1833, aux confins des Balkans. Alors que les odeurs de poudre des troubles de 1830 traînent encore dans le ciel d’Europe, des incidents divers et étranges — moutons massacrés, disparition d’enfants, viol d’une jeune beauté magyare — se succèdent au retour du comte Alexander Korvanyi dans son domaine abandonné par la famille depuis l’assassinat, 50 ans plus tôt, du grand-père d’Alexander par l’ethnie des Valaques. Les braises de ces événements lointains ont couvé sous le passage du temps. Le caractère excessif du comte, comme un souffle puissant, les réveillera et embrasera son domaine. Pouvoir, autorité, amour, cruauté, indifférence, ambition, haine, vengeance, toutes les motivations convergeront dans un affrontement sanglant entre les truands à l’origine des divers méfaits et la petite noblesse de la Korvanya.
Dans un récit historique aux accents gothiques, Mathias Menegoz peint la vaste fresque d’une mosaïque multiculturelle explosive. En effet, la patrie de Dracula, dont l’ombre plane encore dans l’imaginaire de ses habitants, abrite les Valaques de langue roumaine, les Magyars de langue hongroise et les Saxons de langue allemande. Trois ethnies qui se détestent et s’étripent à la moindre occasion. D’origine magyare, les Korvanyi exècrent les Valaques et les traitent avec dureté. De leur côté, les Valaques rêvent de détruire le pouvoir féodal et de se donner un pays souverain de langue roumaine. Les uns comme les autres ne constituent cependant que deux groupuscules insignifiants à l’échelle de l’Histoire européenne. Une fois le sang séché, quel souvenir restera-t-il de l’affrontement entre les forestiers valaques et la petite noblesse de la Kovanya, sinon que celui d’un récit palpitant, mené de main de maître par le récipiendaire du Prix Interallié 2014?
Ce livre plaira à ceux et celles qui aiment l’action et les péripéties, les revirements et les passions exacerbées, la petite histoire au service de la grande. Du début à la fin, la tension intense fait parler les armes. Tous, combattants et chevaux en paient le prix. Des hommes et des femmes meurent, d’autres sont blessés. Dans les deux camps. Pourtant, au-delà de tous ces morts, c’est bien le régime féodal qui agonise.
Son éditeur nous apprend que « Mathias Menegoz est né en France en 1968, d’un père normand et d’une mère souabe du Danube. Après des études scientifiques à Paris conclues par un doctorat de l’Université Paris V réalisé dans un laboratoire de neurobiochimie au Collège de France, il abandonne la recherche pour se consacrer à l’écriture. Karpathia est son premier roman. »
Mathias Menegoz, Karpathia, P.O.L., Paris, 2014, 697 pages.