Dans le domaine de l'information, tout d'abord, l'institution reconnaît les opportunités extraordinaires que représentent les innombrables sources de données disponibles aujourd'hui – en son sein comme à l'extérieur, entre autres sur les réseaux sociaux – et les outils permettant d'exploiter cette richesse colossale. Dans son domaine, elle estime en particulier que l'échelle de granularité accessible (parfois jusqu'au niveau élémentaire, tels que les dossiers de prêt individuels) ouvre la perspective d'application de techniques micro-économiques à l'analyse de grandes tendances.
Les possibilités pourraient être immenses, dans les études de consommation (par exemple en vue de mieux comprendre l'impact d'un changement de taux d'intérêt sur le comportement des ménages) ou de l'activité des entreprises, mais également sur les marchés financiers, eux-mêmes générateurs d'immenses volumes de données. L'idée de mieux évaluer les risques et de pouvoir conduire des « stress tests » plus représentatifs des conditions réelles (et de l'environnement international) sont certainement attractifs pour la banque centrale.
En abordant cette nouvelle discipline, qu'elle expérimente depuis quelques temps, la Banque d'Angleterre sait reconnaître ses limites et adopte donc une position d'ouverture, digne d'éloges. Dans cette logique, elle publie quelques-uns de ses jeux de données et invite toutes les personnes intéressées à les exploiter pour l'aider dans ses recherches. Un défi – doté d'un prix de 5 000 £ – est même lancé afin de concevoir de nouvelles formes de représentation capables de stimuler les découvertes.
Dans un registre différent, quoique intimement lié à l'analyse de données, la banque centrale veut également mesurer les impacts sur son activité des profondes transformations qui affectent le monde. Elle s'intéresse à l'évolution démographique ainsi que, de manière appuyée, au changement climatique, notant leurs implications importantes pour le secteur de l'assurance ou, plus globalement, pour l'économie. Et, naturellement, les innovations technologiques font aussi partie du lot.
Deux domaines attirent ici l'attention de l'institution : le crédit et les paiements. Le premier fait écho à l'extraordinaire développement de la finance participative dans le pays, tandis que le second est tiré par la popularité croissante des crypto-devises, Bitcoin en tête. Bien entendu (l'ouverture d'esprit à des limites !), cette dernière est immédiatement écartée (arguant de vices économiques fondamentaux) mais la réflexion sur la technologie sous-jacente (le « blockchain ») est poussée relativement loin.
La banque centrale s'interroge ainsi sur l'opportunité d'adopter ces mécanismes pour l'émission de sa propre monnaie numérique. Elle imagine différents scénarios, depuis un usage confiné aux échanges interbancaires jusqu'à une diffusion dans le grand public, tout en essayant d'envisager tous les défis auxquels une telle hypothèse devrait répondre, en termes de réglementation et de lutte contre la fraude, d'impact sur le système bancaire (qui serait plus ou moins désintermédié), de mise en œuvre technique…
Pour la Banque d'Angleterre, il est évidemment crucial d'appréhender les évolutions du monde et de préparer son avenir en conséquence, qu'il s'agissent de moyens capables de l'aider à remplir sa mission ou de concepts susceptibles de remettre en question son rôle. Toutes les institutions financières pourraient s'inspirer de cette attitude et commencer à réfléchir à ce que deviendront leurs différents métiers dans quelques années…