Formé aux métiers du livre à Paris où il fait à l'occasion quelques fresques sur les murs métropolitains, c'est véritablement au cours de ses voyages en Amérique latine qu'il se forme à la création plastique : le sens des couleurs et leur asservissement au regard au milieu de la cohue humaine dans le cœur de Sao Paolo et si possible au pied d'une pile de pont, l'ennui de la ligne droite parmi les grandes diagonales des avenues de la Cordoba argentine ou le clair-obscur à l'ombre miroitante des gratte-ciels crasseux de Panama City.
Il redécouvre Montpellier et sa lumière méridionale en 2008 pour s'y fixer et rejoint très vite le collectif de l'Atelier du Nord, un des étendards artistiques du quartier montpelliérain de Figuerolles. C'est au sein de l'atelier qu'il va entamer cet épluchage systématique des murs montpelliérains de leurs couches d'affiches.
S'emparant du " lacéré anonyme " cher à R. Hains et J. Villéglé dès les années soixante, de cet accident qui fait se rencontrer les trames de couleurs et de textes des affiches pour créer, par déchirement spontané, un paysage pictural sur les murs même de la ville, Mathieu Renault creuse toujours plus encore les couches de papiers pour leur faire rendre toute leur poésie : elles sont les mues de la ville:
" Le besoin d'arracher ses peaux à la ville relève aussi de la même impulsion que celle qui nous fait ramasser et garder au creux de la main le plus beau galet de notre promenade le long de la mer. Même lorsque ce qui nous entoure, cette réalité par exemple, est aussi laid que possible, il nous faut nous en saisir pour y découvrir les beautés recelées. A portée de main créatrice, j'arrache ses épaisseurs d'affiches à la rue. Parce que le papier déjà imprimé, une fois laissé à lui-même dans le cœur urbain, s'imprime encore de tout ce qui s'y passe.
Arracher les affiches, c'est découvrir ce qui se trame derrière la ville. "