Après 11 jours d’hospitalisation, Toddler 5 a eu la permission de rentrer vendredi soir. 11 jours, ce n’est rien et pourtant c’est long pour un petit bonhomme terrorisé qui ne comprend pas ce qui lui arrive et pour une maman à la patience légendaire légèrement stressée. Il faut dire aussi que l’hôpital de Colchester a fait la une des journaux nationaux depuis qu’il est en redressement administratif pour manquements graves et mise en danger de la vie des patients, avec enquête parlementaire et tout ça. Tout de suite, ça inspire confiance.
C’est un hopital généraliste, le service pédiatrie traite les cas courants, les appendicites, les crises d’asthme, les fractures, pas les cas graves, qui sont transférés à l’hôpital des enfants malades, soit à Cambridge, soit pour les plus difficiles à Londres. Bref, rester 11 jours, ce n’est pas courant. De l’aveu même des infirmieres, c’est comme si on avait aménagé sur place. Ça m’a permis d’observer le NHS en général et notre hopital en particulier en pleine action (faut bien s’occuper). A part une infirmière débile pressée qui a voulu plié la jambe fracturée de Toddler 5 et un interne pas fichu de faire la différence entre un tibia et un fémur (j’aurais dû lui flanquer le doigt dans l’œil en lui disant, pardon, je voulais vous serrer la main, mais j’ai confondu), on n’a croisé personne qui nous ait paru foncièrement dangereux incompétent. Le NHS fait même des efforts pour accueillir le mieux possible les petits patients. Dans le service pédiatrie, on trouve une salle de jeux avec des puéricultrices dévouées, une salle de classe avec deux institutrices, une cour pour les petits, plus un salon pour les ados et une parents room. Tout est bien décoré, et d’une propreté remarquable, vue l’armée de femmes de ménage qui désinfectent en continu (c’est pénible, c’est tout juste si elles ne viennent pas récurer les tasses encore pleines avant qu’on ait pu les boire…ou alors c’est moi qui prends trop de temps pour finir mon thé? ). Évidement, les chambrées ne sont pas exactement propices au calme et au repos. Vous voyez une rame de métro aux heures de pointe, la piste d’atterrissage de Heathrow ou de Roissy, un ampli de guitare électrique qui explose, une centrale hydraulique à fond les engrenages, le décollage d’une fusée, une kermesse d’école avec la sono déréglée, un concert de heavy métal alternatif serbo Croate, une éruption volcanique, un marteau-piqueur hyperactif attaquant une bouche d’égout à même le métal? Oui? Et bien vous prenez tout ça, vous mélangez bien, et c’est de la rigolade comparé au vacarme dans les chambrées du service pédiatrie de l’hôpital de Colchester.
Pour le peu que j’en ai vu, le problème n’est pas non plus un manque de personnel , parce que bon, trois infirmieres plus une aide soignante pour 5 malades, ça leur suffit largement pour prendre un thé en discutant vacances sans être dérangées tout le temps par des parents qui réclament bêtement qu’on remette la perfusion de leur gamin. Trois radiologues pour un fémur, ça va aussi. Le problème qui s’est posé jour après jour avec Toddler 5, c’est le manque de communication entre tous les gens sensés le soigner. Heureusement que j’étais là au début et que j’ai bien suivi tout ce qu’a dit son docteur, parce qu’il a fallu que j’explique à chaque nouvelle infimiere quoi faire pour changer les couches ou refaire les bandages. Comme Toddler 5 a une fracture un peu particulière, il avait un traitement inhabituel, que son docteur a dicté à son second qui l’a répété à son interne qui l’a griffonné pour l’infirmier chef qui a demandé à une subalterne de mettre ça sur le dossier, en hiéroglyphes. Il ne restait plus rien du traitement prescrit. Les docteurs ne parlent pas aux infirmieres, qui n’adressent pas la parole aux radiologues qui méprisent les docteurs. Ce n’est pas gagné. Chacun y va de sa petite idée, sans tenir compte des autres.
Je me rends bien compte que j’ai l’air de la mère pénible qui croit tout savoir en disant ça, mais je me suis contentée de répéter encore et toujours ce qu’avait dit le médecin, et de réclamer qu’on le fasse venir quand on ne me croyait pas, ce qui lui a permis d’exprimer sa désapprobation des infirmieres en language fleuri et de me donner raison. J’aurais préfèré avoir tort (qui a dit « tout arrive »?). Comment font les parents qui ne peuvent pas être 24/24 avec leur enfant à l’hôpital, ou ceux qui ne parlent pas anglais? D’après le rapport parlementaire préliminaire, le problème de l’hôpital de Colchester est purement administratif et organisationnel. On est bien d’accord.