a Rue de la Sardine, à Monterey en Californie, c’est un poème ; c’est du vacarme, de la puanteur, de la routine, c’est une certaine irisation de la lumière, une vibration particulière, c’est de la nostalgie, c’est du rêve. La Rue de la Sardine, c’est le chaos. Chaos de fer, d’étain, de rouille, de bouts de bois, de morceaux de pavés, de ronces, d’herbes folles, de boîtes au rebut, de restaurants, de mauvais lieux, d’épiceries bondées et de laboratoires. Ses habitants, a dit quelqu’un : » ce sont des filles, des souteneurs, des joueurs de cartes et des enfants de putains » ; ce quelqu’un eût-il regardé par l’autre bout de la lorgnette, il eût pu dire : » ce sont des saints, des anges et des martyrs « , et ce serait revenu au même.
Il n’y a pas de réelle histoire dans ce court roman de Steinbeck mais plutôt une panoplie de portraits, des destins qui se croisent, se chevauchent. Steinbeck y croque la vie dans les années 30 de la rue de la Sardine, une des rues de Monterey en Californie où il a vécu quelques temps. C’est la description d’une ville, ou plutôt d’une rue et de ses habitants. Des habitants au caractère bien trempé, drôles et tendres à la fois, à qui il arrive tout un tas de petites mésaventures rocambolesques qui les rendent tous terriblement attachants malgré leurs vices et leurs défauts. A travers ces nombreux portraits, Steinbeck livre là une belle étude sociologique sur l’humain dans ce qu’il a de meilleurs et de moins bon. Il dresse aussi le portrait de l’Amérique, son Amérique, avec comme toujours avec cet auteur une grande dimension sociale, une critique simple et honnête sans jamais être moralisante. Steinbeck décrit les gens tels qu’ils sont avec un profond humanisme. Et c’est ce que j’aime chez lui.
Il m’a toutefois manqué un petit quelque chose dans ce livre pour en faire un récit vraiment passionnant.