Autochtones: discrimination imposée par la Cour suprême

Publié le 14 février 2015 par Raymond Viger

Le principe Gladue fait référence à l’alinéa 718.2e) du Code criminel. Selon la loi, les autochtones doivent être confrontés à une discrimination systémique de la part du système judiciaire. Il s’agit d’une disposition réparatrice vis-à-vis des préjudices qu’ont connus les Premières nations par le passé.

Principe Gladue

Concrètement, cela signifie que pour diminuer la surreprésentation des autochtones en prison, les juges sont invités à modifier leur mode de détermination de sentences.

D’après le jugement Ipeelee de la Cour suprême du Canada, «la détermination de la peine est un processus individualisé», et le principe Gladue doit «encourager le juge à aborder la détermination de la peine dans une perceptive corrective.» L’objectif est de protéger la société, tout en réadaptant le contrevenant et en l’aidant à se réinsérer dans la collectivité.

Les juges doivent changer leur pratique de détermination de la peine pour répondre aux besoins des délinquants autochtones et de leur collectivité. Ils doivent porter une attention particulière aux circonstances dans lesquelles se trouve le contrevenant.

Les tribunaux doivent également prendre connaissance des valeurs du délinquant, de sa communauté, de l’Histoire de cette dernière et des traumatismes qu’elle a connus. Car si ces évènements sont anciens, les conséquences sont actuelles avec un faible de taux de scolarisation, de graves problèmes d’alcool, de chômage et de violence.

Dans l’arrêt Ipeelee, les juges de la Cour suprême précisent que «ne pas tenir compte de ces circonstances contreviendrait au principe fondamental de la détermination de la peine.» À noter que d’après ce jugement, rien n’empêche de tenir compte de ces mêmes facteurs historiques et systémiques pour les délinquants non autochtones.

Rapport Gladue

Toutes ces informations concernant le contrevenant sont la responsabilité de son avocat. Elles doivent être dans un rapport, appelé rapport Gladue. Ce document est préparé par l’agent de probation, le conseiller parajudiciaire ou l’avocat de service. Les informations nécessaires au processus de détermination de la peine sont: l’histoire et les circonstances du prévenu, et des mesures pénales de rechange à l’incarcération.

Toutes ces recherches et alternatives autour de la spécificité des autochtones ne réduisent pas nécessairement leur peine.

Lors du jugement de la Cour suprême dans l’affaire Gladue, les juges précisent que «l’alinéa 718.2e) ne doit pas être considéré comme un moyen de réduire automatiquement la peine d’emprisonnement des délinquants autochtones. Il ne faut pas présumer non plus que le délinquant reçoit une peine plus légère pour la simple raison que l’incarcération n’est pas imposée.» Les juges de la Cour suprême stipulent également dans l’arrêt Ipeelee que la «sanction pénale est le dernier recours.»

Malgré cette théorie, sur le terrain, seul le juge est à même d’utiliser adéquatement le rapport Gladue. D’après Lyne St-Louis, directrice de Taïga Vision (organisme de soutien aux communautés autochtones), «il est parfois frustrant de constater l’utilisation du rapport par les juges.»

Ces derniers, de même que les avocats, peuvent être mal informés sur la réalité autochtone et mal comprendre les problématiques. Les sanctions peuvent en conséquence être mal adaptées au contrevenant.

Contexte global

Malgré que la Cour suprême du Canada ait réitéré en 2012 sa volonté de diminuer la surreprésentation carcérale des autochtones, le contexte politique empêche de voir la réalisation de ses volontés.

Le magazine National constate que «le gouvernement fédéral a incorporé dans la loi des peines minimales obligatoires et limité le pouvoir discrétionnaire des juges à imposer des peines d’emprisonnement avec sursis qui permettent aux délinquants de purger leur peine dans la collectivité.»

Concrètement, même si le taux de criminalité est à son plus bas en 40 ans, la population carcérale, elle, augmente. Le jugement Gladue de la Cour suprême du Canada date de 1999, pourtant en 10 ans, le taux de femmes autochtones en prison a augmenté de 90%.

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