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Nombreux sont ceux qui crient « je ne suis pas Charlie ». Qui sont-ils ? Que veulent-ils dire ? Les réactions virulentes, voire violentes, qui s’expriment en France et dans le monde interpellent. Les protestations internationales se sont développées dans des pays musulmans qui ne sont pas des parangons de la démocratie. La meilleure réponse est de continuer à défendre la liberté d’expression. Ils défendent leur prophète, nous défendons nos libertés. Mais on ne peut pas ignorer les « je ne suis pas Charlie » qui s’entendent en France. Ils proviennent de jeunes, le plus souvent, qui ne sont évidemment pas tous des terroristes en puissance. Mais ils sont déçus, inquiets, radicalisés ou en voie de l’être. Il est important de se poser la question : comment ces jeunes en sont-ils arrivés là ? Certains ont suivi une déviance délinquante, initiée dans les banlieues et les quartiers dits difficiles. La désertification de ces quartiers et leur abandon par les services publics ont créé un fort sentiment de déréliction et de rejet. Le chômage important de ces jeunes contribue fortement à nourrir ce sentiment de non-appartenance. Certains sombrent alors dans la délinquance, allant de petits délits au banditisme, augmentant ainsi les chances de trouver sur leur chemin des « recruteurs » radicalisés et prosélytes qui leur apportent les moyens d’une révolte contre une société qui les rejette. Comment se sentir français lorsque l’on est exclu de la vie économique, lorsque l’action policière devient de plus en plus insupportable et que l’on se sent stigmatisé ? Comment ne pas ressentir comme une discrimination le simple fait de vivre dans un ghetto ? Ces jeunes n’étaient pas présents lors de la manifestation du 11 Janvier. Pour ceux-là, « Je ne suis pas Charlie » veut dire « je ne fais pas partie de cette société qui me rejette ». Une autre voie de radicalisation est de nature plus politique. Devant l’immense défi d’une politique de la ville efficace parfois mais qui, dans certains quartiers, est un véritable échec, les jeunes de ces quartiers se trouvent isolés de la société, ressentent un ostracisme injuste et sont alors en recherche d’un cadre qui leur donne une perspective de vie. Ils deviennent la proie facile des « recruteurs » ou des imams radicaux officiant dans les mosquées de banlieue qui leur offrent une justification dévoyée de donner un sens à leur vie. La délinquance, évoquée ci-dessus, conduit un certain nombre d’entre eux en prison où ils rencontrent des individus radicalisés qui les entrainent dans leur délire. L’Islam qui leur est inculqué insiste sur la supériorité de la loi coranique sur la loi légale. Ils deviennent musulmans avant d’être français. Et l’interprétation du Coran qui leur est inculquée est dévoyée et violente. Ces jeunes sont alors prêts à prendre les armes en suivant des filières qui les envoient à l’étranger avant de revenir en France, transformés en véritables terroristes. Internet et les réseaux sont devenus, également, un moyen de recrutement, utilisés avec une efficacité dangereuse par les recruteurs djihadistes. On connaît l’attirance, allant parfois jusqu’à l’addiction, de nombre de jeunes pour Internet et les écrans. C’est à cause de ces moyens que, souvent, des parents désorientés, voient leur enfant se transformer petit à petit, jusqu’au jour où il disparaît parce que parti vers un camp djihadiste d’entrainement. L’Etat, l’ensemble des hommes politiques, les parents, les éducateurs, les enseignants, tout le monde doit se sentit interpellé par ce qui ne peut être considéré que comme un échec.