~d'après MADAME BAPTISTE de Maupassant
Sur le boulevard Un cortège suivait un corbillard En direction du cimetière. Je demandais à mon voisin : -" Savez-vous qui on enterre ? " -" Une femme de Pantin Qui s'est tuée... Une histoire extraordinaire ! " -" Vous m'intriguez ! " L'homme me prit le bras. -" Je vais vous conter cela. Cette femme, Mme Paul Luzan Était la fille d'un riche paysan, Le père Martillet. À quinze ans, elle fut souillée Par un valet de ferme, un être dérangé. On l'appela Madame Baptiste Du nom du fou qui l'avait outragée. Elle était jolie, grande, artiste. Un sous-préfet, M. Luzan, l'épousa. Elle a vénéré son mari comme un dieu. Tout allait pour le mieux entre eux. C'est étrange, mais c'est comme ça ! Dimanche dernier, Le sous-préfet présidait Un concours d'orphéons Sélectionnés à Paris et ses environs. Quand il remit les médailles de la Musique. Aux trois meilleurs chefs de cliques, Un des récipiendaires, Vivement contrarié De se voir épingler À la boutonnière Une décoration de deuxième classe, La jeta à la figure de M. Luzan. (On ne peut pourtant pas Donner un ruban De première classe À tout le monde, n'est-ce pas ?) -" Garde-la pour Baptiste, ta médaille. Elle est indigne de mon talent. Elle n'est bonne que pour une valetaille. " Les spectateurs s'esclaffèrent. Puis les yeux se tournèrent Vers Madame Luzan. On s'était levé Pour voir la tête qu'elle faisait. Elle avait un air surprenant Pétrifié, éperdu. S'ensuivit une incroyable cohue. De retour à la sous-préfecture, Elle absorba des sels de cyanure. "