« N’entre pas dans mon âme avec tes chaussures »
PIGANI Paola
(Liana Levi)
Paola Pigani raconte, sur un mode romanesque, l’histoire de familles Manouches qui furent, au lendemain de la débâcle de 1940, internées dans un camp tout près de la ville d’Angoulême. Elles y vivront dans d’effroyables conditions les cinq années de l’Occupation allemande. C’est à travers un superbe personnage féminin que Paola Pigani décrit l’enfermement, les humiliations que subit une population que l’Occupant et ses valets de Vichy réduisent au rang de sous-homme. Alba va y passer de l’enfance à l’âge de femme, privée de tout, mais avec la rage de survivre, d’échapper à la faim, de contenir la maladie, d’aider les plus faibles qu’elle et d’aimer celui qu’elle s’est choisi. Pas le moindre mélo : le récit s’en prémunit grâce à la sobriété de l’écriture, à une pudeur qui contient ce qui aurait pu l’enliser dans le sentimentalisme, à une colère contenue mais latente. Quelques personnages non résignés, quelques-uns de ceux qui résistèrent aidèrent la jeune femme en devenir à s’extirper du cloaque. Mais le Lecteur en retient surtout l’hommage que l’Auteure rend au Peuple Manouche, à sa farouche volonté de préserver sa liberté. Ni grandiloquence ni apitoiement, mais un juste et fraternel reflet de qu’il fut, de ce qu’il continue à être en dépit des multiples contraintes qui lui sont, aujourd’hui encore, imposées.
Paola Pigani - N'entre pas dans mon âme avec tes chaussures