Les autorités de l’eau en Poitou Charente ont décidé de lancer un programme de construction de réservoirs d’eau équivalents à quatre fois le volume du barrage de Sivens. Le but : soutenir l’irrigation. Une décision prise deux jours après que la Cour des comptes a vertement critiqué la politique de l’eau en France.
Les irrigants de Poitou Charente viennent de faire adopter un projet massif de construction de nouvelles retenues d’eau pour l’irrigation, essentiellement financé sur fonds publics, par le biais de subventions de l’Agence de l’eau Adour Garonne, au lendemain même de la publication du rapport de la Cour des comptes qui dénonçait les errements de la politique de l’eau en France. Télécharger le rapport de la Cour des comptes sur la politique de l’eau :
les remplir car les niveaux en hiver sont insuffisants dans ces nappes", dénonce dans un communiqué du 16 février EELV-Poitou Charente.Construites bien qu’illégalesL’annonce est d’autant plus choquante qu’elle touche le bassin de la Boutonne, rivière la plus sensible du département en cas de sécheresse, et alors que cinq autres « bassines » du même type ont été retoquées par la justice dans le nord de l’Aunis depuis 2009 pour la faiblesse de l’étude d’impact, mais n’en ont pas moins été construites, même si elles sont illégales !Ce nouveau projet date de… 1978 et a été réactivé par un collectif d’irrigants après l’abandon du barrage de la Trézence. Il représente le tiers du programme départemental établi en 2010 après cet abandon.Les études de faisabilité ont été conduites par… la fameuse Compagnie d’aménagement des coteaux de Gascogne (CACG), cette même compagnie qui avait déjà réalisée les études du barrage de Sivens !A côté du Conseil général (18%), des irrigants (29,6%, de l’Etat (4,4%), l’Agence de l’eau Adour Garonne devrait financer 48 % du coût de l’opération, soit 19,2 millions d’euros prélevés sur les redevances perçues sur les facture d’eau potable des usagers domestiques, qui ont augmenté de 14,36 % en un an, passant de 0,0564 euros en 2013 à 0,0645 euros par m3...« C’est le plus gros dossier de Charente, et sans doute même de l’Agence Adour Garonne », souligne Jean-Louis Demarcq, président de l’associationSOS Rivière et membre de la CLE qui a voté contre le projet. Celui-ci a été adopté avec 18 voix pour, deux contre et deux votes blanc.19 millions d’euros pour 67 agriculteursPour 67 agriculteurs concernés, les usagers domestiques du bassin Adour Garonne (qui supportent 87 % des redevances perçues par l’Agence, contre 7 % pour les industriels, et moins de 6 % pour les agriculteurs, comme vient de le dénoncer la Cour des comptes), devraient donc payer 70 % de l’investissement, soit 28 millions d’euros, où 420 000 EURO par agriculteur !"Cette poignée d’irrigants poursuit un projet d’après-guerre largement dépassé. Ce modèle a généré une artificialisation des milieux (produits chimiques de synthèse, semences standards, races animales productives et standardisées élevées hors sol), la dégradation des ressources en eau au niveau qualitatif et quantitatif, une consommation croissante d’énergie, la concentration des moyens de production (mécanisation exacerbée, agrandissement, endettement, diminution du nombre d’emplois agricoles...)", souligne EELVPoitou Charente, annonçant qu’il soutiendra les associations qui déposeront des recours suspensifs pour empêcher ces travaux destructeurs de commencer.
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Source : Marc Laimé pour Reporterre 18/02/2015
http://www.reporterre.net/Les-agriculteurs-productivistes