Date de sortie 31 décembre 2014
Réalisé par Patrice Leconte
Avec Christian Clavier, Carole Bouquet, Valérie Bonneton,
Rossy de Palma, Stéphane De Groodt, Sébastien Castro,
Arnaud Henriet, Christian Charmetant
Genre Comédie
Production Française
Scénario, adaptation, dialogues de Florian Zeller
À l'origine, Une heure de tranquillité est une pièce de Florian Zeller qui l’avait mise en scène en 2013 au Théâtre Antoine avec Fabrice Lucchini dans le rôle de Michel. La pièce fut un succès tant critique que public.
Synopsis
Michel Leproux (Christian Clavier), passionné de jazz, vient de dénicher un album rare qu’il rêve d’écouter tranquillement dans son salon. Mais le monde entier semble s’être ligué contre lui.
Nathalie, (Carole Bouquet) sa femme choisit justement ce moment pour lui faire une révélation inopportune.
Son fils Sébastien (Sébastien Castro) débarque à l’improviste. Son voisin inondé frappe à la porte, et Maria (Rossy de Palma) sa bonne espagnole ne cesse de le harceler…Quant à Elsa, (Valérie Bonneton) sa maîtresse, elle menace de révéler à sa femme leur liaison.
Sans parler du fait qu’il s’agit ce jour-là de la fameuse Fête des Voisins…
Manipulateur, menteur, Michel est prêt à tout pour avoir la paix. Est-il encore possible, aujourd’hui, de disposer d’une petite heure de tranquillité ?
Entretien avec le réalisateur. Patrice Leconte
Racontez-nous la genèse du film.
Marc Missonnier et Olivier Delbosc, les producteurs d’Une promesse, mon dernier long-métrage, étaient convaincus que la pièce de Florian Zeller pouvait donner matière à un film. Je suis allé la voir jouer au théâtre Antoine et, quoique conscient de la nécessité d’un gros travail d’adaptation, je suis aussitôt tombé d’accord avec eux.
Qu’est-ce qui vous séduisait dans ce projet ?
Il me touchait. Très égoïstement, je m’y suis retrouvé. Hyperactif depuis tant et tant d’années et faisant délibérément un tourbillon de chacune de mes journées, j’aspire à me poser, comme en rêve le personnage principal joué par Christian Clavier : ne rien faire durant une heure; prendre le temps de rêvasser, fumer une cigarette et regarder passer les nuages... Nos vies, spécialement dans les grandes villes, sont frénétiques.
Une heure de tranquillité brosse le portrait d’un formidable égoïste… Peu lui importent les révélations que sa femme souhaite lui faire, les états d’âme de sa maîtresse ou ceux de son voisin. Il n’a qu’une idée en tête : écouter cet album de jazz, Me, Myself and I – soit dit en passant, un titre formidable - d’un certain Neil Youart qu’il recherchait depuis des années…
Il m’évoque le personnage d’une pièce de Françoise Dorin qu’interprétait Paul Meurisse de manière épatante; un portrait très brillant, tout à fait dans la tradition de Molière. En revisitant ce thème et sans plagier qui que ce soit, Florian Zeller brosse celui d’un autre égoïste – idéal, réjouissant et sensationnel - qui peut nous servir à tous de paratonnerre : ce type cristallise tous nos défauts. On peut se moquer de lui : on ne s’en sent pas moins secrètement montré du doigt et on se réjouit d’autant plus de ses ennuis qu’il est odieux. S’il était gentil, cela ne nous ferait pas rire.
Avec ses grands yeux sombres, la petite Philippine qui l’observe durant tout le film est un peu notre conscience à tous…
C’est un personnage très important : elle est la seule à lui tendre un miroir pour qu’il se voie vraiment. C’est grâce à elle et à son regard qu’il a finalement l’idée d’aller écouter son disque avec son père qui l’a initié au jazz lorsqu’il était enfant. Cette démarche sentimentale le rachète de tout ce qu’il a pu exprimer de détestable.
Vous dites souvent ne pas chercher à rendre votre époque à l’écran. Au-delà de la comédie, Une heure de tranquillité reflète pourtant l’air du temps : le rite de la Fête des Voisins, l’ouvrier portugais qui se fait passer pour polonais…
J’ai souvent, c’est vrai, la volonté d’échapper à la réalité du moment. Mais il arrive qu’elle me rattrape : sous couvert de comédie, Viens chez moi, j’habite chez une copine et, plus tard, Une époque formidable, de Gérard Jugnot, étaient des comédies témoins de leur temps. À sa manière, Une heure de tranquillité l’est également. Et ça ne me déplaît nullement.
Fabrice Luchini, qui interprétait le rôle de Michel dans la pièce, a fait un tabac au théâtre. On aurait pu s’attendre à ce qu’il reprenne son rôle…
En écrivant l’adaptation, Florian Zeller était convaincu qu’il adorerait le projet et, de mon côté, je me régalais à l’idée de le retrouver. Nous avions tourné un film ensemble Confidences trop intimes – avec Sandrine Bonnaire – et nous nous étions très bien entendus. Mais Fabrice a finalement préféré renoncer au film – il trouvait qu’il avait déjà passé trop de temps avec ce personnage. Lorsqu’il a déclaré forfait, nous avons immédiatement pensé à Christian Clavier, avec qui je rêvais de retravailler depuis Les Bronzés 3. Christian a adoré l’écriture de Florian Zeller et nous a aussitôt donné son accord. En posant une condition : il ne voulait pas que le film soit un show Clavier et tenait à l’idée d’un film de groupe. J’ai aimé sa démarche : il y a quelque chose d’étincelant dans le personnage qu’il interprète et qui reste le personnage central mais les acteurs qui l’entourent, Carole Bouquet, Valérie Bonneton, Rossy de Palma, Stéphane De Groodt…, ne sont pas des clowns blancs.
Le film est très différent de la pièce…
La trame est évidemment la même mais ce qui n’existait qu’en filigrane dans le spectacle a été considérablement développé. Certains personnages, comme celui du fils, joué par Sébastien Castro, ont foncièrement changé, tout comme la famille de Philippins, l’ouvrier portugais, la femme de ménage, la fête des voisins... Et puis, au lieu de se passer dans un salon, le film se déroule dans un appartement, avec des chambres, des couloirs, des paliers, des escaliers, un ascenseur... C’est une formidable aire de jeu pour un réalisateur. On n’est plus du tout au théâtre.
Une heure de tranquillité renoue avec Les Fâcheux de Molière et l’esprit des comédies de Feydeau. Mais le film a aussi un côté très british…
Je prends cela comme un compliment magnifique. Sans renier la tradition de la comédie française, sentimentalement et artistiquement, je me sens plus proche de l’humour anglo-saxon.
Valérie Bonneton
Revenons aux "fâcheux" du film, tous "affreux", tous coupables de trahison, mais finalement tous très attachants.
Ils sont tous un peu bord cadre mais je ne vois pas qui, parmi eux, on pourrait détester. J’ai toujours été incapable de mettre en scène des gens que je n’aimais pas. Je suis ému par Nathalie, le personnage de Carole Bouquet, confondu de tendresse pour Elsa, celui de Valérie Bonneton, complètement larguée à force d’aimer un type qui se fiche d’elle. Je me sens, moi aussi, prêt à dépanner Pierre, que joue Christian Charmetant, un raté fini mais vraiment attendrissant. Et même Pavel, qu’interprète Stéphane De Groodt, qui organise la Fête des Voisins et qui est un fâcheux effarant, me touche. C’est Séraphin Lampion dans les albums de Tintin; un emmerdeur de première, mais avec une telle puissance de conviction, un tel enthousiasme !
Vous le rendez presque méconnaissable.
Je trouvais qu’on l’avait beaucoup vu récemment et j’avais envie qu’il change de tête. Ce n’est pas grand-chose : une paire de lunettes avec une monture sécurité sociale qui lui fait un drôle de regard, de la gomina dans les cheveux… C’est merveilleux lorsque les comédiens acceptent de jouer le jeu.
Avec Christian Clavier, Carole Bouquet, Valérie Bonneton, Rossy de Palma dans la distribution, on retrouve votre penchant pour les acteurs populaires.
J’adore les acteurs ! Et c’est tellement confortable de travailler avec ceux qui sont connus : ils vous font gagner un temps fou sur le scénario. Lorsqu’une porte s’ouvre et que vous voyez entrer Carole Bouquet, vous n’avez aucun besoin de raconter qui elle est ni d’où elle vient : elle est le personnage. Tout va très vite. C’est beaucoup plus difficile avec un comédien inconnu.
Parlant de rythme, le film a un tempo incroyable.
Je cadre toujours moi-même mes films. Même si je n’ai plus tout à fait 25 ans, j’ai décidé de tourner celui-ci entièrement caméra à l’épaule. Je voulais que la caméra soit un des personnages du film, qu’on ne s’installe pas dans le confort d’un tournage bourgeois – même si on filmait des bourgeois – que ça bouge, que ça aille à toute berzingue, qu’on ait presque le sentiment d’un « reportage ».
Pour éviter que chaque plan nécessite des heures d’installation, avec mon chef opérateur, Jean-Marie Dreujou, nous avons pré-équipé tout l’appartement, qui avait été reconstitué en studio. Lorsque nous tournions dans la salle de bains, nous appuyions sur un bouton et, selon l’axe dans lequel nous étions, nous engagions telle ou telle lumière. Lorsque nous tournions dans une autre pièce, pareil.
Et J’avais exigé des acteurs qu’ils sachent leur texte au rasoir. Il nous est arrivé de tourner cinquante-deux plans dans une seule journée ; trois prises, on en refait une petite, et hop !, on passe au plan suivant. On a réalisé le film en cinq semaines et j’ai adoré cette énergie incroyable même si, au final, j’en suis sorti sur les rotules.
Comment réussir à aller à 250 à l’heure sans perdre de vue les enjeux humains, émotionnels et sentimentaux qui animent de façon très palpable les scènes et les personnages ?
C’est précisément ce qui est intéressant : si l’on va trop vite en besogne, les personnages deviennent des marionnettes et je ne trouverais aucun intérêt à en tirer les fils. Ce qui m’anime, en dépit des contraintes du rythme et du genre – ici la comédie –, c’est de continuer à filmer les gens ; des personnages de fiction, certes, mais dans lesquels on peut toujours se reconnaître; dotés d’une vraie humanité. S’ils s’agitent en vain devant nous sans qu’on puisse s’identifier à eux, c’est raté. Rossy de Palma, qui interprète la femme de ménage espagnole, est extravagante, elle est baroque et surréaliste ; on pourrait la croire sortie d’un film de Pedro Almodóvar et, malgré tout, elle est vraie. Je ne pourrais pas mettre en scène un film qui serait déconnecté de la vraie vie.
Revenons à la vitesse à laquelle file le film. Les personnages sont tellement pris par les événements qu’ils n’ont pas le temps de s’apitoyer sur eux-mêmes… Et encore moins sur les autres.
Oui, grâce à elle, on reste toujours à la lisière des émotions. Sans me comparer à eux, ce qui serait d’une prétention folle, Cukor et Capra étaient des cracks en la matière. Capra chronométrait ses prises. Si elles duraient quinze secondes, il demandait à ses comédiens d’essayer de les jouer en douze. Ceux-ci s’exécutaient tout en restant dans le sentiment de la scène, et cela confère à ses films un rythme incroyablement enlevé. Les émotions des héros, leur brièveté, font contrepoint aux moments de pure comédie et donnent du fond et de la profondeur au propos.
La musique, signée d’Eric Neveux, est très présente.
Ce n’était pas facile d’en imaginer une pour ce film et, du reste, tout le monde était persuadé qu’il y en aurait très peu. Eric, avec qui je travaille pour la première fois, et moi, étions, au contraire, convaincus qu’elle pouvait renforcer le rythme, déjà musical, de l’histoire. Je ne peux pas imaginer faire des films sans musique, celui-ci en est une preuve de plus.
Un mot sur le montage ?
Je monte toujours mes films assez vite. Joëlle Hache, la monteuse avec qui je travaille depuis des années, et moi, montons en parallèle du tournage. La difficulté, dans le cas d’Une heure de tranquillité, était la peur de manquer de recul une fois le film terminé. Nous avions peu de temps.
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Sources :
http://medias.unifrance.org
Mon opinion
Pour ce film de commande, inspiré de la pièce éponyme de Florian Zeller, Patrice Lecomte se cogne aux murs de l'appartement dans lequel se situe pratiquement toute la durée de ce "court" long-métrage.
À peine 1h20, largement suffisant, pour constater qu'à aucun moment le réalisateur ne trouve le rythme indispensable afin de ne pas verser dans le vide total. Les portes qui claquent vous empêcheront peut-être de sombrer dans un profond sommeil.
Les talents de Fabrice Luchini, Christiane Millet et Chloé Lambert qui excellaient au théâtre ne trouvent aucun écho dans le très pâle reflet de ce que voudrait être le film.
Seul, Stephane de Groodt réussit le tour de force d'arracher de rares sourires.
Grosse déception pour ce dernier film que je vois en 2014. Là où je pensais m'amuser, l'ennui m'a envahi.