Aux États-Unis, où le système de santé est très coûteux et élitiste, les nouveaux entrants du secteur de la santé cherchent à concentrer leur stratégie sur le consommateur et ses besoins en bousculant fondamentalement cette industrie au fonctionnement jugé encore trop traditionnel.
Sur les 50 entreprises leaders du domaine de la santé recensées par la liste « Fortune 50 » 38 sont ce qu’on appelle des « nouveaux entrants ». Parmi ces derniers, moins de la moitié sont des entreprises issues du domaine de la santé (14), rapporte l’étude publiée par le Health Research Institute et 24 entreprises appartiennent à des secteurs divers et variés : vente au détail, technologie, finance, télécommunications, produits de consommation et automobile. Mais leur arrivée dans cette industrie n’est pas sans provoquer une certaine rupture. Citons par exemple Samsung. Ce conglomérat sud-coréen, notamment deuxième constructeur mondial de smartphones, intègre un capteur de fréquence cardiaque dans son modèle Galaxy S5 via l’application S Health. Ou encore le géant de l’Internet Google qui a fondé Calico en 2013, une société de biotechnologie qui se concentre sur le procédé du vieillissement et des maladies qui y sont associées.
L'avantage de ces grands groupes réside dans leur base de données qui recense tout un tas de données sur leurs clients. Une source d’informations qui leur procure un avantage certain quand il de s’agit de déterminer ce que les consommateurs ergo les patients veulent. Mais les grands acteurs ne sont pas les seuls à rejoindre le secteur de la santé. Bon nombre de start-ups s’y engouffrent également. C'est le cas de SpruceHealth qui permet de consulter un médecin à distance en lui transmettant des photos, ou encore la plateforme Prevent, qui propose aux personnes présentant des risques de diabète de suivre des programmes de prévention… Ces nouveaux entrants ont déjà acquis une forte réputation auprès des consommateurs ce qui les rend légitimes et crédibles sur ce marché. La question de savoir si les acteurs traditionnels du domaine de la santé (hôpitaux, cabinets) doivent rentrer en compétition ou en collaboration avec ces nouveaux acteurs reste en suspens.
Les Américains prêts à changer leurs habitudes de soins
Les nouveaux entrants deviennent donc dépendants des consommateurs, et l’étude révèle que ceux-ci seraient enclins à abandonner les modes de soins et examens traditionnels en faveur de nouveaux. Une opportunité de taille à saisir pour les nouveaux entrants lesquels multiplient les initiatives et mettent sur le marché des moyens alternatifs de se soigner (kits d’auto-diagnostic, applications smartphones, plateforme web destinées au diagnostic…). L’étude révèle que plus de 50% des sondés seraient prêts à opter pour un examen à la maison, lorsqu’il s’agit de désagréments mineurs : presque 60% aimeraient pouvoir diagnostiquer une angine directement depuis chez eux grâce à un test acheté en magasin, 55% des répondants seraient enclins à contrôler leurs signes vitaux à l’aide d’un appareil rattaché à leur smartphone, la même proportion de consommateurs seraient prêts à envoyer une photo numérique d’un problème de peau mineur à un dermatologue pour obtenir des conseils. Plus atypique cette fois, près de 43% des répondants seraient intéressés par une vérification de leur pacemaker directement de chez eux par leur médecin grâce à un système sans fil.
Sans grande surprise, les plus enclins à opter pour des alternatives en matière de santé sont les 35-54 ans, lit-on dans l’étude. Il s’agit aussi de ceux qui dénoncent l’important poids de la santé dans le budget familial. Ces nouveaux marchés représentent un énorme manque à gagner pour les professionnels de santé « traditionnels » hôpitaux et cabinets de médecins confondus.
Une implication plus forte du patient
Le soin se rapproche désormais des foyers ; un phénomène qui entraîne une démocratisation des soins médicaux mais aussi du diagnostic. Dans un futur proche, Les consommateurs ne dépendront plus des médecins de famille ou des hôpitaux locaux lorsqu’il s’agira d’obtenir un avis médical ou même des traitements : 64% des sondés déclarent être ouverts aux moyens alternatifs de se diagnostiquer et d’obtenir un traitement. Dans ce nouveau cadre, le terme « patient » disparaît pour devenir le terme "consommateur" très emblématique. Outre l'aspect très consumériste, ce terme implique une prise en charge plus forte de la part de l'individu.
Le diagnostic « fait maison » deviendra plus simple et plus rapide mais il aura aussi ses limites : l’utilisateur ne possède pas le savoir des professionnels, néanmoins il devient apte à « participer » aux soins qu’il recevra. Les consommateurs accèdent au statut de « collaborateur » lors du procédé de diagnostic. Par exemple, les futurs utilisateurs de ce système de santé démocratisée pourront être connectés sans fil à un système de télémédecine par le biais de compagnies de télécommunication. Un tel système pourrait éloigner des millions de patients des cliniques, cabinets médicaux et autres dispensaires. Pour ne pas se faire distancer, les centres médicaux académiques seraient en train de travailler à la digitalisation et à la démocratisation des avis médicaux afin que les systèmes d’assurance santé puissent eux aussi procurer virtuellement des soins de qualité à n’importe quel usager.