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De retour de Martinique pour un véritable dépaysement. L’île de sucre, de cannelle, de cocotiers ouvre ses bras chaleureux au visiteur de métropole. La beauté des anses que dominent les mornes (monts) prédispose au délassement et à la rupture du rythme trépidant qu’impose la vie loin des tropiques.
Oui, un séjour sous le soleil bénéfique et dans un environnement riche de plantations et de relations humaines.
Les gens d’ici ne sont pas ne sont pas plus grands, plus fiers ou plus beaux, comme le chantait Julien Clerc (This Melody) ; seulement ils sont d’ici, les gens d’ici. C’est-à-dire héritiers d’une terrible destinée, celle de l’esclavagisme (aboli en 1794 puis réintroduit en 1802 par Napoléon 1° avant que d’être totalement supprimé par les efforts de Schœlcher en 1848), le sang noir coulant dans les veines mais l’esprit de revanche totalement éventé comme un bon rhum dont le flacon aurait perdu son bouchon de liège.
Oui, les gens d’ici sont dans leur grande majorité des descendants d’esclaves mais la splendeur de leur île les rend beaux et fiers…et chaleureux…
Nous avons été logés chez Alphonse et Catherine et jamais nous n’oublierons leur gentillesse et leur convivialité.
Merci aussi à toute l’équipe du restaurant Chiche de St Luce qui nous a régalés de mets fabuleux et de courtoisie non feinte.
Nous retrouvons la métropole le cœur enlacé de beaux souvenirs, à jamais gravés dans le bois de notre mémoire créolisée. Quand le crépusculaire vêtement d’alizé Fait coucher le soleil dans le dos du diamant De la roche raisonne l’écho d’une journée Envoûté de lumière tirée de rêves blancs.
Sur les sableuses anses que dominent les mornes Nos pas se sont perdus comme les mille remous Qui ballottent les barques dont les teintes flagornent La beauté d’un écrin qui s’écrit toupatou.
Dans l’arôme du rhum des trois îlets sacrés Joséphine revit de sa trouble légende Le reproche insulaire dit qu’en ses beaux harnais Elle aura alpagué le roi de la truande.
Napoléon Modi a remis l’esclavage Au sommet de son art qu’on avait aboli Le sang des condamnés a durci les rivages En quinze roches blanches, mémoire endolorie…
Quinze bustes affligés dessus l’Anse Caffard Orientés sans espoir vers leur douce Guinée Anonymes enchaînés dans l’atroce brouillard D’une traite servile aux mains des négriers. Ils sont là, souriants, les enfants d’outragés La bonhomie créole comme unique défense Le sang de leurs aïeux, ce long fleuve sacré En la mangrove noire de racines en mouvance.
Ils sont là, souriants, sous les palmiers nourris Par ce vent de cannelle et de bougainvilliers La faconde éternelle dans l’enfance en sursis Ce plaisir naturel d’offrir à se donner…
Adieu pays sucré, d’élégance fruitée D’authentiques regards sous la noire chevelure Les corps sous le madras, aux langueurs déhanchées L’âme étourdie de mots, de Césaire, en césures… L'âme enivrée de mots, de Césaire, en césures...