Cette étude en mécanobiologie menée par des scientifiques de de l’Université de Singapour décrypte les forces mécaniques qui conduisent la cicatrisation des plaies. Ces travaux, publiés dans la revue Nature Communications contribuent à expliquer le mécanisme d’autoréparation induit par les cellules de la peau, en particulier en cas de plaies chroniques et de matrice extracellulaire compromise. Ils apportent des éléments de compréhension précieux pour le développement de nouveaux protocoles de soins et dispositifs de pansements pour ces plaies difficiles à cicatriser.
Si la peau est un rempart précieux de protection contre les matériaux et les agents pathogènes et une enveloppe qui permet au corps de conserver différents liquides et d’électrolytes, une fois la barrière rompue, les conséquences peuvent être dévastatrices. Le développement d’ulcères, les saignements et les infections bactériennes peut entraîner une chronicité de la plaie qui va rester ouverte plus longtemps avec une difficulté à cicatriser.
Le mécanisme de cicatrisation » classique » commence à être bien connu : Les chercheurs du Mechanobiology Institute (MBI) de l’Université de Singapour (NUS) rappellent ici le mécanisme d’auto-réparation entrepris par les différentes couches de cellules épithéliales. Les cellules commencent par ramper vers l’extérieur de la plaie alors que se forment des cordons contractiles formés de cellules situées sur les berges de la plaie qui vont participer à resserrer ces berges. Dans la plupart des cas, des cellules de la peau en bonne santé vont venir effectuer la réparation de la plaie en s’appuyant sur la matrice extracellulaire, un support comportant des protéines adhésives, qui permet aux cellules de ramper au-dessus. La contraction du cordon (En rouge ci-contre) va contribuer à refermer la plaie.
Comment se referme la plaie en cas de lacunes des barrières épithéliales : Dans les cas de plaies chroniques ou graves, les couches sous-jacentes peuvent être endommagées (lésions épithéliales) et les cellules environnantes incapables de recouvrir les protéines de la matrice extracellulaire. Ces lacunes de la barrière cutanée ont aussi leurs mécanismes d’autoréparation, mais à un rythme plus lent et avec un risque accru d’infection ou d’autres complications. Comment donc les cellules vont-elles pouvoir combler ces lacunes des barrières épithéliales ? C’est le point traité par ces chercheurs qui révèlent que la fermeture de lacunes non adhérentes est possible exclusivement par l’action de contraction du cordon cellulaire. Sur une culture, ils identifient ce qu’ils appellent un bras de force cellulaire qui entraine la contraction responsable de la fermeture de la plaie.
Les cellules des berges se répartissent au mieux au centre de la plaie. Le mécanisme est très particulier et » contre-intuitif » expliquent les auteurs, car l’ancrage se fait d’abord aux extrémités de la plaie jusqu’à ce que les 2 berges finalement se rencontrent au milieu. Une fois que les cellules se sont réparties autant que possible dans l’espace, la contraction des cordons est à son
maximum. Comme les cellules se déplacent vers l’intérieur pour combler le vide, plusieurs cordons contractiles parviennent à se refermer. Cette contraction rapidement, conduit à la formation d’une couche de cellules en suspension au-dessus de la plaie puis à sa fermeture complète.Mieux connaître » la mécanique de la peau » : Ce mécanisme de bras de force qui entraine le mouvement de contraction est un exemple de la façon dont les cellules exercent des forces directionnelles pour améliorer les processus biologiques. Cette nouvelle connaissance des propriétés mécaniques de la peau et des cellules épithéliales internes peut conduire à des progrès dans la cicatrisation des plaies, en particulier dans les cas où la matrice extracellulaire est compromise, comme dans l’ulcère. Comme développer de nouveaux protocoles de soin ou dispositifs de pansement qui pourront venir à bout d’une plaie chronique ou infectée.
Source: Nature Communications 22 January 2015 doi:10.1038/ncomms7111 Mechanics of epithelial closure over non-adherent environments (Visuel@ Mechanobiology Institute, National University of Singapore)
Lire aussi: CICATRISATION: Le cordon cellulaire qui referme les berges de la plaie–
CICATRISATION, PROPAGATION: Nos cellules aussi ont horreur du vide -