Le mois de janvier 2015 aura permis de bien mettre les choses au clair : d’un côté, le camp du Bien, composé essentiellement de socialistes de gauche assumés ou de droite honteux, et, de l’autre, celui du Mal, qui pue du bec, pense de travers et nous rappelle entre deux prouts intellectuels les heures les plus sombres de notre histoire. Le Camp du Bien, évidemment, est et a toujours été Charlie. Le Camp du Mal, de son côté, est polymorphe, puisqu’il peut être tour-à-tour Marine, Dieudonné ou tant d’autres, mais un truc est absolument certain : le Camp du Mal n’est pas Charlie.
Cela paraît simple, comme ça, sur le papier. Mais depuis janvier, les choses ont évolué rapidement et pour les différencier au-delà de la simple odeur (printanière pour le premier, fétide pour le second) et du pin’s porté en boutonnière (je ne parle pas de légion d’honneur, colifichet sans classe), il faut cependant faire bien attention.
Le Camp du Bien est bruyamment pour le vivre-ensemble, la douceur de vivre, la dignité. Il est, bien sûr, pour la liberté d’expression, la liberté de croyance. Il a, d’ailleurs, sanctuarisé la liberté des uns et des autres à faire leurs propres choix. Le Camp du Bien trace avec fierté et labeur le sillon dans lequel il plantera les graines de la croissance du pays qui donneront les arbres fruitiers d’une sage richesse que viendront cueillir les générations futures, pour qui tout est fait à grand renforts d’humanisme, d’éducation, et de communication sur les lendemains qui chantent.
Alors que le Camp du Mal, a contrario, vitupère contre l’altérité et utilise des expressions qui agressent. Le Camp du Mal est colère, peur et trépignements. C’est l’emportement, l’exagération, la caricature grossière. C’est ce Camp qui mène le pays au désastre. C’est lui qui attend la Nation derrière un buisson alors qu’inquiète, elle regarde au fond du gouffre la beuhête immeuhonde qui risque de surgir, et c’est lui qui, pif, lui file un coup de coude pour l’y pousser sans remords.
En pratique, même si distinguer le Camp du Bien du Camp du Mal peut être simple, ami lecteur, je te propose quelques exemples pour exercer ta sagacité.
Ainsi, prenez l’exemple de ce récent blocage de site islamic-news.info. Bien sûr, comme c’est un site qui aurait une sale petite tendance à faire l’apologie de certains crimes, et un peu du terrorisme, c’est assez simple. Ce sont des méchants, et le ministère de l’intérieur, ce sont des gentils. Les gentils clouent le bec des méchants, c’est facile. Ce peut être un peu contre-productif, et on sent évidemment qu’il suffit pour les gentils du ministère de désigner ceux qu’ils veulent comme méchant pour que le site soit fermé, sans même tenir compte du délai de 24 H légal pour que l’hébergeur soit mis au courant, mais baste, il faut ce qu’il faut. Et d’ailleurs, le Camp du bien ne ménage pas sa rapidité et a déjà envisagé d’étendre le blocage aux sites injurieux envers des élus, le tout sans en passer par un juge, inutile en ces temps d’internet rapide. Le Camp du Mal n’a qu’à bien se tenir !
Ainsi, prenez l’exemple d’un député qui dépose des amendements à la Loi Santé de Marisol Touraine pour imposer aux agences de mannequinat de vérifier par un examen de santé que l’Indice de Masse Corporelle de ses modèles (ou aspirant modèles) n’est pas trop faible (avec 75.000 euros d’amendes en cas d’infraction), et qui, dans foulée, déclare au sujet de certains sites internet, je cite :
« Il existe aujourd’hui sur internet un certain nombre de sites qu’on appelle les « pro ana » [ndh16:pro anorexie] (…) Cette situation me parait tout à fait inacceptable, c’est pourquoi nous proposons cet amendement. »
Alors, là encore, c’est assez facile de voir que le député appartient au Camp du Bien puisqu’il sait mieux que les autres ce qui est bon ou pas pour eux. Il sait, lui, ce qu’il convient de faire pour éradiquer l’anorexie et les comportements troubles de certaines gamines. Et peu importe que tout l’arsenal juridique existe déjà pour lutter contre les problèmes qu’il soulève : il sait aussi qu’interdire et contraindre est une méthode qui fonctionne. Il sait : il est dans le Camp du Bien, après tout.
Ainsi, lorsqu’on se rend compte qu’un candidat Front National a posté sur son Facebook, il y a deux ans, des montages photos ridicules le mettant en scène, qui avec une marionnette de Sarkozy, qui avec un pistolet sur la tempe d’une marionnette de Hollande, on sait qu’on a, d’emblée, affaire à un protagoniste du Camp du Mal, et que cette véritable chasse aux méchants qui s’organise par presse interposée est justifiée et place immédiatement cette presse-ci et ces autres candidats-là qui dénoncent ces vilaines photos dans le Camp du Bien. Facile.
Ainsi, la liberté d’expression ne permet surtout pas d’insulter, et évidemment pas d’enguirlander un arbitrage ouvert à débat. Oser un virulent « pays de merde », c’est très dangereux, dans ces périodes où chaque écart sera disséqué et monté en épingle, où on pourra même trouver un député pour s’offusquer des saillies d’un footballeur courroucé d’un arbitrage défavorable. Pour le coup, l’élu est évidemment dans le camp du Bien, et le footballeur a malencontreusement trotté d’un pas sportif dans le Camp du Mal. Rassurez-vous, poursuivi par une meute, il revient gentiment du bon côté, mais vous le voyez, le dérapage peut avoir lieu n’importe où, concerner n’importe qui, et aboutir comme ici à une terrible faute contre l’arbitrage français, qui, comme l’a expliqué Patrick Kanner, le ministre des sports, …
« … doit être vraiment sanctuarisé parce que sinon, c’est la porte ouverte à toutes formes de dérive ! »
Dérives qui, si on n’y prend garde, poussent, on le comprend, à laisser un peu trop parler des gens qui feraient mieux de la boucler, comme ce Zemmour dont tout le monde s’accorde à dire qu’on ne peut plus le tolérer à la télé. Enfin, tout le monde, c’est-à-dire le Camp du Bien. Ce camp-ci qui se demande à longueur de colonnes ce qu’il aurait fallu faire pour museler les opinions dissidentes, pour ne surtout pas laisser s’exprimer ceux qui, inévitablement, font le lit, la cuisine, le ménage et le repassage du Front National, ultime avatar du Camp du Mal. Parce que, comprenez-vous, la liberté d’expression doit être totale pour le Camp du Bien, et nulle pour celui du Mal. Sinon, que voulez-vous, c’est la porte ouverte « à toutes formes de dérives ». N’est-ce pas.
À tel point que lorsqu’on lit les plus belles envolées lyriques de l’une des égéries de ce Camp, on n’a plus aucun doute. Dans un texte qui s’auto-caricature de lui-même avec un brio (et une pesanteur de Valkyrie nourrie exclusivement au beurre frais, manifestement) que ne renierait pas un Desproges cynique ou un Sacha Guitry au faîte de son ironie, on comprend immédiatement que ce Camp a le droit, lui, de faire preuve de colère, de caricaturer l’opposant forcément nauséabond, d’appeler à la vengeance, d’utiliser la peur (celle de l’Apocalypse, rien de moins), et de scinder le peuple en deux, avec d’un côté, ceux qui n’auront rien à se reprocher qu’on pourra inclure dans la République, et de l’autre, ceux qui auront fricoté avec ses mauvaises tendances qui n’auront droit qu’à l’exclusion.
Vous voyez, amis lecteurs, les Camps sont assez facile à identifier : le Camp du Mal, sournois, aggrave sans bruit tous les problèmes alors que celui du Bien, lui, n’en résout aucun et en crée de nouveaux dans le plus grand tapage.
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