Les entreprises technologiques créent de nouveaux usages qui n’entrent pas toujours dans le spectre des régulations actuelles. Comment alors faire collaborer les régulateurs et les entrepreneurs ?
"Réguler l’économie de la disruption". C’est autour de ce thème qu’experts (juges, avocats, régulateurs) d’entreprises innovantes et d’institutions publiques ont échangé la semaine dernière à l’école de droit Hastings de l’Université de Californie à San Francisco. Jeffrey Rabkin, Assistant Procureur Général de l’état de Californie spécialisé dans la technologie et la cybercriminalité a expliqué que les entreprises dites disruptives ont toujours existé et continueront à naître. Il est donc important que les instances de régulation s’adaptent à ces évolutions et ce de façon coordonnée car trop souvent, la technologie évolue beaucoup plus rapidement que les lois. Cette différence de vitesse d’évolution mène alors à un "knowledge gap" ou fossé de connaissances entre les entrepreneurs et les personnalités gouvernementales.
Un fossé technologique entre régulateur et entrepreneur
"Les régulateurs ne sont pas assez réactifs. Un cas judiciaire concernait par exemple une enquête liée à l’utilisation frauduleuse d’un GPS pour traquer un suspect en 2005, et l’affaire a été traitée seulement en 2009, alors que la technologie avait largement évolué depuis" raconte Jeffrey Rabkin. Ce dernier a notamment collaboré pour l‘adoption du numérique dans les fonctions régulatrices, permettant ainsi aux policiers de consulter les casiers judiciaires des personnes interpellées sur un appareil mobile, plutôt que de passer par plusieurs sources à travers une communication radio. "Les personnes dans les fonctions gouvernementales doivent comprendre les nouvelles technologies et les utiliser si elles comptent créer des lois pour réguler ces technologies."
Les entreprises doivent s’investir dans les régulations
De leur côté, les entreprises technologiques peuvent également collaborer afin de donner lieu à des régulations plus adaptées à leur activité. Les partenariats entre entités privées et publiques permettent de mieux sensibiliser les régulateurs lors de visites sur les campus des entreprises par exemple. Pour Jeffrey Rabkin, les entreprises gagneraient à faire appel à un conseiller juridique le plus tôt possible dans le développement de leur produit ou service, surtout lors de la phase d’incubation. Il est également primordial pour ces entreprises de s’investir dans les processus de législation. Et le juriste de citer les exemples de Google, Facebook, HP, Amazon ou Apple, ces derniers ayant travaillé avec le Département de Justice de Californie pour signer un accord stipulant l’adoption d’une politique de confidentialité au sein des applications mobiles. Dans une autre mesure, les parties prenantes telles que les investisseurs des entreprises technologiques ont un grand rôle à jouer dans l’identification des politiques de régulation. Les étudiants en droit se situent aujourd’hui à un moment charnière de régulations dans le monde technologique.