Les adversaires de l'austérité prennent les commandes en Grèce, après la nette victoire du parti de gauche Syriza qui, en s'alliant avec un parti de droite souverainiste pour gouverner, laisse augurer de négociations difficiles avec l'Union européenne.
Alexis Tsipras, 40 ans, dirigeant de la gauche radicale Syriza, a été désigné lundi premier ministre de Grèce après avoir prêté serment auprès du président de la République Carolos Papoulias, selon des images diffusées par la télévision publique Nerit.
«Je servirai toujours la Grèce et l'intérêt du peuple grec», a déclaré Alexis Tsipras en costume bleu, sans cravate comme à son habitude, lors d'une prestation civile de serment, une première en Grèce, pays orthodoxe, où cette cérémonie revêt d'ordinaire un caractère religieux.
L'Europe a d'ores et déjà prévenu le futur chef du gouvernement grec, Alexis Tsipras, 40 ans, qu'elle n'était pas prête à effacer la dette du pays dont Syriza réclame la restructuration.
Or, c'est la ligne la plus ferme vis-à-vis des créanciers UE et FMI qui semble l'avoir emporté avec l'annonce d'un accord de gouvernement entre Syriza et le petit parti nationaliste des Grecs indépendants.
Les deux formations vont cumuler une majorité de 162 sièges (149+13) sur 300 sans que la répartition des postes au sein du futur gouvernement soit encore connue. Fort de cette coalition constituée quelques heures seulement après la victoire de Syriza aux législatives anticipées dimanche.
«Le soleil brille, les guichets automatiques fonctionnent»
Le nouvel homme fort de la Grèce douche ainsi les espoirs des partenaires européens du pays de voir la gauche radicale assouplir ses positions sur la dette et l'austérité, comme cela aurait été le cas s'il s'était allié avec une formation pro-européenne plus conciliante comme To Potami («La rivière») arrivée en quatrième position avec 17 sièges.
Arrivant au siège de Syriza, Panos Skourletis, porte-parole de Syriza, optait pour un ton léger et rassurant, notamment face au chiffon rouge d'une panique bancaire : «le soleil brille, les guichets automatiques des banques fonctionnent, les gens sont au travail».
Responsables européens et analystes étaient nettement plus préoccupés : «il n'y a pas d'argent disponible à dépenser vu la chute des recettes budgétaires et l'affaiblissement de l'économie lié à l'incertitude budgétaire», avertissait la banque allemande Berenberg, jugeant que cela réduisait la marge de négociation de Syriza.
Pour la chancelière allemande Angela Merkel, le nouveau gouvernement grec doit «respecter les engagements pris» par son prédécesseur. «Faire partie de la zone euro signifie qu'il faut respecter l'ensemble des accords déjà passés», a renchéri le président de l'Eurogroupe, Jeroen Dijsselbloem, alors que les ministres des Finances de la zone euro se réunissaient lundi à Bruxelles.
C'est le ministre des Finances du gouvernement grec sortant, Guikas Hardouvelis, qui représente la Grèce à cette réunion. Avec son successeur, dont le nom devrait être connu d'ici mardi, il faut s'attendre à des «moments de tension», a estimé un haut fonctionnaire européen.
Dès dimanche, Alexis Tsipras a averti que l'austérité était du passé, assurant cependant qu'il était disposé à négocier une solution «bénéficiant à tous».
L'enjeu pour le nouveau premier ministre grec sera de trouver des alliés parmi les membres de la zone euro pour faire bouger les lignes.
Les regards de Syriza sont tournés vers l'Italie, dont le ministre des Affaires étrangères, Paolo Gentiloni, a estimé que «le résultat grec, s'il est géré politiquement par la Grèce et l'Union européenne avec des négociations flexibles et réalistes, favorisera la demande de mettre un terme à la rigidité que nous, Italiens, avons toujours réclamée».
Côté français, le président français François Hollande a été parmi les premiers à féliciter M. Tsipras avec bienveillance, lui faisant part de «sa volonté de poursuivre l'étroite coopération entre nos deux pays, au service de la croissance et de la stabilité de la zone euro», tout en le rappelant à «l'esprit de responsabilité».
Mais «nous les pauvres, nous resterons dans la même situation, rien ne changera quelque soit le gouvernement, relativisait Giorgos, un retraité athénien. Les promesses électorales sont belles, mais rarement tenues».
Source : LaPresse