Retrouvez l'interview de J-C Cambadélis parue ce lundi 26 janvier dans Le Parisien !
La nette victoire de Syriza en Grèce vous a-t-elle surpris ?
Jean-Christophe Cambadélis, premier secrétaire du PS : C’est un raz-de-marée contre l’austérité. Le peuple grec ne supportait plus la politique menée depuis des années qui a abouti à ce que 25% de la population vive sous le seuil de pauvreté. Il était illusoire de croire que les Grecs plébisciteraient dans les urnes cette politique qui les vidait de leur sang.
Jean-Luc Mélenchon promet le même avenir au PS français qu’à son homologue grec, le Pasok. Que lui répondez-vous ?
Qu’il faut être à la hauteur du moment plutôt que de se lancer dans des querelles subalternes qui laisseraient à penser que le seul but du vote grec est de voir le Parti socialiste disparaitre.
Quelle va être la conséquence de ce vote en Europe ?
Alexis Tsipras (NDLR : le leader de Syriza), appuyé par le peuple grec, va renforcer le camp de ceux qui veulent réorienter la construction européenne et mettre définitivement fin à l’austérité. La nouvelle politique européenne doit maintenant faire plus pour la croissance et l’emploi.
Le PS va-t-il appuyer la demande de Syriza de renégocier la dette grecque ?
Le PS n’est pas pour étrangler le peuple grec. Les socialistes français ont toujours estimé que la troïka (BCE, FMI, Banque mondiale) était illégitime et qu’elle appliquait à la Grèce des solutions insupportables. Tout ce qui peut soulager le fardeau du peuple grec doit être envisagé, discuté et négocié.
Vous donnez l’impression de soutenir Syriza alors que jusque-là le PS était plus proche de son homologue grec, le Pasok ?
Le Pasok a été défait en novembre 2011 lorsque Mme Merkel et M. Sarkozy ont interdit au Premier ministre Georgios Papandréou (leader du Pasok) d’organiser un référendum sur l’euro. Le peuple grec a été blessé de se voir imposer par la France et l’Allemagne les modalités de son action. Peu après, le Pasok en a payé le prix. Dans le même temps, Syriza s’est recentré, acceptant de rester dans l’euro et prenant ses distances avec les positions extrêmes. Il était logique que le parti de Tsipras occupe la place du Pasok avec les thèmes qui étaient les siens en 1974. (NDLR: fin de la dictature) Toutefois le Pasok fait mieux que les 3% qu’on lui promettait. C’est toute la gauche qui progresse.
Jean-Luc Mélenchon rêve d’une fédération de toute la gauche de la gauche incluant les écologistes pour balayer le PS…
La Grèce n’est pas la France. L’histoire du PS est différente de celle du Pasok et celle de Mélenchon n’est pas identique à celle de Tsipras. Ce n’est pas un meeting à Japy (à Paris) qui fonde une plate-forme commune et des candidats communs. Je fais observer qu’à la différence de la Grèce il y a en France un parti d’extrême-droite qui est aujourd’hui à près de 30%. Parier sur la destruction du PS créerait les conditions d’un débat droite – extrême droite et marginaliserait pour longtemps les gauches et les écologistes.
Quel rôle peut jouer François Hollande à partir de cette nouvelle donne ?
Cette élection place François Hollande en intercesseur. Il peut parler aux deux camps : les tenants de l’austérité et ceux qui s’y opposent. Dans le nouveau statut qui est le sien depuis les événements dramatiques du 7 janvier, il a là un nouveau rôle en Europe, difficile mais possible.
Propos recueillis par Philippe Martinat