Il suffisait de regarder les visages des principaux dirigeants de l'Union Européenne et de la troïka vendredi soir lors de la signature de l'accord entre la Grèce et l'Eurogroupe pour y lire comme un parfum de défaite pour Tsipras et son gouvernement. Ainsi, après un mois de coups de menton et de négociations acharnées, Siryza aurait donc déjà rendu les armes et capitulé devant les tenants de l'orthodoxie libérale.
A priori, tout le laisse penser, tant les concessions faites par le gouvernement grec sont importantes. Athènes voulait en finir avec la troïka qui supervise son budget et ses finances, celle-ci continuera de sévir pendant encore au moins 4 mois. Tsipras a également renoncé au moins temporairement à plusieurs éléments clés de son programme : la réembauche de fonctionnaires illégalement licenciés, la remise en cause des multiples privatisations du précédent gouvernement, la hausse du salaire minimum. Bref, cela à l'apparence de promesses non tenues et d'une reddition en pleine campagne.
Cependant, il faut faire attention, car la Grèce n'a peut-être pas tout perdu, et surtout, elle n'a peut-être pas dit son dernier mot. Rappelons quand même que sous l'effet d'une panique bien orchestrée par les banques et les milieux européens, les Grecs se sont rués par milliers à leurs guichets, retirant leur argent et menaçant leur pays de faillite. C'est donc sous la menace que Tsipras a négocié.
Ce faisant, il a obtenu plusieurs choses qui lui seront précieuses à l'avenir. D'abord il a gagné du temps. 4 mois, c'est peu, mais c'est suffisant pour commencer à mettre en oeuvre les premières mesures de son programme. Ensuite, et c'est à la fois symbolique et essentiel, ce n'est plus Bruxelles ou la troïka qui fixent la liste des réformes à faire, mais le gouvernement d'Athénes, même s'il doit encore se soumettre à l'approbation des membres de l'Eurogroupe. Tsipras récupère donc de la dignité pour son pays et surtout de la marge de manoeuvre politique. Enfin, l'aide humanitaire aux plus pauvres a été acceptée. Désormais 300 000 auront accès au chauffage, à l'aide alimentaire ou à des aides pour se loger. C'était une promesse, c'était une urgence, celle-ci sera tenue.
Pour résumé, Athénes a signé un compromis, et comme pour tout compromis, il y a forcément des concessions et des choses gagnées. Athènes continue donc d'être sous la coupe de la troïka, mais est désormais en partie maître de son destin. L'avenir dira si les concessions ont été trop importantes, et l'avenir pour les Grecs, c'est dans 4 mois.