Magazine Culture
Le 9 novembre 1989, chute du mur de Berlin Dans « protection », il y a « tectum » : le toit, en latin. Se protéger, c’est se construire un toit pour s’éviter des tuiles (« tegula », de la même racine). Mais si les anciens craignaient que le ciel ne leur tombe sur la tête, nos contemporains redoutent plutôt les dangers horizontaux qui leur viennent de leurs semblables. Alors ce n’est plus tant des toits qu’ils érigent, que des murs. Celui de Berlin est tombé il y a vingt ans, celui du ghetto de Varsovie il y a plus d’un demi siècle, la grande muraille de Chine fait figure d’antiquité, mais la construction murale reste encore très à la mode : entre les Etats-Unis et le Mexique, entre Israël et la Palestine,… Mais la hantise protectrice ne s’arrête pas à ces gros œuvres d’architecture raffinée : on aime aussi la protection rapprochée des masques chirurgicaux en cas d’épidémie, celle juridique des assurances et des parapluies législatifs en tous genres. On n’arrête pas le progrès. On arrive même à construire des barrières à l’intérieur de nos corps : des barrières immunitaires, grâce aux vaccins, merveilleuse et salutaire invention de salubrité publique. Le léger problème, avec certains d’entre eux, comme celui contre la grippe A, c’est que le ciment avec lequel on les construit (en langage médical, cela s’appelle un adjuvant) ne se contente pas de protéger contre un virus, mais peut aussi entraver à vie la libre circulation des millions de messagers cellulaires de notre organisme, et engendrer de graves problèmes de santé. Alors mieux vaut attraper une brave grippe, moins virulente que la grippe saisonnière, et rester patraque quelques jours, que de se laisser inoculer un produit incertain dont le seul effet jusque là avéré consiste à enrichir des industries pharmaceutiques fort empressées. Publié dans l'Hebdo du Vendredi le 13 novembre 2009