Date de sortie 28 janvier 2015
Réalisé par Noémie Saglio, Maxime Govare
Avec Pio Marmaï, Franck Gastambide, Camille Cottin, Adrianna Gradziel
Lannick Gautry, Frédéric Pierrot,Isabelle Candelier, Sébastien Castro
Genre Comédie
Production Française
Grand Prix du 18ème Festival international du film de comédie de l'Alpe d'Huez
Synopsis
Jérémie (Pio Marmaï), 34 ans, émerge dans un appartement inconnu aux côtés d’Adna (Adrianna Gradziel), une ravissante suédoise aussi drôle qu’attachante.
Le début dʼun conte de fées ?
Rien nʼest moins sûr car Jérémie est sur le point de se marier… avec Antoine (Lannick Gautry).
Entretien avec Noémie Saglio et Maxime Govare
Toute première fois est votre tout premier film : comment vous êtes-vous retrouvés à travailler ensemble sur ce projet-là ?
Noémie Saglio : Nous écrivions chacun de notre côté, tout en exerçant d’autres métiers pour subsister… Puis nos deux petites soeurs nous ont convaincus d’écrire ensemble. Très rapidement, nous nous sommes trouvés : ça fonctionnait ! Nous avons proposé une douzaine d’idées pour la série La nouvelle trilogie produite par Gilles Galud et Bruno Gaccio pour Canal + et parmi eux, Les voies impénétrables a été retenu... Nous avons ainsi écrit et réalisé notre premier film ensemble, même si c’était un téléfilm pour Canal+. Parmi ces projets, il y en avait un autre, baptisé Coming-in que nous avions un peu oublié jusqu’au jour où Renaud Chélélékian, qui travaille avec Maxime chez Les Improductibles et Edouard Duprey de Kaly Productions nous
ont fait part de leur intérêt pour que cette histoire, (qui tenait sur deux pages), devienne un long-métrage... Ensuite, nous avons été accueillis chez Gaumont et c’était le début de la grande aventure !
Maxime Govare : Nous avions très envie d’aborder le genre de la comédie-romantique mais
de manière plus "trash" que ce que l’on voit généralement dans ce style de films, en tout cas en France. L’idée était d’imaginer un véritable obstacle entre le héros et l’héroïne, quelque chose de plus fort que la traditionnelle "peur de s’engager" ou " je suis immature et j’aime ma liberté" !
Noémie Saglio : Au fur et à mesure, l’histoire s’est concentrée sur l’acceptation de la différence, quelle qu’elle soit. C’est aussi l’histoire du chamboulement d'une vie de couple où, apparemment, tout fonctionne, mais tout peut changer. Cette possibilité d’avoir deux vies et
d’en vivre le meilleur...
Maxime Govare : Oui, nous aimions l’idée que le spectateur n’ait pas à choisir entre un gentil et une méchante, et vice et versa. Chacun des deux personnages qui existent dans la vie de Jérémie sont attachants et légitimes... C’est difficile de faire son choix et nous comprenons alors qu’il hésite à ce point. Le fait qu’il ait vraiment « le cul entre deux chaises » est un ressort de comédie qui marche bien.
C’est aussi pourquoi, au-delà du point de départ du film, un homosexuel qui rencontre une femme et tombe amoureux d’elle, l’histoire se concentre vite et naturellement sur l’idée du couple en général et la question du choix...
Maxime Govare : L’homosexualité était pour nous un point de départ dans le scénario, afin d’aborder un thème plus universel. Dès le départ, nous avons écrit en voulant raconter une histoire d’amour un peu atypique et plus complexe qu’il n’y parait.
Noémie Saglio : Jérémie est un garçon homosexuel qui tombe amoureux d’une fille mais qui ne devient pas hétérosexuel pour autant : il ne désire aucune autre femme à part celle-là !
D’ailleurs, dans sa seconde partie, Toute première fois bascule dans un registre presque plus grave, plus sentimental en tout cas...
Maxime Govare : Oui, notre envie était clairement qu’à un moment, le spectateur ressente une sorte de déchirement. Dans une histoire de double-vie, donc d’inconscience amoureuse, ce qui est très amusant au début devient vite plus risqué et douloureux. Nous ne voulions pas qu’il y ait de jalousie par exemple, tout simplement parce qu’Antoine ne peut pas imaginer que Jérémie tombe amoureux d’une femme. C’est évidemment ce qui rend la tricherie, la tromperie plus facile. Pour nous, il s’agissait de traiter une histoire d’amour torturée, par le biais de la comédie !
Noémie Saglio : Jérémie se retrouve typiquement dans le genre de situation invivable sur le moment mais sur laquelle, dix ans après, nous jetons un regard plus paisible, en se disant « finalement c’était pas si grave ». Quitter quelqu’un, changer de vie, être trompé, c’est rude mais nous nous en remettons, ça fait partie de ce qui rend la vie excitante. Il y a de la grâce dans le changement.
Si nous devons parler de références, lesquelles citeriez-vous ?
Maxime Govare : En toute modestie, ce ton très cru et réaliste nous rapproche plutôt de la comédie américaine, celle qui nous fait rire comme dans les films de Judd Apatow. Noémie et moi sommes des trentenaires et avons clairement été élevés à ce style de films ! Ca nous a permis d’oser dire les choses par rapport à l’homosexualité.
Noémie Saglio : Nous aimons les comédies françaises aussi, mais quand il y a un côté "doux-amer", un petit grain d’originalité…
Votre portrait de la famille n’est pas lui non plus conventionnel. Les parents sont à la fois irrésistibles et terribles, notamment envers leur fille, la soeur de Jérémie...
Noémie Saglio : Oui, un petit côté Festen ! C’est tout simplement parce nous avons une famille comme tout le monde et qu’une famille, c’est parfois terrible non ?
Maxime Govare : C’est un sujet qui nous intéresse beaucoup et qui nous fait beaucoup rire. Nous voulions le traiter par un autre biais : dans cette famille, personne n’est homophobe. Tout le monde a accepté la nature de Jérémie, sa différence. C’est même la normalité de sa soeur, jeune maman, qui dérange les parents ! Donc le jour où Jérémie reconnait être tombé amoureux d’une fille, ça casse tout le modèle.
Noémie Saglio : Ca nous permettait d’aborder la thématique de la différence, quelle qu’elle soit : la peur d’avouer sortir de sa route ou du chemin que les autres vous ont tracé. C’est également ce qui arrive à Charles, l’ami et associé de Jérémie : il va tomber amoureux de Clémence, une fille qui ne correspond pas à ses canons habituels et c’est très difficile pour lui d’accepter ce coup de coeur...
Un mot aussi de votre mise en scène, à la fois élégante et dynamique...
Maxime Govare : Dés le départ, nous avons voulu engager Jérôme Alméras, un chef opérateur qui a travaillé sur des films de François Ozon ou Rachid Bouchareb...
Noémie Saglio : C’est aussi grâce à notre chef déco, Christian Marti qui a fait les décors de Jean de Florette, Gainsbourg, vie héroïque ou Un cœur en hiver de Claude Sautet. Donc oui : nous savions exactement ce que nous voulions en termes d’univers visuel pour le film et nous n’avons rien lâché…
Maxime Govare : En fait, au lieu de multiplier les décors, nous nous sommes concentrés sur quelques lieux essentiels comme l’appartement de Jérémie et Antoine ou le bureau de Jérémie et Charles. Cela nous a permis de trouver les bons endroits et de particulièrement y soigner la lumière ou les ambiances.
Noémie Saglio : L’histoire nécessitant pas mal de scènes posées, dialoguées, nous avons privilégié une mise en scène plus fluide, évitant par exemple les plans où les personnages sont assis, statiques. Ce qui d’ailleurs renvoie au vaudeville très présent dans les situations et les échanges... Il n’y a rien de pire que tous ces films de comédie où, dans chaque scène, les personnages commencent par s’asseoir sur un canapé pour discuter.
Avec aussi une partie du film tournée en Laponie.
Un petit plaisir de metteurs en scène ?
Maxime Govare : D’abord un plaisir d’écriture ! Le but du jeu était d’éviter ces scènes de fin où le héros court dans la rue et embrasse son amoureuse ou la retrouve à l’aéroport avant le générique de fin ! Nous voulions que le principe du "buddymovie" prenne tout son sens dans une sorte de quête initiatique, comme un court-métrage s’insérant dans le film. Ca nous faisait rire de catapulter Jérémie et Charles en Laponie ! Après, reconnaissons que c’est une vraie contrainte : 2 heures de jour quotidiennes, la température qui passe de -30° à +5 du jour au lendemain avec un paysage qui change en temps réel ! Mais c’était la dernière semaine de tournage et une belle façon de terminer l’aventure...
Noémie Saglio : Nous tenions vraiment à sortir nos personnages de leur quotidien, de leur zone de confort. Ces deux mecs doivent assumer de changer alors qu’ils n’ont plus 15 ans. Ils doivent assumer. C’est un voyage initiatique, un "coming of age" que leur départ en Laponie symbolise très bien. Les personnages doivent se débarrasser de tout ce qu’ils connaissent. En Laponie, l’hiver, il fait tout le temps nuit, nous ne savions plus où nous étions. Charles dit même "je sais
plus si c’est l’heure de déjeuner ou de dîner", et pour nous ça symbolise bien ce que nous ressentons pendant les périodes de grand chamboulement.
Justement : est-ce que le film aujourd’hui correspond à celui que vous aviez imaginé ?
Maxime Govare : Nous le regardons terminé avec beaucoup d’affection même si, honnêtement,
nous voyons surtout les choses que nous aurions aimé faire différemment ! Mais tout aussi franchement, au bout de sept mois de post-production, nous sommes plutôt satisfaits et heureux de voir que les premiers spectateurs rient aux endroits où nous espérions qu’ils rient. Et même à certains moments où nous ne l’espérions pas !
Noémie Saglio : Forcément, il nous arrive d’avoir des regrets de scènes que nous aurions pu écrire ou ajouter mais partant de ce principe, nous mettons dix ans à faire un film ! En résumé, notre seule ambition était de faire une comédie douceamère qui ne soit pas "bas de plafond" mais drôle, jolie et émouvante. Au final, grâce à nos acteurs, à la bande que nous avons créée en sortant la plupart des comédiens de leurs registres habituels, j’espère et je crois que nous y sommes parvenus...
Les Personnages.
Jérémie. Pio Marmaï.
La difficulté était de dessiner un personnage qui parle et ressemble à tout le monde mais qui soit original. Durant toute une partie de l’histoire, Jérémie subit les événements. Il a toujours un train de retard : c’est pourquoi il est en train de courir dès le générique ! C’est un garçon qui doute beaucoup mais quand les éléments de sa vie s’alignent enfin, il est hyper décidé. Mais dans le même temps, c’est un gaffeur incroyable, qui essaye constamment de rattraper sa dernière bourde, comme un jongleur ! Il s’est entouré de gens formidables (son copain, son meilleur ami, sa famille), qui ne peuvent pas le soupçonner de mensonge. Il est d’ailleurs le premier surpris d’être entrainé dans cette double vie... Physiquement, nous l’avons imaginé comme un garçon dont les garçons et les filles pourraient tomber amoureux, une sorte de caméléon que chacun interprète à sa façon en le voyant, le Hugh Grant français ! Pour nous, Pio était l’acteur parfait : il a la plastique et le talent ! C’est un excellent comédien, un travailleur forcené, toujours dans la proposition, l’invention et qui plus est très doué pour la comédie, alors que nous l’attendons moins sur ce terrain là !
Antoine. Lannick Gautry.
Nous avions besoin d’un personnage sympathique, sensible mais qui à un moment du film ne "vole" pas trop la vedette à l’histoire d’amour naissante entre son copain et une jeune femme. L’idée pour Antoine, c’était une sorte de beau-gosse nonchalant, un garçon doux qui accepte de prendre des coups sans les rendre. C’est un type très sain, le mec bien droit dans ses bottes dont on est certain qu’il n’aura aucune peine à retrouver l’amour... Nous avons beaucoup insisté sur la tendresse qui unit le couple qu’il forme avec Jérémie : ce son des amants mais aussi des amis.
Et dans ce couple, c’est lui le plus posé, le plus sage.
Nous nous disons que jamais il n’aurait pu lui arriver ce qui arrive à son compagnon. Antoine est sans doute le personnage qui porte le moins la comédie dans le film et Lannick le joue d’une façon à la fois très classique et élégante, dans la tristesse quand il le faut mais toujours dans la sobriété.C’est un acteur très intelligent, sans doute le plus naturel avec qui nous avons jamais travaillé.
Charles. Franck Gastambide.
Nous avons beaucoup hésité dans la forme que pouvait prendre Charles ! Devait-il être Noir, Arabe, roux ? Nous l’imaginions en tout cas physiquement assez différent de Jérémie, comme dans ces comédies américaines où l’on oppose les personnages principaux pour rendre le duo plus intéressant. Charles c’est le gars un peu lourd, le "dragouilleur" de prime abord assez basique mais dont on a de suite envie de devenir le pote ! Vous pouvez lui faire dire les pires horreurs : d’un sourire il efface tout cela. Face à Jérémie qui va se débattre dans le mensonge, nous avions besoin d’un type qui au contraire n’a pas de filtre et balance les choses comme elles viennent. Mais au moment où il faudra être dans l’émotion ou la mise au point radicale, (vis-à-vis de son ami), il sera aussi au rendez-vous. L’évidence que Franck Gastambide devait absolument jouer Charles nous est apparue le soir des Césars 2012 quand il est monté sur scène en smoking ! Il était élégant, charmeur, beau gosse : nous savions que toutes les filles seraient "in love" ! Il a juste fallu lui faire accepter qu’il pouvait être légitime dans le costume et les costumes de Charles, notamment en face de Pio qu’il considère comme un très grand comédien. Quand nous l’avons rassuré, les choses ont été très faciles, au-delà de toutes nos espérances...
Adna. Adrianna Gradziel.
Adna est un personnage qui représente la sexualité et l’imprévu dans le film. C’est la fille avec qui Jérémie couche pour "la Toute première fois" ! Notre idée était qu’elle soit étrangère pour qu’elle ne puisse par comprendre certaines choses, qu’elle ait une vraie naïveté par rapport aux événements. Adna est aussi quelqu’un de nature, de sincère, qui refuse le mensonge. Elle correspond en cela aux clichés que l’on peut avoir sur les nordiques ! Dans le film, Adna n’apparait que dans les moments où Jérémie va la voir : nous n’avons pas imaginé de scènes de sa vie à elle. C’est avant tout la promesse d’une tentation pour lui, la représentation de ses dilemmes. Du coup, le spectateur est dans la même situation que Jérémie : il la connait à peine, il ne sait rien de sa vie mais il va tout de même devoir décider si elle vaut le coup de tout bouleverser... Pour l’actrice qui incarnerait Adna, nous avons organisé des castings au Danemark, en Suède et aux Etats-Unis mais nous ne voyions que des jolies filles un peu Barbie, trop sages.
En fait, Adrianna était tout simplement une de nos amies communes et nous avons réalisé qu’elle correspondait exactement au personnage. C’est son premier film, elle vient du mannequinat et a suivi le cours Florent. Elle illumine l’écran par sa beauté, son naturel et son caractère qui, dans la vraie vie, est aussi cash et naturel que celui du personnage qu’elle incarne.
Clémence. Camille Cottin
C’est typiquement le genre de personnage qui n’a pas énormément de scènes mais qui prend toute la place et marque les esprits ! Clémence est l’assistante de Jérémie et Charles, pour qui elle ressent une attirance secrète, camouflée par une attitude agressive et défensive. Au fur et à mesure du film, elle devient de plus en plus jolie, ce qui correspond aussi à l’évolution de la façon dont Franck la regarde et la trouve séduisante. C’est une femme à part entière : un jour de bonne humeur, le lendemain cassante. Mais c’est surtout une fille totalement immature qui a une façon bien à elle de montrer ses sentiments. Son histoire avec Franck est à l’inverse de celle entre Jérémie et Adna, sans aucun romantisme, c’est aussi une affaire de phéromones ! Mais c’est une histoire d’amour quand même ! Camille était une évidence pour le rôle, du fait de sa collaboration avec Noémie sur Conasse pour Canal + mais nous avons voulu tout de même lui faire passer des essais, en concurrence avec d’autres filles. Au final, elle a quand même raflé la mise ! C’est une véritable Rolls de comédienne ou plutôt un 4X4 : pétaradante, impressionnante de puissance et puis d’un coup, dans la douceur et l’émotion. Tout passe dans un regard sur une scène bien précise, plus minimaliste, mais elle le fait formidablement... Pour nous, c’est une des rares comédiennes françaises qui utilise tout son corps pour faire passer sa gamme de jeu sans aucune pudeur alors que dans la vie, c’est plutôt quelqu’un de timide et de bien éduqué. Là où d’autres seraient ridicules, elle est dans la justesse...
Sources :
http://www.unifrance.org
Mon opinion
Premier film pour Noémie Saglio et Maxime Govare. Un long-métrage qui fait un peu du sur place tant les situations qui s'enchaînent sont attendues et improbables. Les repas avec la famille, entre autres. "L’homosexualité était pour nous un point de départ dans le scénario, afin d’aborder un thème plus universel. Dès le départ, nous avons écrit en voulant raconter une histoire d’amour un peu atypique et plus complexe qu’il n’y paraît ", a déclaré Maxime Govare.
L'idée est originale mais n'évite pas le film de sombrer dans des clichés avec des dialogues d'une incommensurable banalité. Dommage.
Les acteurs font ce qu'ils peuvent, Pio Mamaï le premier. Lannick Gautry sauve son épingle du jeu. Frank Gastambide joue le dragueur forcené. Camille Cottin tire quelques sourires.
Bref pas vraiment la comédie escomptée.