Après avoir été adopté en Conseil des Ministres le 30 juillet 2014, et par l'Assemblée Nationale le 14 octobre 2014, le texte du projet de loi relatif à la " Transition énergétique pour la croissance verte " a été confié au Sénat. Les deux commissions les plus directement intéressées - Affaires économiques et Développement durable - ont pris le temps d'effectuer de multiples auditions, et d'organiser des tables rondes consacrées aux travaux publiés par les " Think tanks " sur le thème de la transition écologique, et les effets des moteurs diesel sur la santé et l'environnement.
Le rapporteur, Louis Nègre, Sénateur des Alpes-Maritimes, Rapporteur de la Commission du Développement Durable (Présidée par Hervé Maurey -Sénateur UDI de l'Eure) a ainsi entendu plus de 180 personnes lors de ses auditions, et examiné environ 450 amendements.
Un changement de modèle complet
La Commission du Développement Durable en a conclu que ce projet de Loi dépasse le simple cadre des textes énergétiques traditionnels, et qu'il ne vise pas à " un simple rééquilibrage du mix énergétique, mais bien à un changement de modèle complet, qui va de l'économie à nos comportements, à nos façons de nous déplacer et de consommer". Un projet attendu par les Français (selon un récent sondage, 74% des Français se sentent personnellement concernés par la transition énergétique) et dont l'objectif majeur est de préserver la planète pour les générations futures très menacées par le réchauffement climatique confirmé par le dernier rapport du GIEC et lié aux énergies carbonées.
Du concret et du pragmatisme
Afin de faciliter l'action des différents acteurs des filières industrielles vertes, des acteurs économiques, des collectivités et des élus, pour qu'ils puissent contribuer pleinement et dans un cadre clair au développement économique et à la croissance verte sans entraves inutiles, la Commission a voulu " rendre le cadre normatif de la transition aussi simple et lisible que possible dans les propositions d'amendements " et rendre les dispositions du projet de loi " réellement opérationnelles et accessibles ", explique le Sénateur Louis Nègre.
Des mesures nouvelles
Ainsi concernant les mobilités propres et la qualité de l'air les amendements proposent :
- que soit inclus un volet " développement des transports " dans la programmation pluriannuelle (PPE) de l'énergie pour tenir compte du rôle majeur que joue le secteur des transports en matière d'énergie : 35 % de la consommation d'énergie, 27 % des émissions de gaz à effet de serre ;
- que les maires puissent avoir le droit d'étendre les limitations de vitesse inférieures à 50 km/h à l'ensemble des voies de la commune ;
- que les autorités organisatrices de la mobilité établissent un schéma de développement des aires de covoiturage, près de gares par exemple;
- qu'outre l'étude de l'opportunité de réserver des voies au transport collectif et au covoiturage, soit également étudiée l'utilisation des bandes d'arrêt d'urgence par les transports collectifs aux heures de pointe.
- qu'un bilan des émissions de particules fines dans le secteur des transports, soit fait, en intégrant les émissions liées à l'abrasion des plaquettes et des disques de freins ;
Des dispositions complétées ou assouplies :
La Commission a par ailleurs :
- assoupli l'obligation pour les entreprises d'élaborer un programme d'action pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et de polluants atmosphériques en particulier par l'adoption d'une date point de départ avancée à 2010 plutôt que 2015 afin de ne pas pénaliser celles qui ont déjà volontairement fait des efforts depuis la loi Grenelle II ;
- supprimé l'obligation pour les entreprises de définir des plans de mobilité. Seul est maintenu leur caractère incitatif et la possibilité d'élaborer des plans interentreprises. Dans les zones soumises à un PPA (plan de protection de l'atmosphère), le préfet pourra toutefois les rendre obligatoires pour les entreprises de plus de 250 salariés ;
- supprimé l'écodiagnostic pour les ventes de véhicules d'occasion lequel est transféré au contrôle technique obligatoire qui, mieux contrôlé par l'Etat, est renforcé ;
- supprimé la durée limitée de création des zones à circulation restreinte (ZCR). La garantie du transport de personnes et l'identification des véhicules circulant en ZCR sont ajoutées ;
- précisé la définition du covoiturage : au moins deux passagers ;
Lutte contre le gaspillage et économie circulaire
Concernant le gaspillage et l'économie circulaire la Commission demande la prise en compte de mesures nouvelles telles que :
- l'inscription de la définition de l'obsolescence programmée établie par l'Ademe dans le code de la consommation et contrôle de son respect par la DGCCRF ;
- ainsi que l'inclusion dans les cahiers des charges des éco-organismes de l'expérimentation de mécanismes de consignes.
D'autres dispositions sont complétées ou assouplies. La Commission demande ainsi :
- la suppression de l'affichage obligatoire de la durée de vie des produits dont la valeur est supérieure à 30 % du Smic, mais possibilité d'expérimentation pour les entreprises volontaires ;
- la généralisation du tri à la source des biodéchets;
- la suppression de l'interdiction de la vaisselle jetable, mais avec la nécessité d'instaurer un tri à la source à partir de 2018 ;
- le maintien de la suppression des sacs plastiques de caisse en 2016, mais report à 2018 de la suppression des sacs plastiques d'emballage des produits frais, notamment pour permettre l'émergence d'une filière alternative biosourcée en France ;
- la suppression de la nouvelle contribution financière pour permettre aux filières REP
( Responsabilité Elargie des Producteurs) de faire de la prévention en aval et mise en place d'un système de bonus concerté;
- l'extension de la filière de recyclage papier à de nouveaux producteurs de déchets papier, en excluant la presse d'information politique générale. Extension qui sera mise en oeuvre au prochain réagrément de la filière ;
- l'exclusion de la maroquinerie de la filière REP textile et report du reste de l'extension prévue au prochain réagrément de la filière ;
- et la réécriture de l'article prévoyant un rapport sur la réversibilité des décharges ;
Energies renouvelables
Enfin, concernant les énergies renouvelables, la Commission demande :
- que la définition des territoires à énergie positive vise les territoires qui produisent au moins autant qu'ils ne consomment d'énergie ;
- qu'un ajustement sur les intrants autorisés dans la méthanisation soit effectué;
- et que, concernant les réseaux de chaleur, la consolidation de la compétence communale soit maintenue et consolidée.
- Enfin un recensement des réseaux de chaleur présents sur le territoire national est demandé.
Tous ces différents amendements proposés par la Commission du Développement Durable du Sénat vont être discutés par les Sénateurs à partir du 10 février 2015. Les débats devraient durer environ deux semaines. Le texte sera ensuite transmis au Parlement pour discussion et adoption définitive au printemps.
Hervé de Malières