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Oh !...Cheval, mon amour !

Publié le 11 mars 2015 par Dubruel

d'après FOU ? de Maupassant

Suis-je fou ?

Ou seulement jaloux ?

Le soupçon persistant,

L’amour trahi,

La douleur abominable,

Suffisent pour commettre l’irréparable.

J’ai souffert horriblement

Et accompli un acte de folie.

Oh ! J’ai souffert de façon continue,

Épouvantable, aigüe.

J’ai aimé une femme.

Non, elle m’a possédé corps et âme,

J’ai été sa chose, son jouet.

Au début, je frémissais

Dès qu’elle commençait à se dévêtir.

Entre ses bras, je m’épuisais,

Je me sentais défaillir,

Autant secoué par le besoin de la tuer

Que par le désir de la posséder.

Mais un jour, elle s’est lassée.

Quand je l’appelais,

Elle se retournait et disait :

‘’ N’aurais-je jamais la paix ? ’’

Alors, je devins jaloux.

Suis-je fou ?

Non. Elle me trompait.

Autrefois, nous passions

Des nuits d’amour ardent.

Maintenant,

Je suffoque d’indignation.

J’ai envie de l’abattre sous mon genou.

Suis-je fou ?

Non. Je sens qu’une passion nouvelle

Vit en elle.

Autrefois, elle palpitait.

Son œil flambait.

De tout son être vibrant se dégageait

Cet amour d’où mon affolement provenait.

Et tout à coup,

Je devinais ! Je ne suis pas fou.

Comment vous dire ceci ?

Je fus averti ainsi :

Hier soir, à la clarté vespérale,

Elle rentrait d’une promenade à cheval.

Il m’a semblé pénétrer dans des secrets

Que je n’avais pas soupçonnés.

Qui jamais ne sondera

Les perversions si fines

De la sensualité féminine ?

Qui, des femmes, comprendra

Les caprices invraisemblables

Et l’assouvissement impalpable

De leurs étranges frénésies ?

Chaque matin, elle galopait

Par les plaines et les bois

Et chaque fois,

Elle rentrait alanguie

Comme après des fièvres d’amour ardent.

J’avais compris !

J’étais jaloux du cheval nerveux et galopant,

Jaloux du vent

Qui la caressait,

Jaloux des feuilles qui, en passant,

Baisaient ses oreilles,

Jaloux du soleil

Qui, à travers les branches,

Inondait ses hanches

,

Jaloux de la selle qui la portait

Et que sa cuisse étreignait.

C’était cela qui l’exaltait,

L’assouvissait,

L’épuisait,

Et ensuite me la rendait

Insensible et presque pâmée.

Je résolus de me venger.

Je fus pour elle doux et attentionné.

Après ses courses effrénées,

Quand elle mettait pied à terre,

Je lui tendais une main hospitalière

Mais il ruait vers moi, son furieux cheval !

Et elle, flattait l’encolure de l’animal,

Embrassait ses naseaux !

Comme si elle sortait de la tiédeur

Des draps conjugaux,

Le parfum de son corps

Se mêlait à l’odeur âcre

De son coursier roussâtre.

Le lendemain sonna l’heure de ma vengeance :

Je saisis une corde et mon pistolet,

Puis courus en transe

Vers le sentier qu’elle empruntait.

J’ai tendu la corde entre deux troncs

Et me cachai derrière un buisson.

Bientôt j’entendis un galop lointain.

Elle arrivait à fond de train.

Oh ! Je ne m’étais pas trompé,

Elle semblait d’allégresse transportée.

La course faisait vibrer ses nerfs

D’une jouissance furieuse et solitaire.

Le cheval heurta mon piège, trébucha,

Et, les os brisés, s’écroula.

Comme s’il eut été un homme, je tirai

Et le tuai

D’un seul coup.

Dites-moi, suis-je fou ?


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