Chronique Jim Hawkins (T1) Le Testament de Flint
Scénario et dessin de Sébastien Vastra,
Style : Aventure / Pirates
Public conseillé : Tout public
Paru chez Ankama éditions, le 23 janvier 2015, 56 pages couleurs, 14.90 euros
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L’histoire
Jim Hawkins a quinze ans et un avenir qui se précise et le désole, il doit devenir commis de cuisine dans l’auberge familiale perchée en bord d’une falaise de Cornouailles. La mer qu’il observe chaque jour le fait rêver, ses embruns l’enivrent, ses navires lui font espérer un ailleurs aventureux, parmi pirates et flibustiers flamboyants. Il veut la liberté pour épée et l’amour pour vertu… Son père vogue lui vers la mort, une affaire d’heures ou de jours qui précipitera Jim vers un avenir tracé par le devoir envers sa mère et un héritage d’aubergiste. Mais un jour arrive un vieil écumeur des mers, un caractériel épris de rhum, un vieux morse à la défense cassée qui a bourlingué en de tempétueuses latitudes.
Ce que j’en pense
Pour sa première BD en tant qu’auteur seul à la barre, Sébastien Vastra choisit de réinterpréter ce grand classique de Stevenson qui a fait rêver tant de jeunes lecteurs, « L’Île au Trésor ». Choisissant, comme Guarnido pour « Blacksad », de donner figure animale à ses personnages, le dessinateur fait preuve d’une belle inventivité dans sa recherche d’anamorphismes.
Si Jim Hawkins est un lionceau encore bien tendre aux griffes à peine esquissées, les gibiers de potence, qui gravitent autour de la quête du fabuleux trésor de Flint, ont de vraies sales tronches de canailles avides au meurtre. Et que dire de celle de Flint, explosant de sauvagerie, gueule ouverte sur quatre énormes crocs sanguinaires quand vient l’heure de l’abordage ! Enorme…
Si ce choix de donner figures animales aux héros de ce roman culte en fera discuter plus d’un, je dirai que comme pour le premier « Blacksad », cet exercice pas si simple est ici totalement réussi. Passer après le « Long John Silver » de Xavier Dorison et Mathieu Lauffray n’est pas simple, ce parti pris animalier offre d’autres voies à explorer et des attributs esthétiques qui séduiront sans aucun doute le jeune public en n’étant en rien un frein à l’adoption par les plus grands.
Le dessin
Sébastien Vastra séduit par une mise en scène fluide qui joue de changements de rythmes et d’atmosphères nombreux. Son dessin fourmille de détails dans une réelle virtuosité. Seule la planche 21, l’enterrement du père, m’a semblé en dessous du niveau de l’album. Les scènes d’action sont splendides, avec un superbe sens du mouvement, une force agressive palpable ; les couleurs sont poisseuses, portant des ombres vénéneuses et des ambiances nocturnes ou brouillardeuses très réussies. Les pinceaux de l’artiste ne jouent pas de saturations superflues (soit disant plus commerciales) mais d’une palette plus éteinte et surtout subtile qui rend plus crédible une époque où le feu d’une cheminée ou la lumière d’un astre solaires troublée par un plafond nuageux bas et épais créaient un théâtre d’ombres et de lumières inquiétantes.
Et puis vient le départ sur l’Hispaniola, la rencontre avec Kong John Silver (vous devinez la bête qui sa cache derrière l’énigmatique pirate à la jambe de bois !), la quête qui s’ouvre vers « Le testament de Flint » et une nouvelle vie qui commence pour Jim Hawkins, entre mélancolie et euphorie. Avant que la soif de l’or ne rende fou…
Sébastien Vastra, qui a travaillé trois ans sur ce projet, a incontestablement réussi cette première bordée. il nous entraine dans son sillage à redécouvrir cette histoire magique, autour d’un personnage qui raconte son aventure en voix off et pour lequel on éprouve rapidement un réel sentiment d’empathie. Il faudra confirmer après ce premier album aux séduisants atours que je vous incite vraiment à découvrir.
On en redemande, tournée générale de rhum comprise !
llustrations © Sébastien Vastra et Editions Ankama (2015)