La Chine prend grand soin des routes qui servent sa boulimie de matières premières africaines. La semaine dernière, Pékin et l’Union africaine (UA) ont ainsi finalisé les grandes lignes d’un vaste projet d’infrastructures destiné à relier les capitales africaines au moyen d’autoroutes, de trains à grande vitesse et de liaisons aériennes.
Voies ferrées tous azimuts
« C’est le projet le plus important jamais signé par l’Union africaine avec un partenaire », a souligné la présidente de la Commission de l’UA, Nkosazana Dlamini-Zuma. C’est « l’accord du siècle » exulte le vice-ministre des affaires étrangères chinois, Zhang Ming. Ce projet va permettre en effet à la Chine de rafler d’importants contrats et imposer encore un peu plus sa présence en Afrique. Une présence à la hauteur des quelque 2 200 kilomètres de voies ferrées déjà construites par Pékin sur le continent, auxquelles s’ajoute le millier d’autres en travaux. Des lignes de chemin de fer reliant la capitale éthiopienne Addis Abeba et Djibouti, Nairobi et Mombassa au Kenya et des villes de la côte nigériane sont déjà en cours de construction par des entreprises chinoises.
C’est ainsi que 5 000 ouvriers chinois sont déjà à pied d’œuvre, rien qu’au Kenya. En Angola, China Railway Construction (CRC) a achevé il y a six mois la ligne reliant le port de Lobito au réseau ferré du Katanga, en RD Congo. Plus de 20 millions de tonnes de matières premières y chemineront chaque année. Les travaux ont coûté 1,83 milliard de dollars à l’Angola. Ciment, rails, outils de communication et une grosse partie de la main-d’œuvre. Tout venait de Chine.
En novembre dernier, CRC raflait encore un méga contrat de 12 milliards de dollars pour construire au Nigeria une ligne ferroviaire longeant les côtes du pays sur plus de 1 400 kilomètres. Le rail est devenu le fer de lance de la politique chinoise en Afrique. La Chine qui dispose déjà de l’équivalent de la moitié du réseau TGV de la planète sur son territoire signe des contrats tous azimuts.
La « nouvelle route de la soie » chinoise en Afrique
Une « diplomatie des transports » concrétisée par la signature à Addis Abeba de cet accord-cadre. « Ce projet marque le coup d’envoi de la réalisation de l’agenda 2063 », date fixée par l’Union africaine pour la mise en place d’une Afrique « unifiée et prospère », assure la représentante de l’Union. Le financement ? Comme toujours la Chine amène les dollars en même temps que les hommes. L’Exim Bank, la banque chinoise d’import-export, finance l’ensemble des projets. Grâce à cet établissement, la Chine prête désormais plus d’argent à l’Afrique que la Banque mondiale.
Bien sûr les critiques n’ont pas tardé. Diplomatie du béton, pillage des matières premières, néocolonialisme, a-t-on pu lire dans certains médias africains. Amélioration des transports, croissance économique, ouverture au monde, leur a répondu Hua Chunying, le porte-parole du ministère chinois des affaires étrangères. Cette diplomatie des transports ne se limite plus au seul chemin de fer. 2015 marque en effet pour la Chine l’ouverture de sa « nouvelle route de la soie ».
Sur le modèle des anciennes voies commerciales qui reliaient la Chine à l’Europe, Pékin tisse sa toile et l’Afrique est une étape incontournable avec la construction prévue de sept ports sur le continent : à Djibouti, en Tanzanie, au Mozambique, au Gabon, au Ghana, au Sénégal et en Tunisie. Un collier de perles payé rubis sur l’ongle grâce à une enveloppe de 40 milliards de dollars débloqués cette fois directement par le gouvernement chinois.
Source : LeMonde