The stories of the street are mine, the Spanish voices laugh.
The Cadillacs go creeping now through the night and the poison gas,And I lean from my windowsill in this old hotel I chose,Yes one hand on my suicide, one hand on the rose.
I know you've heard it's over now and war must surely come,The cities they are broke in half and the middlemen are gone.But let me ask you one more time, O children of the dusk,All these hunters who are shrieking now oh do they speak for us?
And where do all these highways go, now that we are free?Why are the armies marching still that were coming home to me?O lady with your legs so fine O stranger at your wheel,You are locked into your suffering and your pleasures are the seal.
The age of lust is giving birth, and both the parents askThe nurse to tell them fairy tales on both sides of the glass.And now the infant with his cord is hauled in like a kite,And one eye filled with blueprints, one eye filled with night.
O come with me my little one, we will find that farmAnd grow us grass and apples there and keep all the animals warm.And if by chance I wake at night and I ask you who I am,O take me to the slaughterhouse, I will wait there with the lamb.
With one hand on the hexagram and one hand on the girlI balance on a wishing well that all men call the world.We are so small between the stars, so large against the sky,And lost among the subway crowds, I try to catch your eye.
Entre méditation et rêve éveillé, Léonard Cohen penché, au soir, à la fenêtre d’un vieil hôtel, observe, pensif, le lent manège des voitures de luxe dans lesquelles les bourgeois font monter leurs femmes d’un soir, prostituées ou « Escort-girls ». Une cigarette (qui tue à petit feu) entre les lèvres, tandis que son regard suit les gracieuses courbes de ces corps féminins à demi-dévoilés, il songe aux rumeurs de cette guerre froide qui n’attend qu’une étincelle pour se réchauffer, et s’interroge sur les vociférations guerrières des démagogues paranoïaques supposés représenter le peuple…A cette époque où hédonisme devient synonyme d’égoïsme, où luxe et luxure anesthésient les consciences, où, comme jadis les jeux du cirque, la télécécité détourne l’attention des vrais problèmes, le bon peuple se réfugie dans ses rêves pour ne pas voir la vacuité de sa vie.Reviennent alors les clichés des vieux films de Western, où le cowboy aventurier rêve de se retirer de ce monde violent pour vivre avec sa bien-aimée la saine et simple vie d’un paysan, près de la nature et près du ciel… alors que l’on ne sait que trop bien, même si l’on a pas vu la fin du film, que le destin en décidera autrement !C’est alors que, comme (presque) toujours dans la pensée poétique de Léonard Cohen, spiritualité et érotisme s’enlacent et s’emmêlent, l’étoile de David guide ses mains sur le chemin du désir, et les grandes questions existentielles – le sens de l’existence, l’inanité de l’humanité – ramènent à la recherche de l’amour, seule vérité de l’être. A Hélène
Histoires de la Rue
Les histoires de la rue sont miennes, rient les voix hispaniquesVoici les Cadillacs qui glissent dans la nuit et les gaz toxiquesEt je me penche à la fenêtre de l’hôtel ou je me reposeOui, une main sur mon suicide, une main sur la rose
C’est fait : la guerre est inéluctable ; vous savez ce qu’on ditLes villes sont coupées en deux, et les médiateurs partisMais, je vous le demande encore, enfants du crépusculeTous ces chasseurs qui crient et qui braillent, est-ce pour nous qu’ils hurlent ?
Où vont ces routes, maintenant que nous sommes libérés ?Pourquoi marchent encore ces armées qui, pour moi, étaient rentrées ?Oh, madame aux si belles jambes, étranger au volantVous êtes enfermés dans vos souffrances, vos plaisirs vous scellant
L’ère de luxure accouche, et les parents pressent l’infirmièreDe raconter des contes de fées, des deux côtés du verreOn tire l’enfant par le cordon, tout comme un cerf-volantEt un œil empli de nuit, un œil plein de plans
Viens, petite, nous allons trouver cette métairieFaire pousser de l’herbe et des pommiers, mettre le bétail à l’abriEt si je m’éveille la nuit et te demande mon nomEmmène-moi à l’abattoir ; j’attendrai comme les moutons
Avec une main sur l’hexagramme, une main sur la filleAu bord du puits aux vœux que tous appellent monde, j’oscilleSi petits devant les étoiles, nous sommes grands face aux cieuxPerdu dans la foule du métro, je tente d’attirer tes yeux
(Traduction – Adaptation : Polyphrène)