Tomorrow Machine est le studio de création des deux designers suédoises Hanna Billqvist et Anna Glansén, basé à Paris et à Stockholm et spécialisé dans le design de produits et d’emballages alimentaires : «Notre vision en tant que designers est de construire un monde meilleur grâce à la recherche, aux nouvelles technologies et aux matériaux intelligents. Notre motto est d’observer la science en adoptant un point de vue créatif afin de créer les innovations de demain.»
This Too Shall Pass, traduit «Cela aussi passera», est un concept de packagings alimentaires innovants où l’emballage a la même durée de vie – courte – que son contenu. La série comprend trois emballages éphémères en matériaux bio-sourcés et biodégradables, respectivement à base de sucre caramélisé, de gel d’agar-agar et de cire d’abeille. L’idée est donc se débarrasser de l’emballage en même temps que l’aliment qu’il contient est consommé : tout repose sur une combinaison de substrats qui ne vont pas réagir ensemble. Pour ouvrir ces produits on retrouve des gestes naturels tels que casser un œuf ou éplucher un fruit. En ajoutant ce côté ludique à l’action du désemballage et par le choix de matériaux naturels, les designers suédois ont mis au point un concept qui séduit et encourage à consommer éco-responsable.
Les prototypes visent trois aliments : l’huile d’olive, le smoothie à la framboise et le riz basmati.
Il y a d’abord l’emballage pour l’huile ou des aliments à base d’huile, fait de sucre caramélisé et enrobé avec de la cire d’abeille pour sceller le tout. Pour l’ouvrir il faut le casser comme un œuf ; à ce moment là la cire ne protège plus le sucre et l’emballage fond au contact de l’eau.
Ensuite, il y a l’emballage pour smoothie composé uniquement de gel d’agar-agar et d’eau. Pour l’ouvrir il faut percer le haut avec une paille. Une fois hors du frigo, l’emballage se dégrade à la même vitesse que son contenu. Il est conçu pour les boissons qui ont une courte durée de vie et qui doivent être réfrigérées telles que les jus de fruits frais, les smoothies et la crème.
Enfin il y a l’emballage pour contenir du riz ou d’autres produits secs (graines etc.) en cire d’abeille biodégradable fine comme du papier. Ici, le riz basmati est emballé sous forme de pyramide. Pour l’ouvrir, on le pèle comme un fruit.
Anna et Hanna ont répondu à nos questions pour plus de précisions sur leur projet et leurs prochaines étapes :
Quand avez-vous commencé à travailler sur ce projet et quelle était votre motivation ?
Nous pensons qu’il est nécessaire de trouver des nouvelles solutions d’emballages durables. Notre motivation est de créer la prochaine génération de produits écologiques.
Nous avons commencé ce projet en 2011 en nous posant la question : « est-il normal qu’une brique de lait mette des années à se décomposer alors que le lait en lui-même tourne après une semaine ? » This Too Shall Pass est une série de packagings alimentaires où l’emballage à la même courte durée de vie que son contenu ; le contenant et le contenu travaillent en symbiose. Nous nous demandons alors comment pourrait être conçu l’emballage du futur, avec la technologie accessible aujourd’hui.
Quelle était votre démarche pour trouver la combinaison de matériaux contenu/contenant qui marche ?
C’est une étape très importante du projet ; quand nous avons développé les emballages, nous avons fait beaucoup de tests et observé comment les matériaux réagissaient les uns avec les autres. Par exemple, l’eau dissout le sucre mais pas l’huile, rendant le sucre un matériau idéal pour emballer de l’huile.
Qu’est-ce qui a inspiré l’esthétique de vos designs ?
Nos deux plus grandes sources d’inspiration sont le biomimétisme et le minimalisme. Pour ce projet nous avons observé les écorces de fruits et la manière dont la nature emballe elle-même la nourriture.
Nous essayons également de ne pas perdre de vue le matériau et de tirer le meilleur des propriétés que nous aimons en lui, et c’est pour cela que nous faisons en général des formes simples. Nous pensons aussi qu’il n’est pas utile de rendre des produits et des emballages plus compliqués que nécessaire.
Ces emballages sont-ils disponibles sur le marché aujourd’hui ?
Pas pour le moment.
Avez-vous pensé à des designs pour d’autres produits, la viande par exemple ? Pensez-vous travailler de nouveau sur ce type d’emballage dans un futur proche ?
Jusqu’à présent nous n’avons jamais travaillé avec de la viande, mais nous sommes convaincues qu’il est possible d’emballer cet aliment avec ce type de packaging.
Oui nous travaillons en permanence sur ce type d’emballage biodégradable. Nous croyons en notre projet This Too Shall Pass et nous voulons mettre ces produits sur le marché. Notre principale préoccupation est de trouver un moyen de financer leur développement afin de les rendre adaptés à la production de masse. Par conséquent, nous sommes en ce moment à la recherche de financements.
Quelle est votre position sur le sujet «Biodégradable versus Recyclable» en ce qui concerne les solutions d’emballage durable ?
Nous pensons que nous avons besoin des deux types d’emballages, biodégradable et recyclable ; l’un n’empêche pas l’autre. Quand il s’agit d’emballage éco-responsable, il est important de prendre en compte l’intégralité du contexte de chaque produit. Nous ne pensons pas qu’il existe une solution universelle. Pour certains aliments un emballage recyclable est la meilleure alternative, pour d’autres un emballage biodégradable.
Un grand merci à Hanna Billqvist et Anna Glansén pour leurs réponses et pour les images.
Plus d’informations sur le projet : Tomorrowmachine
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