Jeudi 5 mars, 9h06. Man m'envoie un email pour me rappeler qu'on est jeudi. Oups...
Non, je ne suis pas abruti au point d'avoir mon horloge parlante personnelle. Quoique. Mais le jeudi est mon jour. Mon jour sur le blog. Le jour où je publie mes inepties et mes délires paranoïaques. Quand je ne me trompe pas de jour... Mais depuis 2 mois mon espace temps est chamboulé par une petite princesse de 3 4 4,5kg, et j'oublie parfois. D'où la remarque, tout en douceur, de Man pour me rappeler à l'ordre. Au moins ça le fait marrer. A mes dépends, c'est ce qu'il préfère.
Bref, moi qui était en pleine conférence sur les pacte d'actionnaires dispensée par un cabinet d'avocats. Le séminaire débutait à 9h et un petit déjeuner était prévu à 8h45. J'étais là à 8h45 9h. Pile presque à l'heure. L'associé m'accueille. Oui, c'est un copain d'enfance et de fac. Il sait tout de suite me flatter: tu as changé, tu as pris des kilos? Il vient donc de perdre l'infime possibilité que je travaille avec lui. Il n'a pas tort cela dit. Il m'a connu quand je faisais moins de 70kg. 15kg plus tard, me revoilà. Mais le plus drôle, c'est qu'il a pris encore plus de poids que moi et qu'il est loin d'avoir ma carrure!! Ironique non?
Finalement, cette conférence m'a permis de changer le sujet inintéressant prévu initialement sur quels vêtements de running pour cette mi-saison. A la place, je peux vous faire partager, cette fois-ci de l'extérieur, le comportement d'un avocat. C'était tellement amusant. Moi qui ne connaît que trop bien le fonctionnement de ces gens-là et des cabinets. Une véritable étude sociologique et anthropologique en 2h. Gratuitement en plus! Plus passionnant que le sujet juridique objet du séminaire...
Le séminaire commence par quelques mots de l'associé: " Nous sommes heureux de vous recevoir" . VRAI. N'oublions pas que ce séminaire a pour objet de (1) rassembler des clients et surtout des clients potentiels pour facturer un max pour pouvoir acheter la Mercos à bobine pour se faire pardonner d'avoir couché avec la stagiaire blonde à forte poitrine lors d'une énième soirée au cabinet pour travailler ne pas rentrer chez soi, (2) pour montrer que ces chers (à tous les sens du terme...) avocats sont les plus intelligents du monde et de l'univers planétaire et interplanétaire et que donc nous devrions faire appel à eux pour nos dossiers, (3) montrer, qu'en plus d'être supérieurement intelligent, on peut être drôle et sympa. Mais j'étais là, j'y étais. Pendant 7 ans. Je sais que tout cela n'est qu'un jeu de rôle patiemment préparé où tout est froidement calculé. Il faut paraître sympa car qui a envie de travailler avec des cons? Il faut donc se construire une image la meilleure qui soit, donc loin de la réalité. Mais quand on connaît de l'intérieur le fonctionnement d'un cabinet, on sait très bien que plus le mec paraît sympa, plus c'est un gros connard méchant avec ses collaborateurs. Le plus drôle est qu'ils pensent être plus intelligents que les petits " juristes " d'entreprise, mais ne peuvent pas le leur montrer. Les artifices déployés, les éléments de langage utilisés et les courbettes destinées à acheter notre sympathie sont une danse de séduction des plus amusantes pour moi. Et autant dire que je déteste ça même si je m'en amuse. Je n'aime que la franchise et l'honnêteté intellectuelle. Et vu le niveau de certains, ma fille ferait mieux qu'eux...
Le séminaire se poursuit: " Avant de commencer, quelques mots sur le cabinet; nous sommes " experts " en fusions-acquisitions, pratique dirigée par moi-même et mon père (et oui, pire que des notaires), en droit du travail, avec Bob l'Emploi et Johnny Anpe, en blablablablabla avec machintrucbidule" . VRAI. Du moins dans leur tête. Ils sont persuadés d'être experts en tout et leader universel sur des micro-marchés qu'ils ont eux-même créés pour se classer premier. Exemple: " nous sommes leader sur le marché des fusions-acquisitions entre boulangeries du 17ème arrondissement de la rue de Lévis à la rue Legendre sans compter la portion piétonne qui ne compte que pour du beurre " . Ce qui est génial, c'est que chaque cabinet de Paris est leader. Cool, moi qui pensait que la France manquait de leaders. Me voilà comblé! Mais la liste à la Prévert de tous les associés du cabinet valait le détour. On se serait cru dans La Chance aux Chansons: à la guitare, René Corde, à la batterie Michel Baguette, aux claviers Gilles Lenoiretblanc, à la basse Alain Tagueule, etc. Le séminaire n'a été organisé à 95% pour ça: présenter le cabinet et ses " expertises ".
Ensuite, quand l'avocat ne savait pas répondre à la question posée (scénario qui s'est répété plusieurs fois), il sortait une petite blague pour détourner l'attention, parfois avec talent je dois le reconnaître. Mais je sais aussi quand l'avocat ne sait pas. J'étais lui il y a peu... Il suffit pourtant de dire " je ne sais pas ", " je vais vérifier ". C'est de l'honnêteté, de l'humilité. Nous ne sommes pas supposés tout savoir sur tout. Et heureusement. Mais les avocats se refusent à l'admettre. J'en perds donc encore un peu plus d'estime pour eux dans ces cas-là.
Je vous passe une longue série d'anecdotes du même acabit pour ne garder que le meilleur: à la fin du séminaire, ayant une conférence téléphonique dans 5mn, je dois courir au bureau pour ne pas être trop en retard. Mais l'avocat est vif: il me coupe littéralement toute possibilité de retraite pour me dire qu'il faut absolument qu'on se fasse un déjeuner pour parler des dossiers que je pourrai lui apporter pour qu'il atteigne ses objectifs de chiffre d'affaires du bon vieux temps. C'est le moment que je déteste le plus. Autant j'adore manger, autant je n'aime pas me forcer à passer un déjeuner avec un mec qui n'attends de moi que du pognon. D'autant que les restau sont chics, moi qui reste le plus souvent en jean-converse au bureau (sauf réunions importantes, quand même) et qui ne rêve que d'un bon bacon burger-frites-mayo.