"Silence" Zoulikha Bouabdellah présentation 2014
"Silence"
Une oeuvre de l'artiste Zoulikha Bouabdellah porte le nom de "Silence". Dans son installation, l’artiste née en 1977 à Moscou et ayant grandi à Alger avant de rejoindre la France en 1993 en raison de la guerre civile, présente des tapis de prière dont la découpe circulaire offre une ouverture au sol sur lequel reposent des escarpins dorés. " Silence " à été créée en 2007-2008 et à été montré à plusieurs reprises aux États-Unis, en Allemagne, et tout récemment en France
Un silence assourdissant
Dans l'exposition collective "Femina ou la réappropriation des modèles" présentée au Pavillon Vendôme à Clichy la Garenne, cette oeuvre figurait. Une alerte récente de l'artiste Orlan signale le retrait de la pièce. Zoulikha Bouabdellah et Christine Ollier, commissaire générale, « ont choisi de retirer la pièce Silence afin d’éviter toute polémique et récupération au sujet de la présentation de cette installation qui ne représente aucun caractère blasphématoire ».
Selon cette source que je n'ai pas été en mesure de recouper : « Une association de confession musulmane aurait fait pression auprès des responsables de la mairie, pour obtenir le retrait de l’œuvre. La mairie a cédé à ces pressions et s’est désolidarisé de l’exposition si l’œuvre devait être présentée. »
Christine Ollier, commissaire générale de cette exposition, explique :
"D'un commun accord avec l'artiste, en pleine possession de son droit moral qu'elle exerce ici par sa volonté de retrait, nous avons souhaité retirer cette pièce dans le contexte actuel de tension émotionnelle, les conditions du dialogue n'étant malheureusement pas réunies. Cette exposition est dédiée à toutes les femmes dans le monde qui ont lutté et celles qui luttent encore pour jouir de leur liberté. Ce choix n'est pas un recul mais un désir d'éviter tout amalgame que pourrait susciter une mauvaise compréhension de notre éthique intellectuelle et du propos de cette exposition, qui veut rendre compte des différents contextes socioculturels dans lesquels les femmes artistes doivent, si elles le peuvent, s'exprimer."
Réduite au silence
"Silence" Zoulikha Bouabdellah présentation 2008
A défaut de pouvoir étayer formellement les conditions de ce retrait, force est de constater que l’œuvre elle-même "marque" la liberté dont elle a bénéficié depuis sa création et l'empêchement dont elle fait l'objet aujourd'hui.
Si l'on exclue provisoirement la réflexion sur une décision politique à vérifier et ce dans un contexte local mouvementé d'élections municipales récemment annulées, c'est vers l'artiste et la commissaire d'exposition que vont mes pensées. Loin de moi l'idée de jouer les donneurs de leçons au moment où la solidarité aux valeurs de la liberté d'expression s'exprime avec force. Particulièrement attaché à la parole de l'art, sa réduction au silence par ses propres promoteurs me rend l'évènement plus sensible encore. La destruction d'oeuvres d'artistes contemporains, souvent évoquée dans ce blog, jalonne l'histoire mouvementée d'un art vivant immergé dans les tensions de sa société. Artiste, commissaire d'exposition et nous visiteurs potentiels sommes confrontés à des travaux pratiques d'un genre nouveau : où placer le curseur qui permet d'établir la ligne de démarcation entre censure et liberté d'expression ? On en peut s'empêcher de voir, dans cette actualité de l'exposition de Clichy, un retrait qui ressemble à un repli en bon ordre signe avant coureur d'une retraite plus vaste. Comment la vie sur une frontière serait autrement qu'agitée ?
"Femina ou la réappropriation des modèles"
Exposition du 25 janvier au 26 avril 2015
Pavillon Vendôme
7 rue du Landy
92110 Clichy-la-Garenne