Dans une réécriture de l’histoire, tout ceci est effacé et la Libye de 1969-2011 se trouve représentée comme un non-Etat, une « multitude de tribus » (définition d’estampille coloniale) maintenues ensemble par le pouvoir de Kadhafi. Pouvoir qui existait indubitablement, fruit des phases historiques traversées par la Libye, mais qui s’était relâché et décentré en ouvrant la perspective d’une évolution ultérieure de la société libyenne. La Libye, après que les USA et l’Ue avaient révoqué l’embargo en 2004, s’était reconstruit une place au niveau international.
En avril 2009, à Washington, la secrétaire d’état Hillary Clinton serrait chaleureusement la main à un des fils de Kadhafi, en déclarant vouloir « approfondir et élargir notre coopération ». Moins de deux ans après, cette même Clinton lançait la campagne internationale contre Kadhafi, en préparant la guerre.
Maintenant par contre, dans le cadre de la compétition pour les prochaines présidentielles, les squelettes sortent du placard : des preuves documentées (publiées par le Washington Times et examinées par la commission d’enquête du Congrès sur l’assassinat de l’ambassadeur des USA à Benghazi en 2012) démontrent que c’est Hillary Clinton qui a poussé l’administration Obama à la guerre contre la Libye « avec de faux prétextes et en ignorant les conseils des commandants militaires ». Pendant que Clinton accusait Kadhafi de génocide, les services de renseignements étasuniens indiquaient à travers leurs rapports internes que « Kadhafi avait donné l’ordre de ne pas attaquer les civils mais de se concentrer sur les rebelles armés ». On découvre aussi un rapport, envoyé en 2011 par les autorités libyennes à des membres du Congrès des USA, documentant les fournitures d’armes aux djihadistes libyens de la part du Qatar avec l’ « autorisation de l’Otan ».
A cette époque le président Napolitano déclarait que, « ne pouvant pas rester indifférents à la réaction sanguinaire de Kadhafi », l’Italie adhérait au « plan d’interventions de la coalition sous conduite Otan ».
Manlio Dinucci
Source : ilmanifesto