Le concept d’ethnocentrisme vient de l’anthropologie. Il désigne l’incapacité de voir dans le monde et sa diversité autre chose que des archétypes conformes à nos coutumes, nos habitudes et nos intérêts. C’est une pensée racialiste qui privilégie le rejet a priori de tout ce qui ne relève pas de sa propre culture. Depuis toujours, la moindre tribu s’est toujours désignée elle-même comme « l’Assemblée des Vrais Hommes », déniant à tout autre son caractère d’êtres humains ; c’est donc là une tentation naturelle contre laquelle il faut lutter. Depuis que sont apparues les certitudes confortables du consumérisme occidental, depuis surtout les thèses de « fin de l’Histoire » (Fukuyama, 1989) et du « choc de civilisation » (Huntington, 2001), l’ethnocentrisme est de retour. Il marque l’inaptitude à comprendre l’autre depuis les logiques qui sont les siennes, en ne considérant les cultures étrangères que comme des stades plus ou moins avancés de la nôtre. L’autre n’existe pas en tant qu’autre mais en tant qu’adversaire dénué de raison, ou en suiveur plus ou moins efficace. « En refusant l'humanité à ceux qui apparaissent comme les plus “sauvages” ou “barbares” de ses représentants, on ne fait que leur emprunter une de leurs attitudes typiques » (Claude Lévi-Strauss).
L’anomie (terme introduit en 1893 par le sociologue Emile Dukheim) caractérise un état de perte des valeurs, d’effacement des repères et d’irrésolution. Généralement les époques de forts bouleversements, de changements continus, prédisposent à l’anomie. C’est ce qu’il nous arrive en ce moment, d’où le déploiement actuel de nombreuses thèses déclinistes (Le succès du livre « Le suicide Français », d’Eric Zemmour, en est un bon exemple). Cependant un tel effondrement des normes peut aussi s’avérer propice à l’invention et la créativité, en l’absence des barrières traditionnelles. L’anomie serait alors l’état naturel d’une société confronté à des changements majeurs.