Les autorités ukrainiennes ont accusé mardi la Russie et les rebelles
prorusses de torpiller le fragile processus de paix dans l’est de
l’Ukraine après l’offensive lancée par les séparatistes dans la ville
stratégique de Debaltseve, théâtre de combats violents.
Dans le fracas des bombes et des tirs d’armes automatiques, les
appels des Occidentaux, notamment de l’Union européenne, au retrait des
armes lourdes de la ligne du front restaient pour l’heure inaudibles.
Moscou et les rebelles ne respectent pas les accords de Minsk 2 conclus la semaine passée et « sont en train de détruire l’espoir de paix », a fustigé le chef adjoint de la présidence ukrainienne, Valeri Tchaly, appelant l’Occident à intervenir.
L’armée ukrainienne a reconnu que les séparatistes étaient entrés
dans Debaltseve, une ville stratégique pour le contrôle de l’est de
l’Ukraine, qui était ces dernières semaines le point plus chaud de la
ligne du front. Des combats acharnés opposant les rebelles aux soldats
ukrainiens se poursuivaient dans la soirée et l’armée a reconnu que
certaines de ses unités étaient encerclées. Les séparatistes
revendiquent le contrôle de 80 % de la ville. Kiev pour sa part assure
qu’une partie seulement de Debaltseve échappe désormais à son autorité.
Pressions psychologiques
De violents combats se déroulaient aussi à Tchornoukhine, un village à
quatre kilomètres de Debaltseve, qui a été quasiment détruit par les
combats. « Les combats des derniers jours pour prendre Tchornoukhine et avancer sur Debaltseve ont été très meurtriers, y compris pour nous »,
a dit un commandant séparatiste à Tchornoukhine, alors que Kiev a fait
état d’au moins dix de ses soldats tués depuis le début de la trêve.
Les séparatistes exerçaient également une pression psychologique sur
les soldats ukrainiens en leur envoyant une avalanche de textos les
appelant à se rendre. « Les généraux vous ont trahis », indiquait par exemple un de ces messages.
Des milliers de civils avaient fui ces dernières semaines Debaltseve
mais jusqu’à 5000 sont toujours bloqués sans eau ni nourriture, selon la
mairie. Tetiana Ogdanska, adjointe au maire de cette ville, pour sa
part évacuée, a déclaré recevoir des appels de détresse des habitants
restés sur place.
Les armes lourdes
L’offensive rebelle sur cette ville intervient trois jours après
l’instauration d’un cessez-le-feu dans l’est. Cette trêve a été violée
dès lundi, repoussant tout espoir d’un retrait des armes lourdes de la
ligne de front après dix mois d’un conflit qui a fait au moins 5500
morts.
L’Union européenne a appelé au retrait immédiat des pièces
d’artillerie, comme prévu dans l’accord de cessez-le-feu. Bruxelles a
également demandé aux belligérants de cesser toute opération militaire.
« Les développement ne sont pas encourageants », a reconnu
la chef de la diplomatie européenne, Federica Mogherini, en visite à
Lisbonne, refusant toutefois de parler d’un échec total des accords de
paix. « Les Russes savent très bien et les
séparatistes savent très bien que non seulement l’Europe mais toute la
communauté internationale s’attend à l’application des accords » de Minsk, a-t-elle ajouté.
La veille déjà, les États-Unis avaient directement mis en cause le
Kremlin, accusé depuis des mois par Kiev et par les Occidentaux d’armer
les rebelles et d’avoir déployé ses troupes en Ukraine, ce que Moscou
dément catégoriquement.
Entretiens
La situation à Debaltseve a été au centre de plusieurs entretiens
téléphoniques du président ukrainien, Petro Porochenko, qui en a discuté
lundi soir avec le président français, François Hollande, et la
chancelière allemande, Angela Merkel, mais aussi avec celle-ci et le
président russe, Vladimir Poutine, avant de s’entretenir avec le
secrétaire d’État américain John Kerry.
Au cours de leur conversation, Mme Merkel, M. Poutine et Petro
Porochenko ont décidé de mesures concrètes pour permettre aux
observateurs de l’OSCE d’accéder à Debaltseve, selon Berlin. La mission
de l’OSCE qui s’était vu refuser dimanche l’entrée de Debaltseve par les
rebelles, se préparait à s’y rendre mardi mais n’a selon toute
vraisemblance pas réussi à le faire en raison des hostilités.
Source : LeDevoir