C'était au départ une petite ville tout ce qu'il y a de plus normal, à quelque 80 km au sud-ouest de la capitale, Bucarest.
Mais à Buzescu, les marchands nomades devenus riches ont troqué leurs roulottes pour d’imposantes demeures, assez kitsch, aux façades ornées de balcons, de piliers, de tourelles, tours et dômes, et de toits rutilants.
Les « Roms », le nom correct et respectueux désignant ce groupe ethnique, qui signifie « hommes » en romani, n'est pas forcément le plus utilisé là-bas. On dit sans la moindre gêne romanichel ou gitan, des mots qui ailleurs sont devenus synonyme de mendiants, voleurs, ou parasite.
Une centaine de villas roms ont jailli dans cette commune agricole de 5000 habitants. Environ un tiers des habitants sont des Roms enrichis qui ont fait de la ville une source étrange de fierté ethnique. Etrange car incongrue. La population rom de Roumanie est estimée à 2 millions de personnes (environ 10 % de celle du pays) et vit le plus souvent en communautés, dans les bas-quartiers urbains ou des bidonvilles à la périphérie des villes. Ce peuple autrefois semi-nomade est un sous-prolétariat méprisé, réputé pour sa pauvreté, son manque d’instruction et un esprit de groupe tenace.
Pour beaucoup, les palaces des Roms de Buzescu sont une provocation. D’où provient cette richesse ? Du commerce du métal, répond-on. Les Roms de Buzescu sont souvent des chaudronniers», qui il n'y a pas si longtemps, parcouraient encore la campagne dans des roulottes tirées par des chevaux, s’arrêtant dans les villes pour vendre des produits en métal. Un commerce lucratif. Mais, les autorités communistes surveillant de près les activités des Roms, les familles les plus fortunées restaient discrètes.
À la chute du régime, en 1989, les chaudronniers ont développé leurs affaires, récupérant – parfois illégalement – dans des usines abandonnées de l’argent, du cuivre, de l’aluminium, de l’acier et d’autres métaux de valeur. En vendant ces matières premières, certains Roms de Buzescu ont gagné beaucoup d’argent.
Ces immenses maisons sont souvent vides, ou simplement occupées par les grands-parents et les plus petits. Les parents et les fils aînés sont en voyage d’affaires, et ne rentrent que pour les vacances, les baptêmes et les enterrements. Les villas sont en grande partie construites pour épater la galerie.
Le passé nomade de la communauté reste donc très présent. C’est une ville en mouvement, les familles sont toujours en partance, et les plus âgés évoquent la nostalgie de leur jeunesse voyageuse.
A voir un jour ?