Belles découvertes parisiennes! D’abord, le Collège des Bernardins, rue de Poissy, que je ne connaissais pas, ensuite, un jeune artiste, Lyes Hammadouche, qui a su admirablement « habiter » un des espaces de ce collège cistercien fondé par un abbé de Clairvaux dès le XIIIème siècle. L’installation de Hammadouche s’intitule « Tout est parti d’une colonne ». Jusqu’au 5 juillet. (tous les jours 10-18h. dimanche 14-18h)
Pour moi, cette installation de Lyes Hammadouche c’est de l’art contemporain dans toute son exemplarité. Pourquoi? Parce que elle est à la fois accessible directement par le visiteur (sensations immédiates assez fortes), détentrice de mille références sous-jacentes et résultat d’une longue et patiente mise en oeuvre.
On est loin des poubelles colorées suspendues au plafond, entrevues dans une autre expo parisienne….A fuir!
Un- On est séduit de prime abord. Deux- On peut approfondir considérablement la première impression. Séduction? l’ancienne sacristie du Collège des Bernardins est un petit espace obscur où deux colonnes de pierre s’élèvent haut jusqu’à la voûte gothique. Dès l’entrée, on est saisi par une ambiance…. Un son gronde légèrement. On pense à un mantra. Des ombres et de lents mouvements de lumière circulent et, à intervalles réguliers, un bruit plus fort intervient qui fait soudain vibrer un réseau de lasers rouges partout dans la salle. On est captivé. Disques qui tournent. Sable qui coule. Engrenages géants qui s’enroulent autour des colonnes. Rythmes très lents. Bruits qui scandent notre visite. Dessins à la Vinci aux murs.
On s’assoit (coussins prévus à cet effet). Nous viennent des sensations du temps qui s’écoule. Des images d’horloge, de sablier, de métronome. On est fasciné. On se laisse aller. (On apprendra plus tard que Hammadouche a étudié l’induction hypnotique).
Après la poésie immédiate, arrive (peut-être) l’envie de comprendre. Cette installation est bourrée de mécanismes complexes et d’utilisations numériques.
Et voilà qu’une adorable médiatrice vous propose de vous apporter des explications. On les complètera avec la brochure distribuée gracieusement. Et c’est alors un déluge de références! On reconnaît bien là l’artiste contemporain! Qui ne se contente pas d’exprimer et de provoquer des sensations ou émotions! En fait, chacune des 5 oeuvres de cette installation est « grosse » d’allusions, de connaissances, de recherches, de réflexions…
Là où l’on ne devinait qu’une expérience du temps et une incitation à la méditation, se révèlent bien d’autres choses! L’artiste fait référence au big bang et à son rayonnement électromagnétique, à la rotation des planètes, à l’envoi des deux sondes Voyager, au célèbre jardin zen de Kyoto (Ryoan-jii) etc. Tout se tient. Tout est lié. (Même si, à priori, ce n’est pas évident…Mais si!)
Bon! On se rassoit! Le voyage va être plus long que prévu! Nous nous élevons, nous communions avec le cosmos, nous remontons le temps…
L’artiste a étudié longuement ce lieu, l’a mesuré, calculé, écouté, cartographié… Et il a construit son oeuvre à partir de là. J’aime ce genre de travail contemporain. (Sans le côté artificiel, forcé, hypocrite et superficiel rencontré trop souvent).
Je ne décris pas chaque élément de cette installation. Ce serait trop long. Même si j’en meurs d’envie! Allez-y! Allez-y!
Mes photos ne rendent pas l’univers créé par l’artiste. Désolée. Cliquer néanmoins pour agrandir, en deux fois.