Des enfants soldats Soudanais du Sud remettent leurs armes dans le cadre d’une cérémonie de démobilisation organisée par l’Unicef, le 10 février 2015, dans l’état de Jonglei I ©AFP / ARCHIVES - Charles Lomondong
L’Unicef redoute que des "centaines" d’enfants aient été enlevés mi-février dans le nord-est du Soudan du Sud, mettant pour la première fois en cause une milice pro-gouvernementale.La semaine dernière, l’Unicef avait affirmé que 89 adolescents avaient été enlevés dans la ville de Wau Shilluk, dans l’Etat pétrolier du Haut-Nil (nord-est). Le Fonds de l’ONU pour l’enfance avait toutefois averti que ce chiffre était sans doute sous-estimé. L’Unicef "pense maintenant que les enfants étaient peut-être des centaines", a-t’il affirmé dans un communiqué. Le Soudan du Sud est plongé dans une guerre civile opposant des forces pro-gouvernementales regroupées derrière le président Salva Kiir, à des forces rebelles menées par l’ancien vice-président Riek Machar depuis décembre 2013. Depuis le début, les deux camps sont accusés d’enrôler de force des enfants. Cette attaque est survenue les 15 et 16 février dernier. Le porte-parole de la présidence sud-soudanaise, Ateny Wek Ateny, l’avait fermement condamnée, qualifiant les auteurs d’enlèvements d’enfants de "Boko Haram du Soudan du Sud", en référence aux islamistes nigérians qui multiplient les kidnappings d’enfants.
Après deux semaines d’enquête, l’Unicef pense désormais que la milice du chef de guerre Johnson Olony, déjà accusée par Human Rights Watch d’enrôlement d’enfants-soldats, est responsable de ces enlèvements. "Cette milice est derrière les forces SPLA (l’armée) du gouvernement", a poursuivi l’organisation onusienne, précisant que l’armée sud-soudanaise dit cependant ne pas contrôler le groupe armé. Selon l’Unicef, de nombreux enfants ont été repérés dans un camp d’entraînement près de Wau Shilluk et d’autres, âgés d’à peine 12 ans, sont équipés d’armes dans la localité de Melut (Etat du Haut-Nil également). L’organisation craint qu’ils ne soient envoyés pour se battre un peu plus au nord, à Kaka. Depuis le début de la guerre civile, l’organisation de protection de l’enfance estime qu’environ 12 000 enfants, essentiellement des garçons, ont été enrôlés comme soldats, aussi bien par l’armée sud-soudanaise que par les forces rebelles.
Le conflit sud-soudanais a débuté le 15 décembre 2013, lorsque des combats ont éclaté au sein de l’armée, minée par des divisions politico-ethniques, aiguisées par la rivalité qui oppose Salva Kiir et Riek Machar. De nombreux cessez-le-feu ont été signés depuis, mais ils n’ont tenu que quelques heures, voire quelques jours. Les deux camps sont de nouveau réunis dans la capitale éthiopienne Addis Abeba pour tenter de trouver un accord de paix. Les médiateurs du conflit -les pays d’Afrique de l’Est- leur ont donné jusqu’au 5 mars prochain pour régler leurs différends. La menace de sanctions internationales plane de plus en plus sur les belligérants. Les Etats-Unis, grand soutien du Soudan dans son chemin vers l’indépendance, acquise en 2011, tentent de faire adopter une résolution au Conseil de sécurité en ce sens. La Chine, très présente dans le secteur pétrolier sud-soudanais, estime la menace contre-productive à ce stade. Wau Shilluk a cru drastiquement avec l’arrivée de dizaines de milliers de déplacés en 14 mois de guerre civile. Beaucoup ont fui la capitale de l’État, Malakal, où les combats ont été particulièrement violents.FG