L'histoire : En plein coeur de l'hiver 1899, le docteur Edward Newgate se rend à l'asile de lunatiques Stonehearst pour compléter ses connaissances sur la folie et se spécialiser dans la psychiatrie. Le directeur de l'établissement, le docteur Lamb, l'étonne par ses procédés novateurs et très vite, Edward se sent oppressé par l'atmosphère étrange qui règne dans les lieux.
Honnêtement, si vous vous attendez à un film du niveau de Shutter Island, passez votre chemin. Après, si vous êtes ouvert d'esprit et pas trop exigeant, Stonehearst Asylum a les moyens de vous faire passer un bon moment parce qu'il y a quelques éléments très réussis. L'histoire est inspirée de la nouvelle Le Système du docteur Goudron et du professeur Plume d'Edgar Allan Poe et il faut avouer que l'ambiance du film, avec les décors extérieurs rendus glacés par une lumière bleutée ou les vastes salles lambrissées de l'asile, est fidèle à l'esprit de l'auteur. Brad Anderson y a même ajouté une touche de gothique anglais pour renforcer l'aspect inquiétant de l'univers dans lequel évoluent les personnages et frôle parfois le cliché, comme avec l'orage le soir de Noël qui pourrait être possible mais qui reste peu crédible parce que c'est rarissime.
Je ne connais pas le texte de Poe (mais je vais m'empresser de le trouver parce que l'intrigue m'intrigue) mais je suppose qu'il pose les bases des multiples inversions des rôles des protagonistes, montrant que le fou n'est pas toujours celui que l'on croit et que même l'être qui paraît être parfaitement sain d'esprit peut cacher des failles mentales. Stonehearst Asylum est avant tout un divertissement et ne se présente pas comme un film philosophique ou moralisateur ; il n'empêche qu'il soulève des questions intéressantes sur le traitement des malades mentaux au début du XIXème siècle, notamment en donnant un aperçu de la "médicamentation" de l'époque. Tout ce qui tourne autour des patients et de la psychiatrie est relativement bien traitée, sans tomber dans la caricature ou le tragique. Pour le reste, certaines parties du scénario sont discutables et la fin est plutôt improbable, à part le petit switch lors de la visite de Mr Graves, mais le rocambolesque fait partie de l'époque alors c'est tout à fait acceptable.
Malgré les quelques incohérences et certains aspects série B du film, le casting assez prestigieux fait bien son boulot, Ben Kingsley, David Thewlis et Jim Sturgess en tête. Le premier campe un médecin qui paraît à l'écoute de ses patients mais cache en réalité un passé trouble et il le fait impeccablement. Il a un truc qui le rend à la fois distingué et inquiétant. David Thewlis, Mr Finn, est un psychopathe comme je les aime, brutal et cinglé à souhait, sans pourtant en faire trop sur la folie et il inspire une peur insidieuse parce qu'elle ne paraît pas justifiée. Quant à Jim Sturgess, il parvient à donner de l'âme à un jeune homme qui paraît plutôt simple et innocent, puis à lui conférer plus d'épaisseur à mesure que le film avance et que le personnage se complexifie. Face à eux, Kate Beckinsale joue la carte de l'hyperféminité et il faut l'admettre, elle le fait très bien. Après, si on retire à Eliza Graves sa beauté, il ne lui reste pas grand chose et c'est un personnage assez creux. Au début, je ne la pensais pas indispensable à l'intrigue mais le dénouement m'a détrompée. Par ailleurs, j'ai trouvé la passion presque instantanée d'Edward Newgate pour Eliza assez bien traitée car si sa fascination est vite soulignée, le rapprochement des deux personnages ne se fait pas trop rapidement pour garder un minimum de crédibilité.
Alors oui, Stonehearst Asylum n'est pas exempt de défauts mais il comporte quelques bons passages et il m'a accrochée jusqu'au bout grâce au combo folie + ambiance gothique + l'ombre de Poe + super casting. Et sans être très surprenant, il amène quelques rebondissements bien pensés.
P.S Par contre, l'affiche est tout simplement affreuse et laisse penser qu'il s'agit d'un film mal fait, limite série Z, alors que ce n'est pas le cas.