Quatrième de Couverture
"Qu'est-ce que j'ai fait au bon Dieu moi pour avoir des mecs comme ça ? C'est une sorte de punition permanente des mecs comme ça, un fardeau que je dois me trimbaler. Ma mission sur terre doit être celle-là : me trimbaler des mecs comme ça et m'occuper d'eux. Mère Térésa au pays des Bisounours. C'est parce que j'y crois pas au bon Dieu qu'il m'a donné cette punition, c'est une sorte de vengeance, pour lui - c'est dégueulasse, t'avoueras quand même, être Dieu et se venger sur des mecs comme moi."
Ainsi par le narrateur, cerveau d'un braquage de banque qui doit lui assurer ainsi qu'à ses fidèles acolytes Kris, Manu et Aziz, une belle retraite au soleil. La bande n'en est pas à son coup d'essai, mais cette fois-ci, tout ayant été préparé, pensé et répété, c'est certain, l'opération se déroulera comme prévu. Et pourtant... Décalé, embrumé et déjanté, ce Monde par les couilles nous place au centre de cette organisation bancale de malfaiteurs attachants, au cœur des réflexions acides et intimes du "cerveau".
Mon avis
Le monde par les couilles, c’est l’histoire d’un braquage en préparation. Notre narrateur, chef de la bande, cerveau suprême par rapport aux autres, nous embarque avec lui, non pas pour suivre une belle épopée mais pour comprendre comment un plan peut vriller à cause d’un petit quelque chose de rien du tout.
Ce personnage, d’ailleurs, est le seul de la bande dont on ne connait le nom. On en apprend un peu plus sur son passé de « truand », on pénètre dans les mécanismes de sa cervelle sans cesse en ébullition mais, son nom, reste un mystère. Kris, Manu et Aziz ne le prononcent à aucun moment. Ce mystère nous plonge plus encore dans les pensées du narrateur, nous permet de nous identifier à ses monologues intérieurs, à ses doutes, ses peurs. Si le plan est réglé au millimètre près, il sait que tout peut basculer en un rien de temps. Surtout avec la bande de branquignoles qu’il se coltine.
Ce flou artistique sur le personnage n’est pas le seul mécanisme du roman qui nous perd dans cette débâcle : le texte est fait de pensées du narrateur, de dialogues sans mises en forme, de paroles rapportées, de souvenirs… Le tout mélangé sans qu’on l’on ne réussisse toujours à savoir qui parle à qui à quel moment. Dérangeant au début, ce choix de l’auteur permet finalement de mieux comprendre à quel point le plan de nos protagonistes est rempli de failles : ces failles ne sont pas techniques, elles sont humaines !
Si les personnages secondaires sont effleurés, c’est pour mieux mettre en valeur le narrateur qui est le cerveau de la bande : il prépare, minute, organise… Et les autres suivent. Chacun son rôle. Mais le doute qui s’empare du narrateur finit par prendre le dessus sur l’ensemble du groupe, sans que chacun ne s’en rende compte. Ce doute qui mûrit tout au long du livre, ce vilain pressentiment qui fait qu’il veut faire marche arrière… Après tout, comment ne pas douter quand, lors des braquages précédents, on a fait les plus grosses boulettes imaginables ? Juste deux boulettes, deux boulettes suffisantes pour faire douter n’importe qui.
Le vocabulaire est fleuri, le texte est écrit en langage oral mais, là où l’auteur est doué, c’est que cela reste tout de même agréable à l’œil et à l’esprit. On s’y fait rapidement et on trouve tout de même, entre les lignes, la réelle beauté du texte.
Drôle et complètement what the fuck, Le monde par les couilles est le genre de livre qu’il faut lire pour se détendre tout en appréciant une histoire qui se joue jusque dans la forme du texte. On trouve trop peu de romans de nos jours où les auteurs maîtrisent aussi bien fond et forme comparé aux nombreuses daubes que l’on nous sert chaque jour, faites sur le même schéma, pauvres en vocabulaires, peu originales et ennuyeuses à mourir.
Si la forme peut en rebuter certains, je le conseille tout de même à tous. Je ne peux aussi que le conseiller à ceux qui, comme moi, trouve ce titre tellement taré qu'il donne envie de sauter à pieds joints dans l'aventure !