L'Arabie saoudite a lancé le 25 mars des frappes aériennes contre la milice chiite houthiste qui menace la stabilité du pays. Georges Malbrunot, grand reporter au Figaro revient sur les origines de ce conflit.
http://video.lefigaro.fr/figaro/video/yemen-comprendre-le-conflit-en-3-minutes/4138326740001/
Comprendre le conflit au Yémen
Par Olivier Péguy | Avec AFP, LE POINT.FRSitué dans le sud de la péninsule arabique, le Yémen se trouve depuis plusieurs semaines au bord de la guerre civile. Cette crise s’inscrit dans une histoire mouvementée.
Histoire récente
Le pays a, pendant des siècles, été dirigé par un imam du courant religieux chiite zaïdite auquel se soumettaient les tribus.- Ce système d’imamat perdure jusqu‘à la révolution républicaine de 1962. L’imam se retranche dans son fief de Saada, au nord-ouest du pays. Des militaires s’installent au pouvoir, le pays prend le nom de République arabe du Yémen (“Yémen du Nord”). Une guerre civile se déclenche et durera 8 ans.- Dans le sud du territoire, anciennement sous domination britannique, se crée en 1967 la République populaire du Yémen du Sud (“Yémen du Sud”), d’orientation pro-soviétique, qui, devient en 1970 la République démocratique populaire du Yémen, avec Aden pour capitale.- En 1990, la République démocratique populaire du Yémen et la République arabe du Yémen fusionnent pour former un seul État, la République du Yémen. Mais cela ne gomme pas les clivages entre les territoires. Ali Abdallah Saleh devient président de cet Etat. Il le restera jusqu’en 2012.- Dans la foulée des révolutions arabes en 2011, le pays connaît des manifestations de rue qui aboutissent à la démission du président Saleh en 2012 et le début d’un processus de transition. Abd Rabbo Mansour Hadi devient président.- En 2014, les zaïdistes, regroupés sous l’autorité d’Abdel Malek al-Houthi (d’où le nom de “Houthis”), dénoncent le plan de fédération proposé par le président, estimant que cela limite leur pouvoir. Ils réagissent en marchant sur la capitale Sanaa. Ils en prennent le contrôle en septembre 2014.- En 2015, les membres de cette milice houthie étendent leur influence sur le pays, obligeant le président Mansour Hadi à fuir Sanaa et se réfugier à Aden.Les groupes qui s’opposent
La crise actuelle illustre la profonde division entre les populations, une division attisée par l’antagonisme entre groupes militaro-religieux : “Ansaruallah” et “Al-Qaïda dans la péninsule arabique”AnsarullahCe mouvement recrute ses membres dans la communauté zaïdite, une branche du chiisme qui représente un tiers de la population du Yémen.Les zaïdites se regroupent autour d’un guide spirituel, Badr Eddine al-Houthi, tué en 2004. C’est alors son frère, Abdel Malek al-Houthi qui lui succède, perpétuant la lutte contre le pouvoir à Sanaa.Ces miliciens houthis sont soupçonnés de vouloir renverser le président et rétablir le régime royal de l’imamat zaïdite aboli en 1962.D’inspiration chiite, la milice houthie s’inspire du Hezbollah libanais et est soupçonné d’avoir le soutien de l’Iran.Al-Qaïda dans la péninsule arabiqueAl-Qaïda dans la péninsule arabique (Aqpa) est né de la fusion en janvier 2009 des branches saoudienne et yéménite de la mouvance “Al-Qaïda”. Aqpa est considéré comme l’un des groupes djihadistes les plus dangereux par les Etats-Unis.Il est fortement présent dans le sud et le sud-est où il multiplie attentats anti-chiites, attaques contre les forces armées et enlèvements.Aqpa a revendiqué l’attentat du 7 janvier qui a décimé la rédaction de l’hebdomadaire satirique français Charlie Hebdo.Des rivalités régionales
Les zaïdites, qui composent la milice houthie, sont de farouches adversaires des salafistes et des wahhabites, du nom de la doctrine rigoriste pratiquée en Arabie saoudite.L’opposition idéologique et religieuse s’est traduite par des affrontements dans les années 2000. L’armée saoudienne a alors été mobilisée. En réaction, l’Iran a dépêché dans la zone des navires de guerre.Aujourd’hui, Ryad voit d’un très mauvais œil l’avancée de la milice houthie au Yémen, redoutant l’installation d’un pouvoir d’inspiration chiite à sa frontière sud.Les Houthis sont-ils vraiment soutenus et équipés par l’Iran ? Téhéran dément.Les Américains soutiennent depuis des années le pouvoir yéménite dans la lutte contre les islamistes d’Al-Qaïda dans la péninsule arabique. Ils mènent des opérations aériennes utilisant des drones. Mais face à l’avancée de la milice houthie, Washington a fermé son ambassade à Sanaa et fait évacuer ses troupes.Face à cette instabilité, l’ONU a tenté d’initier un dialogue, qui est aujourd’hui au point mort. Les Nations-Unies ne peuvent que s’alarmer de la dégradation de la situation humanitaire.