Travailler sur un projet photo … ça aurait pu clairement être un article à publier le 1er janvier non ? Il a tous les attributs du billet « bonnes résolutions » ! Mais tout compte fait, je me suis dis qu’il aurait certainement plus d’impact publié quelques semaines après le boom des bonnes résolutions.
Pourquoi ? Parce justement, si je veux vous convaincre de travailler sur un projet, je ne dois surtout pas le cataloguer dans la catégorie bonnes résolutions. Car, nous savons tous qu’elles sont faites pour ne pas être tenues.
L’article d’aujourd’hui est destiné à vous faire progresser sans parler de techniques d’affûts ou d’approche, de réglages d’appareil ou de cadrage et de composition. Je ne vais donc pas vous expliquer ici quelle ouverture, quelle vitesse ou quelle sensibilité choisir pour photographier le blaireau. Votre progression en photo animalière ne passe pas que par la maitrise de ces paramètres.
Elle passe aussi (et surtout ?) dans la tenue sur le long terme d’un projet photographique, quel qu’il soit. Je vais vous démontrer en détail pourquoi je vous conseille fortement d’adopter une telle résolution entreprise pour 2015 (ou 2016, on s’en fiche).
Petite définition
On a tous vaguement en tête ce qu’est la notion de projet. Pourtant, il suffit de lancer une petite recherche sur le net pour découvrir que ce mot accepte plusieurs définitions selon le contexte. Je ne vais pas toutes vous les faire ici, et me concentrer sur ce qui nous intéresse le plus : la photographie.
J’adapte alors une définition trouvée sur le Larousse :
Un projet photographique : idée de thème de photos à déterminer dans les grandes lignes et que l’on se propose d’atteindre.
Voyez, c’est large et pas compliqué (pas compliqué car j’aurais aussi pu vous mettre ça : « On appelle projet un ensemble finalisé d’activités et d’actions entreprises dans le but de répondre à un besoin défini dans des délais fixés et dans la limite d’une enveloppe budgétaire allouée » … sympa Wikipédia ! )
Je reprends donc ma définition (pas celle entre parenthèse hein !) et je l’illustre avec des exemples :
- idée de thème de photos à déterminer : on peut tout y mettre. Du sujet le plus bateau, comme photographier des renardeaux au terrier aux idées les plus farfelues comme photographier exclusivement les queues des renards de Bourgogne … eh !!! mais il est super ce projet en fait !!
- qu’on présente dans les grandes lignes : oui, pas de prise de tête, on fait ça pour le plaisir ! Je veux photographier les légendaires queues des renards. Je développe un peu cette idée … dans les grandes lignes. Ce qui pourrait donner : mettre en valeur la queue des renards de ma campagne bourguignonne à travers des images esthétiques (et donc pas naturalistes) pour en proposer l’exposition photo aux offices de tourisme de ma région.
- que l’on se propose d’atteindre : là encore, on se fait plaisir avec tout ! Ne nous mettons surtout pas de pression. Je me propose de réaliser mon projet photo en deux ans. Et si je le fait en cinq ans, je m’en fiche. Pas de planning, pas de planning !!!
Et si j’abandonne en cours de route ? Ça n’est pas grave. Tout au moins je pourrais me poser cette question : pourquoi n’ai-je pas réussi à faire ce que j’avais prévu. Qui sait ? La réponse pourrait être instructive : manque de temps, manque de motivation, idée trop complexe, insuffisamment équipé, …
Je lance peut-être un pavé dans la marre : lancez-vous et tant pis si vous n’arrivez pas au bout. Au passage, ça m’enlève toute mauvaise conscience de n’avoir pas terminé mon projet photo sur les lapins de garenne.
Ne pas se contraindre avec le temps, c’est s’enlèver toute pression inutile et contre-productive. En photographie animalière, on a le temps et, sauf à avoir une commande de la BBC, rien ne vous oblige à aller au bout de votre projet en 6 mois.
A ce propos, on lit souvent comme conseil de partager son projet au plus grand nombre. Sur Facebook, sur son site internet, par mail à ses proches, pour en quelque sorte s’obliger à tenir le cap … pourquoi pas. Je ne suis cependant pas certain qu’il faille passer par cette case là. Je veux dire, si j’ai choisi le bon thème, le bon angle d’approche et que je suis un minimum passionné, j’irai au bout de mes rêves de mon entreprise. C’est à vous de choisir de rendre le projet public ou non. Si vous le faites, on vous attend au tournant. Si vous ne le faites pas, vous êtes bien pépère dans votre coin et vous avancez au rythme qui vous convient !
C’est bon pour la notion de projet appliqué à la photographie animalière ? Si vous avez des questions, à ce sujet, merci de vous adresser directement au bureau B2 étage 4 service 56 … bref dans les commentaires quoi !
Pourquoi faire un projet photo ?
Après la question du quoi vient cette du pourquoi. Se lancer dans projet photo est, j’en suis persuadé, le meilleur moyen de passer à la vitesse supérieure (formule trop convenue j’en conviens, qui a le mérite cependant d’être très claire).
Raison #1 : Se renouveler, tenter, créer, imaginer
Photographier le même sujet encore et encore sur une longue période vous forcera à expérimenter toujours plus. Rien ne vous y oblige cependant. Vous pouvez prendre plaisir à photographier le même sujet sans varier votre approche pendant longtemps.
Ça n’est pas tout à fait comme ça que je vois les choses. Désolé pour la redondance, je prends l’exemple des lapins de garenne. Je les suis depuis plusieurs années. Par conséquent, tirer le portrait serré d’un sujet ne m’intéresse plus beaucoup. Et comme je ne veux pas les laisser (les pauvres !) je renouvelle le genre. Bon, peut être pas à ce point. Disons que je tente de nouvelles choses pour garder la flamme !
Il y a un bon moyen pour y parvenir. C’est celui d’imaginer en amont dans sa tête une possible image. C’est ce qu’est par exemple capable de faire un photographe comme Bastien Riu. Ses photographies sont de véritables mises en scène. Imaginées, conçues, dessinées en amont puis réalisées, enfin. Sans aller jusqu’à ce que fait Bastien, une photo de lapin que je projette est celle d’un sujet en contre-jour dont le contour serait fait d’un liseré doré. Je vous laisse imaginer dans votre tête !
Il n’y a pas le liseré … ça viendra !
Raison #2 : Exposer localement
Faites comme moi, allez voir les locaux publics du coin et toquez à leur porte !
« Bonjour, je suis un photographe animalier amateur et j’ai en projet de photographier les queues des renards de la région. j’aimerais à terme en faire une exposition de 10 photos en grand format, est ce que ça vous dirait d’exposer mon travail ? »
Qui aller voir ? Les offices de tourisme, les médiathèques – bibliothèques, les mairies, les restaurants, certains locaux d’entreprise, … Ça a marché pour la bibliothèque de mon village, c’était génial ! J’ai gagné 3 grammes et demi de notoriété publique et je suis depuis devenu le photographe officiel du club de judo de ma fille.
Et pour 2015 (ou 2016 !) j’ai le projet de solliciter l’office du tourisme flambant neuf de chez moi pour leur proposer mon futur projet (les queues de renards ?)
Votre serviteur dans ses oeuvres :-)
Raison #3 : faire un livre
Editer un beau livre photo est à la portée de tout le monde. C’est une sacrée chance que nous offre internet : celle de pouvoir s’auto-éditer à moindre frais. Les sites internet à proposer ce type de service sont nombreux. Le plus connu est Blurb. Ce site d’édition de livre est très connu et a deux gros avantages : il est en français et il permet de vendre son livre. Après l’avoir bien entendu créé ! La vente direct depuis le site Blurb ou carrément la vente via Amazon ! Beaucoup de choses sont possibles et c’est très motivant.
En farfouillant sur le net j’ai dégotté celui-ci : bobbooks. Bon, ça à l’air très sérieux, ils peuvent envoyer partout dans le monde mais … c’est exclusivement dans la langue de Shakespear. Avis aux courageux anglophiles ?
La page d’accueil du site Blurb
La page d’accueil du site Bob Books
Raison #4 : Pour avoir tout un tas de nouveaux copains
Allez, celle-ci, elle est un peu tiré par les cheveux … quoique !
La photographie animalière est une activité 95 % du temps solitaire. Alors que diriez-vous d’avoir plein de nouveaux copains pour vous accompagner ? Bon, par contre, leur amitié et leur confiance est très, très difficile à obtenir. Mais une fois que c’est bon, ils vous le rendent au centuple.
Vous avez deviné de qui je parle ? Des animaux bien sûr ! Et devinez quoi, gagner la confiance des sujets que vous suivez vous permettra d’observer des comportements rares. Vous pensez déjà à la proximité que vous aurez avec votre sujet. C’est un plus indéniable. Mais, je vous l’ai dit, c’est surtout avoir la possibilité d’immortaliser des attitudes exceptionnelles.
Ma nouvelle copine ! :-)
Quels thèmes pour un projet photo ?
Trouver une idée de projet n’appartient qu’à vous. Vos affinités avec telle ou telle espèce, votre environnement, votre budget, seront, entre autres, autant de contraintes à prendre en compte.
Ceci étant dit, voici tout de même quelques idées de projet. À creuser évidemment.
Idée #1 : Se concentrer sur une seule espèce
Je l’ai fait avec les lapins de garenne. On peut le faire avec n’importe quelle autre espèce animale. Attention cependant. Autant revenir quasi quotidiennement dans une garenne ne pose, à priori, pas de problèmes éthiques, autant jeter son dévolu sur une espèce protégée et en danger peut-être plus problématique. Je pense au fameux Tétra-Lyre par exemple.
Enfin, dites-vous que plus une espèce est commune et accessible au plus grand nombre, plus vous serez face à un beau challenge ! Je souhaite bon courage au photographe dont le projet serait : la mésange bleu à la mangeoire l’hiver. C’est possible de sortir du lot avec ça, mais va falloir se creuser la tête !
Idée #2 : Se concentrer sur un lieu en particulier
L’orientation vers ce type de projet sera évidement fait en fonction de votre lieu d’habitation. Ça pourrait être quelque chose comme : photographier les canards sauvages dans les rivières de Champagne (euh … la région hein !!! )
Idée #3 : Se tourner vers un thème abstrait.
On s’éloigne de plus en plus de la zone de confort ! S’orienter vers les trois points ci-dessous risque de vous donner pas mal de fil à retordre. Mais c’est ça qui est bien non ? Ahem … dit en passant : je fais le malin en vous donnant ces idées mais je n’en ai expérimenté aucune (en tout cas dans cette catégorie abstrait). Nous sommes donc tous au même niveau !
- Un thème sur la couleur : le vert (non trop facile ) le rouge !
- Un thème sur une forme : la ligne droite chez les oiseaux (hum … je sens bien un gros travail de poses longues sur des vols de barges à queue noire !), une émotion :
- Un thème sur une émotion, un sentiment, un état : jouer quand on est un animal sauvage.
Idée #4 : choisir un type d’objectif
Là non plus je ne me suis jamais lancé dans un tel projet. Mais ça me botte. J’ai une autre affaire sur le feu pour les mois qui viennent et je n’aime pas m’éparpiller (certains sont capables de lire plusieurs romans en même temps, j’en suis incapable !).
Mais je suis sûr qu’à moyen terme je ferai quelque chose comme : les portrait d’animaux (idée de thème de photos à déterminer) de ma campagne au grand angle(qu’on présente dans les grandes lignes) dans le but d’éditer un livre photoque l’on se propose d’atteindre).
Tiens, ça pourrait être ça par exemple : histoires de photos par Stéfano Unterthiner.
© Stefano Unterthiner
J’espère que maintenant vous avez compris pourquoi les plus grands photographes animaliers ne s’éparpillent pas. Et que, au contraire, ils ne focalisent leur attention sur leur projet pendant un temps donné.
D’ailleurs, il suffit de voir les expositions de photographes de renom pour s’en rendre compte ! Les titres donnés à leurs expos sont très évocateurs. Et on s’imagine très bien que leurs expositions sont le résultat d’un projet photo réussi et terminé !
- Thomas Delahaye : Univers’ailes
- Sandrine Delage : Coeur de Sel
- Alfred Blaess : Au petit matin
- Eric Egea : Goutte à goutte
- Luc Gizart & Sophie Luciani : °OO°
Vous savez maintenant ce qui me ferait plaisir ? Que vous partagiez dans les commentaires un projet que vous avez réalisé ou un projet que vous allez réaliser. Et n’ayez pas peur de partager votre idée !! Je vous assure que quelqu’un d’autre l’a eue avant vous ! C’est certain .