Un film de Brian Percival (2013 - USA, Allemagne) avec Geoffrey Rush, Emily Watson, Sophie Nélisse, Ben Schnetzer, Nico Liersch, Barbara Auer
Un très beau film, un peu mélo, mais pas trop.
L'histoire : Allemagne, 1939. Liesel, dont la maman communiste a été arrêtée par les nazis, est recueillie par un couple sans enfants. La femme, Rosa, est revêche et autoritaire, mais l'homme, Hans, lui, sait apprivoiser la petite fille. A l'école, tout le monde se moque d'elle, car elle ne sait pas lire. Elle a pourtant un bien précieux, qu'elle a récupéré, tombé dans la neige, lors de l'enterrement de son petit frère, un livre qui s'avère être un guide du fossoyeur ! Hans en rit et lui apprend à lire avec cet ouvrage auquel elle tient tant. Elle se prend de passion pour les mots et la lecture. Aussi est-elle très attristée lorsque les nazis organisent un autodafé dans son village. Elle réussit à attraper un livre lorsque tout le monde est parti. Mais la femme du maire l'a vue... Et comme si la vie n'était pas assez compliquée comme ça, débarque Max, un jeune homme juif que le couple va cacher...
Mon avis : Je ne me souviens pas d'avoir entendu parler de ce film. Ca ne me disait rien qui vaille... pensez donc, un réalisateur que je ne connais pas et cet imbécile de Télé Loisirs qui ne mettait que deux étoiles. Quelle bonne surprise ! Une vraie histoire, romanesque, dramatique et tendre, parfaitement interprétée (ah Geoffrey et Emily !). Adaptée d'un roman de l'Austalien Markus Zusack.
Cette petite fille est bouleversante. Son courage, sa détermination, sa compréhension des gens et des événements... Et puis j'ai aimé le contexte, le nazisme vu du point de vue des Allemands. C'est original et c'est captivant. Ces braves gens, à une époque où, rappelons-le, il n'y avait pas de "réseaux sociaux" qui vous inondent de news à la vitesse de la lumière, tous ces citoyens lambdas, exactement comme nous, recevaient l'information que l'on voulait bien leur donner : un Führer bien-aimé qui allait les protéger de tout. Puis peu à peu, ils perdent leurs illusions au fur et à mesure qu'ils vivent les interdits, les autodafés, la répression et les exactions sur les juifs. Au début, lorsqu'on voit les enfants avec leurs petits uniformes hitlériens, qui chantent pleins d'enthousiasme l'hymne allemand, sous de grands drapeaux nazis... quelle image choc !
Très jolie aussi, cet autre fil rouge : la passion des mots. Les mots qu'on lit et qui vous font voyager ; les mots qu'on aligne pour tenir l'autre en vie, pour ramener des sourires sur des visages terrifiés ; les livres qu'on dévore pour connaître davantage le monde des hommes, encore et encore.
Le narrateur, c'est la Mort. Je sers les plus infâmes créatures, dit-elle, mais parfois je me laisse aller, je suis fascinée par la vie, par les humains. Ce qui explique pourquoi elle épargne certains, qui l'ont émue plus que d'autres. En l'occurrence, ici, cette petite fille... Intéressante variation sur le destin et les ironies du sort.
Le film flirte un peu avec le mélo sur la fin. Difficile de faire autrement avec un sujet pareil. Ca vous tire les larmes, mais en même temps, ça prouve que l'on est encore des êtres humains, capables de s'émouvoir du malheur d'autrui.
Je suis étonnée de découvrir ce matin que ce film n'a pas vraiment trouvé son public. Il faut dire que les critiques n'ayant que peu apprécié, ça n'a pas dû encourager les foules... qui préfèrent sans doute les blockbusters sans âme. Ben pas moi.
Le Figaroscope a trouvé ça bien : "Brian Percival, évoque les évènements de ces années terribles à travers l'expérience enfantine de Liesel, interprétée par Sophie Nélisse, avec une bravoure candide, de plus en plus lucide." ainsi que France Télévisions : "Les Cassandres reprocheront sans doute au film son manque de rugosité, et la texture un peu lisse de la reconstitution. Cela serait passer à côté du message profondément humaniste de cette histoire."
Les Cassandre, les voilà : "Le film pâtit d’un sérieux manque d’émotion, qui se ressent aux moments les plus cruciaux." (AVoirALire ; ben dîtes donc, s'ils n'ont pas été émus, alors on a du souci à se faire...) ; " mise en scène classique, et sur laquelle plane un certain angélisme" (Le Journal du Dimanche ; de l'angélisme, là où on voit les nazis à l'oeuvre, ah ouais ?) ; "Avec de la bonne volonté, un esprit optimiste y verra une apologie de la lecture comme source d'évasion et de connaissance dans un contexte terrible." (Première) ; "Si l'enfer est pavé de bonnes intentions, il en va de même pour les navets." (Ecran Large) ; "Signé par un des metteurs en scène de la série britannique "Downton Abbey", le film pâtit d'une reconstitution qui sent la naphtaline et d'une mise en scène à la fois grandiose et forcée." (TéléCinéObs).
Le meilleur pour la fin : "Brian Percival parsème son film des "topoï", incarnés ou spatiaux, des images de la guerre, sans jamais tenter de remettre en cause le système de circulations de ces clichés cinématographiques ou même les grands cadres de ces derniers." (Critikat). Si vous avez compris un mot de ce qu'ils veulent dire, vous me faîtes signe ! Ah ah ah.
Le public semble avoir été plus sensible au film ; ceux qui l'ont vu, en tous cas, car il n'a fait que 120 000 entrées en France... Dommage. Il vaut mieux que ça.