… une cuisine très actuelle, donc très technique et très démonstrative …
Pierre Caillet, le chef, est un peu la nouvelle coqueluche de la gastronomie dans la région. Jeune, créatif, déterminé et volontaire, il est déjà Meilleur Ouvrier de France 2011 et vient d’obtenir en 2013 sa première étoile au Michelin.
C’est vrai qu’il a tout pour plaire. Aimable, avec une pointe de timidité sinon d’humilité, il a retapé avec son épouse qui gère la salle, une ancienne bâtisse dans la campagne près de Fécamp. Il a son potager et donne des cours de cuisine à des amateurs énamourés. Du sérieux, une volonté sans failles, et une recherche de reconnaissance, vitale dans sa situation isolée. Un homme de la région à laquelle il reste fidèle tant dans ses produits que dans ses inspirations.
Sa carte est un festival de plats originaux, aux alliances volontairement étonnantes sinon provocantes, défaut et qualité d’une jeunesse en ébullition, et parfois ça passe, parfois ça casse. Normal, c’est le risque mais le jeu en vaut la chandelle.
Le ton et le tempo sont donnés avec les Canapés servis en pré-entrées. Gougère camembert et potimarron, Madeleines au cresson, et délicieuses Croquettes de brandade de lotte.
Un starter presque campagnard avec un Velouté de légumes dans lequel s’ébat un joli morceau de confit de canard, où l’on découvre que l’élevage du canard pour le foie gras et les confits est devenu un sport national dans cette région qui décidément ne manque pas de richesses en produits gourmands et gastronomiques.
A preuve avec cette entrée, malheureusement tarabiscotée et au choc des saveurs un peu violent : Foie gras comme un nougat, betterave crapaudine, zist et zest de cédrat. Résultat : une alliance encore une fois étonnante et détonante et finalement peu convaincante. Trop d’amertume apportée par le cédrat et le pauvre foie gras n’y résiste pas, devenant un support plus qu’un point central de l’assiette.
Filet de Saint-Pierre juste cuit aux deux caviars, chicons braisés au jus de volaille, réduction d’agrumes. A l’énoncé, c’est beau. A l’arrivée, c’est compliqué. Le « juste cuit » arrive évidemment à peine tiède, et toujours cette présence envahissante du citron. L’homme aime l’acidité des agrumes et fait largement partagé cet amour/passion.
Variation du topinambour et de la truffe blanche d’Alba. Les premières Alba, encore jeunes mais belles, pour un plat glacé, un choix qui ne rehausse pas les saveurs subtiles de la truffe.
Soudain, au dessert, le flash du talent et de la maitrise du chef : Mousse de pomme au four, brunoise de Rubinette, coulis de Boskoop au cidre. Toute la pomme en une variation géniale de texture et de saveurs. Beauté du plat, pour une redécouverte du fruit emblématique de la région. Magnifique. Le tout accompagné avec un cidre artisanal remarquable de goût et de fraîcheur. On comprend que la pomme soit le fruit de la tentation.
Mignardises délicates (est-il un homme du sucré ?), carte des vins riche et variée à des prix serrés, accueil en dedans, pas vraiment expansif, et service de même.
Un ensemble finalement un peu froid, comme sa cuisine, qui certes se veut très actuelle donc très technique et très démonstrative, avec des fixations sur un produit du moment décliné partout, et un peu envahissant. Une cuisine assez mode, comme il faut aujourd’hui avec ses tics, ses limites et de temps en temps des éclairs de génie. Le temps fera son affaire… espérons.
22, rue André Fiquet
76540 Valmont
Tél : 02 35 29 77 56
www.lebecaucauchois.com
[email protected]
Fermé dimanche soir, mardi et mercredi
Et du 24 décembre au 25 janvier
5 chambres de 85 € à 115 €
Menu du marché : 35 €
Menus : 62 € (4 plats)
Tentation : 83 € (7 plats)
Carte : 65 € environ
Lire la suite: Le cocktail Monk’s Sour
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