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Transition énergétique : le Sénat complique la convocation des conseils municipaux des petites communes par un amendement anti-éolien

Publié le 19 février 2015 par Arnaudgossement

sénat.jpgDans le cadre de l'examen en séance publique du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte, les sénateurs ont adopté un amendement du sénateur Germain, qui modifie les conditions de convocation des conseils municipaux des petites communes lorsqu'est en cause un projet d'installations classées en général pour, en particulier, tenter de contraindre le développement des projets éoliens.


En apparence, cet amendement n'a vocation que d'améliorer l'information des conseils municipaux des petites communes de moins de 3500 habitants sur les projets de création d'une installation classée. 

Si cet amendement devait être définitivement adopté, l'article 2121-12 du code général des collectivités territoriales devrait être ainsi rédigé : 

"Dans les communes de 3 500 habitants et plus, une note explicative de synthèse sur les affaires soumises à délibération doit être adressée avec la convocation aux membres du conseil municipal.

Si la délibération concerne un contrat de service public, le projet de contrat ou de marché accompagné de l'ensemble des pièces peut, à sa demande, être consulté à la mairie par tout conseiller municipal dans les conditions fixées par le règlement intérieur.

Le délai de convocation est fixé à cinq jours francs. En cas d'urgence, le délai peut être abrégé par le maire sans pouvoir être toutefois inférieur à un jour franc.

Le maire en rend compte dès l'ouverture de la séance au conseil municipal qui se prononce sur l'urgence et peut décider le renvoi de la discussion, pour tout ou partie, à l'ordre du jour d'une séance ultérieure.

Les dispositions du présent article sont également applicables aux communes de moins de 3 500 habitants lorsqu'une délibération porte sur une installation visée à l'article L. 511-1 du code de l'environnement."

En conséquence, si cet amendement devait rester inscrit dans la loi à venir, la procédure de convocation des élus des petites communes serait modifiée et équivalente à celle en vigueur pour les communes de plus de 3500 habitants, dés qu'un projet d'installation classée est en cause. 

Toutefois, l'exposé des motifs de cet amendement éclaire son objet clairement anti-éolien : 

"Cet article vise à ce que dans les communes de moins de 3500 habitants les conseillers municipaux disposent à l’avance, sous forme écrite, de tout projet de délibération portant sur une installation classée pour la protection de l’environnement (ICPE).

Le faible formalisme appliqué aux convocations des conseils municipaux des communes de moins de 3500 habitants est adapté à des affaires dont l’importance est en général proportionné à la taille de la commune et que les membres du conseil municipal maitrisent pour des raisons de proximité.

Les installations classées pour la protection de l’environnement sont de nature à présenter une technicité nécessitant une sensibilisation particulière et à susciter des mécontentements qui doivent être mesurés.

Cet amendement vise à sensibiliser les élus locaux aux tentatives de verrouillage du débat citoyen par des promoteurs et donc à les protéger, notamment dans les petites communes.

Ainsi, l’avis sollicité par le préfet du département pour instruire une demande de permis de construire d’une ou plusieurs éoliennes géantes touche à un domaine qui dépasse l’ampleur des affaires généralement délibérées dans une commune de moins de 3500 habitants et dont les conséquences peuvent être lourdes et avoir des conséquences sur des communes de plus de 3500 habitants.

Concernant les éoliennes, le service central de prévention de la corruption a appelé l’attention des pouvoirs publics sur les « chartes d’étroite collaboration » que les promoteurs éoliens demandent à des élus de faire voter en amont des projets d’installation d’éoliennes, en dehors de toute procédure envisagée par des textes. Souvent présentées oralement comme des démarches n’engageant à rien et permettant d’obtenir une étude de faisabilité ou d’évaluation des retombées fiscales à escompter, ces délibérations se révèlent être des textes-type rédigés par les services juridiques des promoteurs éoliens et comportant des dispositions destinées à lier définitivement les conseils municipaux et à leur faire prendre des engagements dont la portée juridiques les dépassent : accord de principe, engagement à soutenir le promoteur dans ses démarches auprès des particuliers et des administrations – donc a fortiori à s’engager à donner un avis favorable à la demande de permis de construire déposée auprès du préfet avant même d’en avoir vu les éléments essentiels -, à accorder l’exclusivité au bénéficiaire de l’engagement, à modifier les plans d’urbanismes pour favoriser les projets de l’entrepreneur – a fortiori sans connaître parfaitement ceux-ci."

Cet exposé cible précisément une pratique de certains développeurs qui consiste à proposer une charte. Cette charte qui témoigne pourtant d'un engagement du développeur est ici retournée contre lui. 

Nonobstant cet exposé des motifs, a priori, cet amendement concerne toutes les installations classées et non les éoliennes uniquement.

Toutefois, il faut espérer que cet amendement ne soit pas conservé et ce pour plusieurs raisons. 

En premier lieu, il introduit une complexification inutile du code général des collectivités territoriales en introduisant une procédure spécifique aux installations classées pour la consultation des élus locaux

Rappelons que les élus locaux doivent être rendus destinataires de l'entier dossier de demande d'autorisation qui sera déposé en préfecture. Le fait d'être convoqué plus tôt et de disposer d'une note de synthèse n'améliore en rien leur information. 

En deuxième lieu, il complexifie la vie des toutes petites communes qui sont peu dotées en personnel et qui vont devoir pourtant procéder à des procédures de convocation des élus plus contraignantes.

Complexité accrue dés lors que les auteurs de l'amendement espèrent que la "note de synthèse" distribuée aux élus locaux comporte à terme une analyse juridique du projet et des engagements éventuels de la Commune. Une analyse juridique souvent hors de portée des très petites communes.

Et par voie de conséquence un risque de vice de procédure et d'annulation de l'autorisation délivrée, ce qui est bien le but recherché. 

Arnaud Gossement

Selarl Gossement Avocats


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