Bartolomeo Manfredi (1582-1622), intitulée Le Couronnement d'épines, datant de vers 1615 et conservée au Musée de Tessé à Le Mans. Ce tableau peut être comparé à une musique tellement le rythme y est prégnant. Il est en particulier suggéré par les oppositions : le clair-obscur bien sûr, mais aussi le visage du jeune homme (à notre droite) et celui du vieillard (troisième à gauche), le caractère lisse et rigide de l'amure et les drapés dont le soyeux est rendu d'une façon particulièrement remarquable (ce qui ne peut se reproduire par la photographie), les corps et les tissus, la droiture du soldat face à la résignation courbée du Christ, les mains crispées des bourreaux et celle abdiquant de Jésus, la concentration des uns (des deux bourreaux et du personnage tout à gauche qui lui aussi regarde la scène) et la quiétude presque désinvolte voire égoïste des autres qui ne semblent préoccupés que par eux-mêmes et non par le martyr du fils de Dieu etc. Plusieurs autres éléments servent de liaisons : les couleurs des tissus toutes plus ou moins différentes, les visages ressemblant à des notes sur cette portée musicale, les regards, les lignes formées par les épées, les bâtons et les lances etc. Les personnages sont au nombre de neuf et tous masculins. La lumière vient de notre gauche, obstruée en partie par un rideau noir, sans doute tiré afin de mettre en lumière cette obscurité humaine qui a amené par sa stupidité à faire souffrir la bonté. La scène est extraite du néant de la bêtise humaine pour être dévoilée, expliquée, presque décortiquée aux spectateurs par le peintre sans doute représenté dans la figure du personnage de gauche, seul témoin conscient de ce qui se passe. L'oeil qu'il lance vers le Christ souffrant est le seul regard humain ... du moins faut-il l'espérer ... et c'est la question que se pose peut-être le vieillard qui contemple ce regard de l'artiste qui du néant de la toile fait surgir une scène. Le vieillard serait la figure du spectateur et l'homme de gauche celle du peintre ... lui-même spectateur de ce qu'il met en lumière par sa composition presque musicale de cette réalité sortie des tréfonds.