A son tour, Ganymède, plus grand satellite naturel du Système solaire, livre ses secrets en révélant l’existence d’un immense océan d’eau salée sous sa surface gelée. Avec Europe et Encelade, il est désormais considéré comme potentiellement habitable.
Sur les quelque 1 897 exoplanètes découvertes et confirmées à ce jour (source exoplanet.eu) — Pegasi 51b fut la première, annoncée en 1995 —, seules une vingtaine sont considérées comme potentiellement habitables au miroir des critères terrestres. Dans notre Système solaire, c’est donc notre planète qui est en plein dans la zone habitable, une région « tempérée » qui entoure le Soleil, où il ne fait ni trop chaud ni trop froid. Ses dimensions, son atmosphère, l’eau à l’état liquide à sa surface, etc. sont autant de caractéristiques recherchées pour d’autres mondes autour de lointaines étoiles, pour espérer y détecter la signature d’une activité biologique. L’un des plus proches de nous n’est qu’à 22 années-lumière (22 ans donc à la vitesse de la lumière), quoique le système Alpha Centauri B (une des trois étoiles Alpha Centauri dont la fameuse Proxima), à 4,3 années-lumière seulement, pourrait bien cacher, outre une super-Vénus (très chaude), une ou plusieurs planètes comparables à la nôtre. Bref, pour l’instant, les recherches continuent. Aussi, la première découverte d’une vie extra-terrestre — si il y en a — ne se fera-t-elle pas à des dizaines ou centaines d’années-lumière de chez nous, mais plutôt à quelques minutes-lumière… Autrement dit, dans des mondes tout proches, en orbite autour du Soleil.
L’une des premières cibles à laquelle on pense est Mars. Plus certainement, des traces d’une vie passée, si tant est qu’elle y ait un jour existé. Les autres sont plus éloignées : peut-être Cérès (planète naine entre Mars et Jupiter), sinon Europe et Ganymède, autour de Jupiter, Encelade et Titan, autour de Saturne. Pour l’instant, il n’existe aucune preuve ni certitude quant à la vie, mais le moins que l’on puisse dire est qu’ils sont tous, ou presque, habitables. Voici quelques jours, une équipe de chercheurs démontrait qu’il existe en effet des indices forts d’une activité hydrothermale à l’intérieur d’Encelade, petite lune de 500 km de diamètre. Ce sont précisément ces milieux, considérés comme de véritables usines physico-chimiques au fond des océans terrestres, qui sont suspectés être à l’origine de la vie… Alors pourquoi pas ailleurs ? D’autant plus, que les astronomes soulignent le fait qu’il y ait, là-bas, tous les ingrédients nécessaires : eau liquide, chaleur et minéraux. Même si c’est un petit satellite naturel parmi 61 autres dans l’environnement de la célèbre planète aux anneaux, situé à plus de 1,3 milliard de km du Soleil en moyenne, il est un des astres privilégiés par les exobiologistes dans la recherche de la vie ailleurs. Autre cas majeur, Europe. D’ailleurs, celui-ci sera très probablement exploré de près par une future sonde spatiale à l’horizon 2025-2030.
Illustration des aurores de Ganymède
Un immense océan à l’intérieur de Ganymède
Dans cette quête qui ne fait que commencer, les chercheurs ne peuvent plus ignorer désormais, Ganymède. Avec un diamètre de 5 262 km, il est la plus grande lune du Système solaire. Il dépasse effectivement, en taille, Mercure ou la Lune et peut presque rivaliser avec Mars. L’un de ses traits particuliers est d’être le seul satellite naturel à posséder un champ magnétique (son dauphin, Titan, est le seul à arborer une épaisse atmosphère), ce qui n’a pas manqué d’intriguer. Qu’est-ce qui peut le générer ? Un océan d’eau salée (donc conducteur), proposaient déjà des astronomes sur la base de modèles dans les années 1970.
Une équipe qui vient de présenter ses recherches dans le Journal of Geophysical Research : Space Physics (12 mars 2015) vient de confirmer, grâce à des observations menées dans l’ultraviolet avec Hubble, l’existence de cette énorme masse d’eau à l’intérieur du satellite galiléen, sous une épaisse croûte de roches et de glace de 150 km. Les chercheurs emmenés par Joachim Saur de l’université de Cologne eurent l’idée de s’intéresser à ses aurores. « Si il y a un moyen pour regarder à l’intérieur de ce corps planétaire, ce sont les aurores » avait songé le scientifique avant d’entamer les recherches, « parce qu’elles sont contrôlées par le champ magnétique (…) ». En effet, dans le cas où il y a un océan d’eau salée, le champ magnétique de Jupiter en aurait créé un secondaire qui viendrait gêner celui de la planète géante. Une « friction magnétique » viendrait alors supprimer les oscillations, changements de position des aurores. L’action de l’océan qu’ils ont observé indirectement dans l’ultraviolet, longueur d’onde visible dans l’espace, est si forte que celui-ci parvient à réduire les oscillations à 2° plutôt qu’à 6° si celui-ci n’existait pas. Depuis le début des années 2000, les planétologues suspectent sa présence grâce aux mesures du champ magnétique avec la sonde spatiale Galileo. Les récentes observations du télescope spatial viennent confirmer son existence.