Ah ! Ils sont nombreux, les soutiens de la dernière heure à s'être réjoui de la victoire de Syriza en Grèce. Pour une politique de redistribution en Grèce, mais pour continuer l'austérité en France. Bref, on le sait, les politiques n'ont pas peur du ridicule et ne sont pas à une contradiction prés. Bizarrement, parmi ces partisans opportunisme, beaucoup se sont dits "désenchantés" avant même l'investiture de Tsipras au poste de Premier Ministre.
La faute de Tsipras ? Avoir pris comme allié au gouvernement un parti souverainiste de droite. L'alliance de la carpe et du lapin ! Contre-nature, s'insurgent les biens-pensants qui sont pour que la gauche radicale arrive au pouvoir à condition qu'elle mène la même politique que ses prédécesseurs.
Eh bien, non ! Tsipras s'allie avec la droite nationaliste parce qu'il fait de la politique, que les électeurs l'ont élu sur un programme et qu'il compte, du moins pour l'instant, mettre en oeuvre son programme. Lequel ? en premier lieu renégocier la dette avec l'Union Européenne et ensuite résoudre les inégalités sociales.
Quel choix d'alliances Tsipras avait donc alors Tsipras ? Le Parti Communiste Grec (KKE) ? En principe, c'était le partenariat le plus logique sur le papier, mais le KKE est un vieux parti sectaire qui se revendique encore du marxisme léninisme et qui refuse toute alliance avec les autres formations politiques si elles ne se font pas autour de son programme. Un petit parti de centre gauche, To Potami ? cela aurait été renier le programme de Syriza dès le départ, puisqu'ils se sont toujours proclamés pour l'austérité et ont voté tous les plans de rigueur, tous plus drastiques les uns que les autres. D'un point de vue stratègique et idéologique, c'était donc impossible. Restaient donc le Parti des Grecs Indépendants, de droite donc, très à droite même sur certains sujets, mais qui sur celui qui intéresse Syriza au plus haut n'a jamais varié de position : le refus systèmatique de l'austérité.
En s'alliant avec les Grecs Indépendants, Syriza a fait un choix politique et envoyé un message clair à l'Union Européenne, la Banque Mondiale, le FMI et accessoirement Angela Merkel : désormais la Grèce a un gouvernement qui ne se pliera à toutes les injonctions libérales, il faudra faire des compromis lesquels ne pourront se faire sur le dos des Grecs.
De la politique, Alexis Tsipras a continué à en faire avec toutes les décisions qu'il déjà prises en quelques jours. Celle de nommer un économiste radicalement opposé au paiement de la dette comme ministre des finances, nouveau message envoyé à Bruxelles. Celle de suspendre les privatisaitions en cours, notamment celles des ports de Salonique et du Pirée et de stopper ainsi le démantèlement de l'industrie grecque. Celle de réembaucher les fonctionnaires illégalement licenciés par le gouvernement précédent. Celle d'augmenter de façon significative le salaire minimum.
Bref, nul ne sait si Tsipras réussira tant les problèmes qui sont en face de lui sont énormes. Nul ne sait s'il gagnera face à des puissances financières et économiques immenses et déterminés à continuer de faire main basse sur les richesses de l'Etat grec. Mais ce que l'on sait, c'est que Tsipras fait de la politique et non plus de l'économisme, que Tsipras met en application une autre vision du monde, et que rien que cela, c'est une immense bouffée d'air pur dans un paysage politique européen dévasté et déprimant.