Métier en vogue s’il en est, community manager fait rêver jeunes et moins jeunes. Pourtant, l’envers du décor pourrait en rébuter plus d’un.
Note : si je fais un peu de community management, je m'exprime ici davantage en tant qu'observateur. Si des community managers passent par ici, qu'ils n'hésitent pas à corroborer ou à réfuter ces quelques points.
Le CM, entre hyper-exposition et indifférence
Un des paradoxes du métier tient dans ces deux mots.
D’un côté, le community manager est hyper-exposé à l’extérieur. Porte d’entrée d’une entreprise pour de nombreux internautes, ses propos sont visibles part tous, tout le temps. Chacun de ses mots représente la marque et impacte potentiellement l’image que chacun peut s’en faire. Le choix heureux ou malheureux d’un mot, voire d’un smiley, peut changer le sentiment d’un client par rapport à un produit.
Cette responsabilité portée par le CM peut bien évidemment devenir lourde, très lourde. Si son contrat de travail prévoit en théorie 35 heures, il est en réalité sur le pont 24/24, 7j/7. La frontière entre conscience professionnelle et obsession devient ténue. Son stress est renforcé par la dictature du temps réel, qui impose un niveau d’alerte important et permanent. La réactivité inhérente à la relation client se conjugue à la sur-exposition dont il fait l’objet. Autant de risques de confondre entre vitesse et précipitation.
Un CM est parfois porté aux nues par la communauté et par ses pairs pour un tweet plein d’à-propos. Mais une petite erreur suffit pour qu’il soit descendu en flammes. Des Tumblr dédiés et des articles aguicheurs du type le top 10 des fails de CM viendront hurler avec les loups dès qu’un étourdi aura utilisé un de ses comptes Twitter professionnels pour balancer un tweet personnel.D’un autre côté, le community manager doit faire face à l’indifférence, voire le mépris des autres collaborateurs de l’entreprise. Son métier est souvent mal compris, parfois jugé superficiel et peu stratégique. Comme pour d’autres métiers de la communication, il est perçu comme un centre de coût plus que comme un centre de profit. Son activité spécifique le place dans une situation à part. Ce facteur d’isolement (intellectuel) est renforcé par le temps réel des médias sociaux, en décalage avec le temps de l’entreprise.
La solitude du community manager
De l’isolement à la solitude, il n’y a qu’un pas. Si le CM est l’expert en interne qu’on interroge pour toute question relative aux médias sociaux, vers qui se tourne-t-il quand lui a une hésitation ou une difficulté ? Seul détenteur d’un savoir particulier, il a rarement en interne un pair capable de lui donner une solution. N’oublions pas également que le quotidien du CM consiste pour une large part à gérer des mécontentements, exprimés parfois de manière violente. Sans compter les questions idiotes, la mauvaise foi…
A cet isolement vécu dans la sphère professionnelle fait écho celui des sphères familiales ou amicales. Le CM doit plus qu’un autre expliquer son métier et faire face à l’incrédulité malgré la bienveillance dont il bénéficie. Et j’imagine la scène à la mairie lors d’un mariage, lorsque le maire découvre la profession du CM…Conseils à un CM pour éviter la déprime
Si un pote ou une copine CM avait le blues, je lui suggérerais de faire un tour en Montgolfière.
- Rallume le feu. Si l’usure née de l’hyperexposition et de l’indifférence guette, alors fêtes dignement les petits et gros succès. Vise un seul et unique retweet pour te réjouir du 2e et hurler de joie dès le 3e.
- Lâche du lest. Quand un fardeau se révèle trop lourd, le meilleur moyen de l’alléger est de le partager ! Il s’agit moins de répartir ta responsabilité que de distribuer les actions, voire les prises de parole. Les recettes sont connues mais pas toujours en place : s’appuyer sur un réseau d’ambassadeurs externes, former des collaborateurs qui peuvent prendre le relais sur des sujets précis…
- Prends de la hauteur. Oui, c’est normalement la conséquence logique du point précédent. En pratique, prends de la distance pour être moins affecté par les critiques ou l’indifférence. N’essaie donc pas de convaincre tout le monde, sois réaliste sur le périmètre et le délai du changement.
- Déconnecte un peu, mais vraiment. Expérimente la digital-detox, sois absolument injoignable pendant des heures, voire des jours et constate que la terre continue de tourner.
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- Ermolaev Alexander (Shutterstock)