Le voyage est certainement le plus puissant terreau de la photographie. Cette rencontre brusque avec une autre réalité n’a aucun équivalent, aucun ersatz, et personne ne saurait être pleinement préparé à recevoir tant d’émotions nouvelles et contradictoires en une telle bouffée. C’est cet engrais créatif qui vient renouveler notre vision des choses, et de ce fait ouvrir un peu plus notre focale.
Bien sûr, ce n’est pas là une découverte nouvelle, et il existe des centaines de milliers de clichés de l’autre bout du monde. On en a vu défiler, des couchers de soleil tropicaux et des plages de sable blanc. C’est beau, c’est terriblement fade, c’est trop pittoresque. Le traditionnel artificiel y a depuis longtemps remplacé l’authentique sensible.
(C) Fred Tougas
Fred Tougas, lui, part à l’aventure. Celle où on enfile des baskets et où on grimpe à la force des mollets, jusqu’à avoir ce point de vue que peu de personnes ont encore eu la chance d’admirer. Il ne cherche pas le monument emblématique ou le portrait d’un vieillard local en noir et blanc, parce que ça fonctionne toujours. Il va plus loin dans son exode, au sens propre comme figuré.
Alors oui, peut-être peut-on trouver aussi une certaine facilité dans le choix de superbes vues aériennes, habitées par moments de créatures humaines immortalisées avec soin. Mais la conjugaison de l’effort physique, du grain argentique et des panoramas perdus confère une résonance particulièrement profonde à ce travail, fruit d’une véritable expérience photographique.
(C) Fred Tougas
Difficile de regarder ces photographies sans sentir l’humidité de la mousson dans nos cheveux, le vent glacé sur nos joues enflammées, les grains de sable collés à notre peau. On redécouvre le pouvoir de la nature en la voyant là, devant nous, comme un terrain de jeu que l’on ne saurait jamais véritablement maîtriser.
Cela peut sembler évident, et pourtant il est très rare qu’une véritable sensation se dégage de ce type de mémoires sur papier, autre qu’un besoin d’évasion envieux. Au contraire, ces images nous démontrent à quel point ces moments nous sont accessibles, dès lors que l’on a la sensibilité et la volonté, presque hargneuse, dont fait preuve Fred Tougas.
On se questionne encore sur la force intrinsèque qui nous attire tant vers le sommet des montagnes. En contemplant avec satisfaction la vue aérienne imprenable sur les environs, survient la sensation contradictoire d’être à la fois gigantesque et minuscule.
Fred Tougas
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Fred Tougas
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