[Critique] DEUXIÈME CHANCE À BROOKLYN
Titre original : The Angriest Man in Brooklyn
Note:
Origine : États-Unis
Réalisateur : Phil Alden Robinson
Distribution : Robin Williams, Mila Kunis, Melissa Leo, Peter Dinklage, Hamish Linklater, Sutton Foster, James Earl Jones, Richard Kind, Louis C.K….
Genre : Drame/Comédie
Date de sortie : 11 février 2015
Le Pitch :
Henry passe sa vie à fulminer. Tout est prétexte à monter dans les tours et à s’énerver contre la Terre entière, quitte à se mettre à dos son fils et sa femme, lassés de devoir supporter son caractère volcanique. Seul son frère conserve encore de bonnes relations avec lui.
Un jour néanmoins, Henry doit violemment se remettre en question, lorsque un médecin lui annonce par erreur qu’il ne lui reste que 90 minutes à vivre, lors d’une visite de routine. Bouleversé, Henry décide d’essayer de se racheter. Le docteur de son côté, cherche à réparer sa bourde, conscient de la portée dramatique de celle-ci…
La Critique :
Deuxième Chance à Brooklyn est l’un des derniers longs-métrages que le regretté Robin Williams a tourné. Inexplicablement, ce n’est pas au cinéma qu’il nous est donné de voir ce film, mais à la maison, sur sa télévision. Mais ne commençons pas essayer de comprendre pourquoi certaines œuvres sont boudées par les gros réseaux de distribution. On le répète souvent ici, parfois, mieux vaut ne pas chercher le pourquoi du comment à ce propos. Contentons-nous de constater une nouvelle dois que désormais, le fait de voir un long-métrage débouler directement en vidéo, n’indique en rien sa valeur. Et ça tombe bien, car Deuxième Chance à Brooklyn illustre à merveille cette tendance inexplicable qui consiste à condamner à l’avance de bons films, en les cantonnant aux bacs DVD.
Phil Alden Robinson a eu son heure de gloire dans les années 80, quand il livra Jusqu’au bout du rêve, un petit film à priori innocent racontant l’histoire d’un type encouragé par une voix céleste à construire un terrain de base-ball pour y accueillir un match pour le moins « surnaturel ». Œuvre culte aux États-Unis (beaucoup moins chez nous), mettant un jeune Kevin Costner au premier plan, Jusqu’au bout du rêve n’a néanmoins pas permis à Robinson d’acquérir un statut suffisant à Hollywood pour se voir confier de grands projets, si on fait exception du thriller avec Robert Redford, Les Experts, et du mal-aimé La Somme de toutes les peurs, avec Ben Affleck.
Cela dit, aujourd’hui, Robinson se retrouve quand même aux commandes de l’un des derniers Robin Williams, et force est de reconnaître que le cinéaste ne se montre jamais plus compétent que lorsqu’il s’agit de communiquer des émotions.
Sa nouvelle réalisation reste ainsi modeste. Pas de fulgurances aux niveau de la mise en scène, ni même au niveau de l’écriture, si ce n’est quelques fantaisies timides. Deuxième Chance à Brooklyn se positionne dans une logique très américaine et évoque d’autres œuvres, dont certaines arrivent à toucher avec plus de force. Ceci dit, il ne démérite jamais et sait donner les coudées franches à ses acteurs, dont bien sûr Robin Williams, au premier plan et une nouvelle fois remarquable.
Dans la lignée du Michael Douglas de l’excellent Chute Libre, de Joel Schumacher, le comédien campe ici un type franchement furax, dont le caractère explosif lui vaut d’être mis au ban de sa propre existence. Connu pour sa douceur et pour son extravagance, illustrées au fil d’une filmographie constellée d’œuvres ayant bâti l’image que tout le monde se fait de lui, Williams surprend car il ne cherche pas à se rendre attachant. À vrai dire, il est carrément imbuvable, même si sa propension à s’énerver, reste non violente et se traduit surtout par une sauvagerie verbale clairement censée traduire la détresse du personnage. Bien entendu, la colère est amenée à se transformer et Henry, cet avocat furibard, à évoluer, histoire de donner corps à une morale certes prévisible mais pour autant efficace. Après tout, Deuxième Chance à Brooklyn est un conte. Une sorte de déclinaison contemporaine de la fameuse histoire de Scrooge, qui sait néanmoins conserver une petite part d’irrévérence, quitte à ce que cette dernière soit de plus en plus maladroite, au fur et à mesure que le film s’achemine vers son dénouement.
Maladroit. Le mot est lâché. C’est peut-être le seul vrai reproche que l’on puisse faire au film de Phil Alden Robinson, si on garde bien en tête sa modestie manifeste. Non ce n’est pas un classique instantané et non ce n’est pas une grande œuvre qui restera dans les mémoires, si ce n’est car il s’agit de l’une des ultimes occasions de voir un génie au travail. Le fait de savoir qu’il s’agit là du dernier bon film de Williams aide bien Deuxième Chance à Brooklyn, mais il serait néanmoins dommage de le juger uniquement à l’aune de la condition qu’il a acquise malgré lui lorsque Robin Williams a tiré sa révérence. Souvent drôle, notamment lorsque James Earl Jones rentre en scène pour une des scènes les plus réussies, véhiculant de belles valeurs, porté par une équipe de comédiens investis, dont les excellents Peter Dinklage, Melissa Leo et bien sûr Mila Kunis, parfaite une nouvelle fois face à un géant du cinéma, le long-métrage ne démérite jamais et arrive même parfois, lors de belles envolées, à sublimer sa condition modeste (à noter également l’apparition éclair mais très drôle de Louis C.K.). Il suffit juste de se laisser porter et de laisser le cynisme au vestiaire…
@ Gilles Rolland
Crédits photos : Factoris Films Comédie critique Deuxième chance à Brooklyn drame Hamish Linklater James Earl Jones Louis C.K. Melissa Leo Mila Kunis Peter Dinklage Phil Alden Robinson Richard Kind Robin Williams Sutton Foster The Angriest Man in Brooklyn