Pourquoi l'Afrique du Sud subit-elle des coupures d’électricité ? L'économie élémentaire nous enseigne que c’est parce qu'il n'existe pas de réel marché de l'électricité. En effet, l’existence d'un monopole protégé gouvernemental, Eskom, empêche ledit marché de voir le jour.
Les gouvernements ont une capacité extraordinaire fermer les yeux quand il s’agit d’entendre les contradictions de leurs politiques. La plupart considèrent les monopoles privés ou les entreprises devenues dominantes grâce à l’efficacité et l'excellence de leurs services comme «anti-concurrentiels » et préjudiciables aux intérêts des consommateurs. À l’opposé, les monopoles gouvernementaux protégés, qui ne parviennent pas à offrir des services de qualité aux consommateurs, à effectuer la maintenance appropriée, qui emploient un nombre excessif de personnel, payent des salaires supérieurs à ceux du marché, réalisent d'énormes pertes, ou réclament constamment des hausses de prix ou les renflouements de leur déficit par de l’argent public, continuent d'être soutenus politiquement peu importe le mal qu'ils font subir à l'économie du pays.
Dans un marché ouvert et fonctionnant librement dans lequel les pénuries et les excédents sont ajustés par les variations de prix, les entrepreneurs n’attendent pas la pénurie pour investir. Ils les anticipent et investissent afin d’en profiter à l'avenir. S’ils se trompent dans leurs calculs, ce sont eux qui supportent les coûts et les pertes, et non les contribuables ou les consommateurs.
Le Livre blanc réalisé par le gouvernement en 1998 a alerté les entrepreneurs sur le fait qu’en 2007 il y aurait un déficit dans la capacité de production d'électricité en Afrique du Sud. Les représentants des sociétés énergétiques privées ont créé des bureaux dans le pays afin de lancer un appel d’offre visant mise à niveau de la production. Le gouvernement les a ignoré, ils ont alors laissé tomber le projet. Près de 17 ans plus tard, la pénurie d'électricité non seulement persiste, mais elle s’est aggravée en raison de l’entretien inadéquat, les décisions techniques inappropriées et même par ce qui semble être la négligence pure et simple. La pénurie s’est également aggravée à cause de mauvaises décisions évidentes d’Eskom concernant la construction de nouvelles capacités de production. Et, surtout, par une incapacité à établir un marché concurrentiel à tous les stades depuis la production jusqu’à la livraison de l'électricité.
Récriminer l’histoire passée est futile. Ce qui est important aujourd’hui est que les bonnes décisions soient prises pour résoudre les problèmes et améliorer l'efficacité du système d'approvisionnement en électricité dès que possible. Cela ne peut être fait sans l’abandon du monopole d’Eskom et l’intégration des entrepreneurs, petits et grands. Une première étape doit consister à ouvrir le marché de l'électricité et à supprimer les obstacles qui empêchent toute personne ayant la capacité de fournir de l'électricité à commencer à vendre aux clients qu'il peut approcher. Par exemple, les particuliers qui ont investi dans la production d’électricité doivent être autorisées à en fournir à leurs voisins de palier sans avoir à obtenir une licence.
Selon des responsables gouvernementaux, l'accès au réseau d’acheminement d’électricité n'a pas été refusé aux producteurs d'électricité indépendants. Néanmoins, l'imposition de frais de connexion et de transmission exorbitants et l’exigence d'être le seul acheteur d'électricité transitant par le réseau à des prix trop bas équivaut finalement à un refus d'accès.
Quand l'Afrique du Sud aura un marché d'électricité où les consommateurs finaux ont le choix entre de nombreux fournisseurs, comme c’est le cas pour les consommateurs d'électricité en Nouvelle-Zélande (NZ) et au Royaume-Uni, nous aurons un système d'approvisionnement en électricité bien structuré.
Les exemples de la Nouvelle-Zélande et du Royaume-Uni révèlent que des réseaux de production et de distribution d’électricité, appropriés et gérés de manière autonome, sont essentiels dans la mesure où avec de nombreuses sociétés de production, plusieurs grossistes et détaillants entreront en concurrence les uns avec les autres pour offrir aux consommateurs le meilleur service au prix le plus bas. La concurrence est incontournable pour fournir un système d'électricité efficace et moins couteux. Toutefois, dans un marché flexible et concurrentiel les conditions d’exploitation changent de manière permanente. Des innovations telles que les réseaux intelligents, les compteurs intelligents, et les panneaux solaires sont introduits, et dans certains cas réduiront considérablement la pression de la demande sur les réseaux de livraison d'électricité.
Les développements en cours dans la production, le transport et la livraison de l'électricité sont incitation pour le gouvernement sud-africain à se désengager de la production et à permettre aux entreprises privées de financer, construire et opérer dans ce domaine. La propriété et la gestion de la fourniture d'électricité étatique ont été abandonnées dans les pays les plus avancés. La raison la plus importante étant qu'un monopole public n’est pas assez réactif pour rester à la pointe des nouveaux enjeux du développement. Il faut laisser les entrepreneurs, qui sont des experts dans le domaine de la concurrence, prendre en charge la gestion globale, et laisser les investisseurs, recherchant un retour sur investissement, prendre en charge le financement.
Si le gouvernement s’était fixé comme objectif en 1998 de transformer le secteur de l'électricité selon les propositions contenues dans le Livre blanc de 1998, nous aurions pu avoir aujourd’hui un marché de l'électricité pleinement opérationnel pour le bonheur de tous les Sud-Africains.
Eustace Davie, analyste pour www.freemarketfoundation.com. Article initialement publié en anglais par Free Market Foundation – Traduction réalisée par Libre Afrique – Le 4 mars 2015.